Centrafrique: Méritocratie Malienne II : Les origines et les…

Publié le 30 juin 2015 , 9:04
Mis à jour le: 30 juin 2015 9:04 am

(Corbeau News Centrafrique)

BARTHELEMI

 

 

Méritocratie Malienne II : Les origines et les…

Bangui, (S.E.N) 30-06-2015

Au tournant des indépendances africaines dans les années 1960, les anciennes puissances coloniales sont confrontées à  deux défis : empêcher par tous les moyens la montée au pouvoir dans les anciennes colonies des régimes nationalistes-panafricanistes et, confrontées à  la Guerre froide et aidées en cela par les Etats-Unis, empêcher l’URSS d’avoir des alliés en Afrique, donc d’accéder aux minerais, ce qui était jusque-là , l’exclusivité occidentale. Globalement, l’Occident réussit à  écarter les nationalistes, soit par des assassinats (c’est le cas de Lumumba au Congo en 1961), soit par des guerres et des massacres à  grande échelle (c’est le cas des leaders de l’UPC, l’Union des populations du Cameroun), soit par divers artifices, en jetant les opposants en prison ou en exil (c’est le cas d’Abel Goumba en Centrafrique en 1964, après l’accident mystérieux en mars 1959 de Barthélémy Boganda). Dans les quelques pays où les régimes s’allient à  l’URSS, l’Occident garde malgré tout une présence et profite de la moindre occasion pour renverser les pouvoirs afin d’installer des régimes qui lui sont favorables et serviles ; par exemple, le renversement et l’assassinat de Thomas Sankara illustrent parfaitement ce dernier cas.

L’Occident mettra tout en œuvre pour garder la mainmise sur les anciennes colonies. L’une des armes qu’il va utiliser est la dette, prétextant dans les discours officiels reproduire le succès du plan Marshall à  l’Afrique, alors qu’en réalité, la raison essentielle est de maintenir une emprise géopolitique stratégique et avoir un accès aux minerais comme à  l’époque coloniale. Ainsi, l’adage suivant a été parfaitement appliqué : celui qui contrôle les finances d’une nation n’a pas besoin du contrôle total sur la gestion politique intérieure pour être le vrai patron, en tirant les ficelles en coulisses. Au moins, trois phénomènes historiques ont permis à  l’Occident de disposer des moyens financiers colossaux pour réaliser sa mainmise sur l’Afrique. En premier lieu, au moment des indépendances africaines en 1960, les banques privées occidentales regorgent d’eurodollars issus des prêts faits par les états-Unis aux Européens dans les années 1950, destinés au plan Marshall dans le cadre de la reconstruction d’après-guerre. Pour éviter le retour massif de ces eurodollars aux états-Unis, à  cause non seulement de la forte inflation que cela allait provoquer dans l’économie américaine, mais aussi du risque d’assèchement de l’or dans les coffres-forts américains, comme le stipulaient les accords en vigueur, c’est-à -dire d’échanger les remboursements contre de l’or ; les Occidentaux vont inciter leurs banques à  prêter massivement à  des taux avantageux aux pays africains nouvellement et nominalement indépendants. Naturellement les régimes africains, dont l’Occident a pris soin de s’assurer l’allégeance, vont se montrer intéressés, surtout à  des fins personnelles, par un tel déferlement de capitaux. Le deuxième phénomène historique qui explique l’explosion de la dette africaine est le choc pétrolier de 1973 provoqué par un quadruplement soudain des prix du pétrole. Les émirs des pays du Golfe vont déposer les immenses quantités de dollars résultant des profits réalisés par les ventes de pétrole dans les banques occidentales. C’est le phénomène dit des pétrodollars. Ces pétrodollars s’additionnant aux eurodollars liés au financement de la reconstruction de l’Europe dévastée par la guerre, vont à  nouveau affluer vers l’Afrique. Ainsi, en vingt ans, de 1960 à  1980, la part privée de la dette du tiers-monde va exploser. Quasiment de 0 au début des années 1960, elle atteint 2,5 milliards de dollars en 1970 puis 38 milliards de dollars en 1980. Enfin, le troisième phénomène de cette explosion de dette est ce qu’on appelle « l’aide liée », qui est de source bilatérale, c’est-à -dire accordée entre Etats directement. L’aide liée est une sorte de subvention indirecte des grandes entreprises occidentales, dont les intérêts sont payés par les peuples africains. Cette pratique date de la crise qui frappe l’Europe à  partir des années 1973-1975, connue sous le nom de « la fin des Trente glorieuses », c’est-à -dire la fin des trente années de forte croissance due principalement aux capitaux investis dans le cadre du plan Marshall. En fait, pour trouver des débouchés aux marchandises qui ne trouvent plus preneurs en Occident à  cause de la baisse du pouvoir d’achat, l’idée est d’accorder des prêts exclusivement destinés à  acheter des marchandises fabriquées dans le pays créancier, même si elles ne sont pas moins chères ou les mieux adaptées au plan de développement du pays acheteur. De 6 milliards de
dollars en 1970, l’aide bilatérale explose et s’élève à  36 milliards de dollars en 1980. Alors, chers Amis, Quiconque a bien suivi l’historique et les raisons de l’explosion de la dette africaine qui deviendra fatale et mortifère pour les peuples conclura avec nous que toutes ces initiatives n’ont rien à  voir avec de la générosité et le souci du développement, d’autant que les régimes africains alignés sur l’Occident et bénéficiaires de ces immenses transferts étaient ostensiblement despotiques, corrompus et vénaux. La Guerre froide, le pompage des matières premières et l’aide liée ont justifié le soutien financier voire même militaire à  une bande de dictateurs crapuleux et dangereux contre leurs peuples, d’Idi Amin Dada de l’Ouganda, en passant par Mobutu du Zaïre, Mengistu d’Ethiopie, Samuel Doe du Libéria, Bokassa de la Centrafrique, qui rivalisaient dans la brutalité, dans la folie dépensière et dans l’indifférence totale face aux besoins primaires et fondamentaux de leur peuple. On se souvient encore que le couronnement de Bokassa en 1977 (avec l’accord du Vatican), grand admirateur de Napoléon 1er et grand ami de Giscard d’Estaing, coûta un cinquième du budget
annuel de la nation centrafricaine, soit près de 22 millions d’euros. Des détournements colossaux de Mobutu déposés dans les comptes en Occident à  près de 8 milliards de dollars alors que la dette du Zaïre, lors de sa chute en 1996, s’élevait à  12 milliards de dollars. Aux deux acteurs du financement de la dette déjà  mentionnés plus haut, les banques occidentales pour la part privée et les Etats occidentaux pour la part bilatérale avec l’aide liée, il faut aussi mentionner la paire FMI – Banque mondiale pour ce qui est de la part multilatérale. Nulle au début des années 1960, la part multilatérale de la dette africaine a atteint 1,2 milliards de dollars en 1970 puis 15,5 milliards de dollars en 1980. Dette privée, dette bilatérale et dette multilatérale, en tout et pour tout.

 

LE 29-06-2015, SEN360

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