CENTRAFRIQUE : GUERRE FROIDE FRANCO-RUSSE ?

Publié le 16 avril 2018 , 4:38
Mis à jour le: 16 avril 2018 4:38 pm

CENTRAFRIQUE : GUERRE FROIDE FRANCO-RUSSE ?

 

 

 

 

Le Président centrafricain et son homologue français à l’Élysée en France.

 

 

Bangui, le 17 avril 2018.

Par : Joseph Akouissonne de Kitiki, CNC.

 

FRANÇAIS ET RUSSES S’ÉPIENT

          Depuis la livraison d’armes et l’envoi de soldats russes en Centrafrique, chasse gardée de la France, l’humeur de l’ancienne puissance coloniale a viré à l’aigre.

          Son exaspération est montée d’un cran quand on a appris que les Russes et leur arsenal s’installaient à Béréngo, le « Versailles » de l’ex- Empereur Bokassa ! Pour l’Hexagone, l’intrusion des Russes sur ce territoire, symbole de la Françafrique, est une véritable provocation.

          Quelle coïncidence ! Au moment même où l’Occident et la Russie semblent déterrer la hache de la guerre froide, Français et Russes vont s’épier en Centrafrique. Ce pays exsangue, devenu un champ de bataille généralisé, avait-il besoin que l’Ouest et l’Est y importent leurs conflits ? La Centrafrique, pays souverain, doit-elle demander à Paris la permission de nouer des relations avec d’autres nations ?

          Surtout que la France et les puissances étrangères se sont montrées incapables d’arrêter les massacres et de ramener la paix en Centrafrique. L’embargo sur les armes à destination de la RCA a considérablement affaibli les FACAS (Forces Armées Centrafricaines), alors que les rebelles, eux, continuent à s’équiper grâce au trafic de matières premières et avec la complicité du Tchad, du Soudan et d’autres pays limitrophes.

          Il est donc légitime que les autorités cherchent des assistances ailleurs, pour rendre leur armée opérationnelle, afin de combattre les ex-Sélékas qui, rappelons-le, occupent 80% du territoire et menacent à nouveau de prendre le pouvoir à Bangui.

 

MAUVAISE HUMEUR DE LA FRANCE

          Le président Emmanuel Macron semble tourner le dos à la République Centrafricaine – ce que l’on peut sentir malgré le voile diplomatique que l’on tente de jeter sur ses manifestations de mauvaise humeur envers son homologue centrafricain.

          Les exemples abondent : n’a-t-il pas refusé de recevoir le président centrafricain en audience récemment ? Il s’est déplacé en Afrique de l’Ouest, au Mali en particulier, mais il ne s’est pas rendu à Bangui. Pourtant, la situation y est plus catastrophique. L’armée française est impliquée sur le territoire centrafricain depuis l’indépendance, mais il semble que plus aucun officiel français n’évoque encore la tragédie qui s’y déroule.

          Pendant le quinquennat de François Hollande, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, s’était, plusieurs fois, rendu à Bangui. Le président aussi.

          Depuis la réduction drastique de la force Sangaris, le gouvernement français donne l’impression de reprocher beaucoup de choses aux dirigeants centrafricains. La principale, c’est d’avoir fait appel aux Russes. La question, lancinante, interpelle : « Le président français s’est-il définitivement brouillé avec son homologue centrafricain ? »

          Mais nous savons bien qu’il ne faut pas se mentir : pendant encore un certain temps, la RCA restera le symbole de la Françafrique, une chasse gardée. Rien ne pourra se décider en Centrafrique sans que l’ancienne puissance coloniale ne donne son aval.

          A cela, il faut ajouter l’incompétence des dirigeants, leur tendance à piller les caisses de l’État, leur penchant au despotisme et à la corruption – et, surtout, leur manque flagrant de patriotisme, qui plombe l’honneur du pays.

 

« TOUS ENSEMBLE » COMME LE DISAIT BARTHÉLEMY BOGANDA

          Il faut absolument tout faire pour réunir à nouveau les Centrafricains dans la fraternité. Mais voilà ! A cause des manipulations de puissances étrangères, des fractures se sont produites dans le tissu social centrafricain. Des fractures profondes et difficiles à ressouder.

          Il faudra donc beaucoup de bonne volonté pour ramener la sérénité entre les Centrafricains de toutes les confessions : catholique, protestante, musulmane, animiste. Rappelons-nous qu’il fut un temps où l’harmonie était de mise sur la terre des Bantous. Est-ce qu’on ne peut pas espérer que les Centrafricains se réconcilient et retrouvent le chemin de la paix ?

          Il faut, « tous ensemble », arriver à isoler les chefs des bandes armées et les contraindre à déposer les armes sans conditions. Les multiples groupes porteurs d’engins de mort qui veulent se partager la République Centrafricaine doivent arrêter les massacres et déposer les armes s’ils recherchent la paix comme ils le prétendent.

          La RCA sortira un jour, indubitablement, du chaos sanglant dans lequel elle est plongée depuis tant d’années. C’est son peuple qui détient la clé de la paix et de la réconciliation. Pour extirper leur pays des griffes des mercenaires étrangers, c’est « tous ensemble » que les Centrafricains doivent lutter.

« La liberté ou la mort, nous vaincrons ! » (Thomas Sankara)

 

Selon une source non confirmée, le président de la Russie, Vladimir Poutine, est attendu prochainement à Bangui, pour ratifier une coopération bilatérale et agissante entre la République Centrafricaine et la Russie.

          Encore une nouvelle qui risque de déplaire au président Emmanuel Macron.                                                                                               

 

JOSEPH AKOUISSONNE DE KITIKI et LOAWE à BANGUI

(16 avril 2018)

 

 

 

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