Centrafrique : la tokenisation des ressources naturelles, une initiative précipitée et controversée

Publié le 29 mai 2023 , 7:20
Mis à jour le: 29 mai 2023 8:08 pm

La tokenisation des ressources naturelles en RCA, une initiative précipitée et controversée

 

L'opposant Martin Ziguelé, Président du parti MLPC à gauche, puis Anicet Georges Dologuelé, Président du parti URCA, au milieu, et Abdou Karim Meckassoua, Président du parti Chemin de l'Esperance, à droite. Photo combinée par CNC
L’opposant Martin Ziguelé, Président du parti MLPC à gauche, puis Anicet Georges Dologuelé, Président du parti URCA, au milieu, et Abdou Karim Meckassoua, Président du parti Chemin de l’Esperance, à droite. Photo combinée par CNC

 

 

Bangui, 30 mai 2023 (CNC) — La première session ordinaire de l’Assemblée Nationale centrafricaine, qui s’est tenue récemment, a été le théâtre d’un débat houleux autour du projet de loi sur la tokenisation des ressources naturelles et foncières du pays. Cette initiative vise à utiliser la technologie de la blockchain pour mobiliser des capitaux nationaux et internationaux à partir des ressources minières, pétrolières, forestières, agricoles et foncières du pays, dans le but, selon les initiateurs, de relancer l’économie et de favoriser le développement. Cependant, la manière dont ce projet de loi a été élaboré et les réponses apportées lors des auditions soulèvent des préoccupations quant à son opportunité et à sa faisabilité.

 

Une précipitation regrettable:

 

L’une des principales préoccupations soulevées par trois députés et aussi membres de plein droit de  la Commission Mixte Économie, Finances et Plan/Équipements et Communications/Production Ressources Naturelles et Environnement instaurée pour la cause et présidée par l’honorable Guy Samuel NGANATOUA, concerne la précipitation dans l’examen de ce projet de loi. Ces trois élus de la nation, Martin ZIGUELE, Anicet Georges DOLOGUELE et Rachel NGAKOLA, dans leur note de réserve émise sur le projet de Loi régissant la Tokenisation des Ressources Naturelles et foncières en République Centrafricaine adressé au président de ladite Commission Mixte, ils déplorent le manque d’avis préalable des professionnels du domaine et des partenaires techniques et financiers, ce qui soulève des doutes quant à la pertinence et à l’efficacité du projet. Les enjeux économiques et environnementaux liés à la tokenisation des ressources naturelles méritent une réflexion approfondie et une consultation plus large, afin d’éviter d’éventuelles conséquences néfastes pour le pays et ses communautés.

 

Des interrogations sur la forme et le fond :

 

Les amendements proposés par la Commission Mixte pour améliorer le projet de loi soulignent les lacunes initiales de celui-ci. Les modifications suggérées, telles que la correction de termes inappropriés et la clarification de certains points, montrent que le texte initial était lacunaire et mal rédigé. Il est essentiel que toute législation liée à des enjeux aussi cruciaux que la tokenisation des ressources naturelles soit minutieusement élaborée et évaluée afin d’éviter toute ambiguïté juridique et tout préjudice potentiel.

 

Opacité et manque de transparence:

 

Un autre aspect préoccupant est l’opacité entourant l’identification et la publication des ressources naturelles. Les trois élus de la nation, tous, membres de la Commission Économie, Finances et Plan à l’Assemblée nationale, ont exprimé leur inquiétude quant à l’absence de clarté quant aux ressources qui seraient éligibles à la tokenisation, ainsi que sur la manière dont les transactions seraient effectuées. Cette opacité crée un climat d’incertitude et soulève des interrogations quant à la gestion et à la redistribution équitable des bénéfices issus de la tokenisation des ressources naturelles.

Pour les honorables, Martin ZIGUELE, Anicet Georges DOLOGUELE et Rachel NGAKOLA:

il vous souviendra que le 20 avril 2022, nous vous avions écrit pour vous exprimer notre grande réserve quant à l’opportunité de la Loi régissant la Cryptomonnaie en République centrafricaine. Nous avions signalé les contraintes légales, règlementaires et techniques qui rendaient ce projet irréalisable. Malheureusement, notre opinion n’avait pas été prise en compte et notre lettre a même été qualifiée en plein hémicycle de « tract d’opposants » (SIC). Les faits nous ont finalement donné raison puisque, confronté aux réalités des engagements internationaux de notre pays, le Gouvernement a été obligé de faire un humiliant rétropédalage”.

Et d’ajouter que: Si l’objectif visé est l’exploitation rationnelle et profitable de nos ressources naturelles, la priorité n’est surtout pas de se lancer dans une aventure incertaine, mais plutôt de mieux organiser, règlementer et rentabiliser l’existant. La priorité est également d’améliorer nos moyens de contrôle pour permettre une meilleure captation des ressources tirées de ces secteurs économiques”

Enfin, il serait plus logique que toutes les ressources naturelles soient au préalable identifiées avec le maximum de précisions et publiées de manière transparente, pour que leur « tokenisation » ait du sens. Pour le moment tout se passe dans une totale opacité, ce qui entretien la conviction qu’à travers cette loi, le Gouvernement serait plutôt en train d’organiser le bradage des ressources naturelles de notre pays à toute la pègre de la Planète”. Peut-on lire dans leur note de réserves, pour enfin préciser que:

 

L’implication des parties prenantes :

 

Un autre point soulevé lors des auditions concerne l’absence du Ministère des Finances et du Budget dans le processus d’élaboration du projet de loi. Les députés ont remis en question le manque de coordination et de consultation entre les ministères, ce qui remet en cause la solidité du projet de loi dans son ensemble. L’implication de toutes les parties prenantes, y compris les acteurs financiers et les professionnels du domaine, est essentielle pour garantir la crédibilité et l’efficacité de la tokenisation des ressources naturelles en République centrafricaine.

En un mot, le projet de loi sur la tokenisation des ressources naturelles et foncières de la République centrafricaine soulève de nombreuses préoccupations quant à sa précipitation, son manque de transparence et son manque de coordination avec les autres ministères. Les amendements proposés par la Commission Mixte sont un premier pas vers l’amélioration du texte, mais ils soulignent également les lacunes initiales de celui-ci. Il est essentiel que ce projet de loi soit réexaminé de manière approfondie, en tenant compte des préoccupations soulevées, et en impliquant toutes les parties prenantes concernées. La tokenisation des ressources naturelles peut offrir des avantages économiques potentiels, mais elle doit être mise en œuvre de manière responsable, transparente et équitable pour le bien du pays et de ses communautés.

 

Par Alain Nzilo

Directeur de Publications

 

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