CENTRAFRIQUE : LA COUR CONSTITUTIONNELLE DANS SON RÔLE JURIDICTIONNEL DE GARANT DES INSTITUTIONS RÉPUBLICAINES ET DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE.

Publié le 28 novembre 2020 , 5:37
Mis à jour le: 28 novembre 2020 5:37 am
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l'auteur de l'article. Photo de courtoisie.
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l’auteur de l’article. Photo de courtoisie.

 

 

Bangui, République centrafricaine, samedi, 28 novembre 2020, 11:33:07 ( Corbeaunews-Centrafrique ). Les prévisions de nos précédentes analyses sont couronnées de surprises et stupéfactions à la hauteur des enjeux électoraux. En effet, après la valse festive de dépôt de candidatures à l’Autorité Nationale des Élections (ANE) vient le moment de consolation individuelle et collective. La haute juridiction suprême, garant de la sécurité de l’architecture juridique a rappelé aux apprentis délinquants, aux fossoyeurs de la république qu’ils ne sont pas au dessus de la loi. Les vingt et deux (22) dossiers des présidentielles et les milliers de de candidatures pour les législatives ont été transférés à la cour constitutionnelle pour examen afin d’établir la liste des candidats éligibles pour participer au scrutin groupé du 27 décembre 2020. C’est dans cette logique arithmétique que la noble cour constitutionnelle a délibéré en audience publique matérialisé par la décision N*024/CC/20 du 27 novembre 2020 arrêtant la liste définitive des candidats aux élections législatives du 27 décembre 2020.

 

D’abord sur la forme, la haute juridiction s’est déclarée compétente pour statuer sur l’examen des candidatures.

S’agissant de la recevabilité, la cour a déclaré deux (2) candidatures irrecevables au motif qu’elles étaient enregistrées hors délai légal au greffe de la dite cour. Au fond, et après un examen minutieux de chaque dossier, la cour constitutionnelle a invalidé soixante dix huit (78) candidatures aux législatives dont huit (8) députés encore en exercice sur 1585 dossiers enregistrés après avoir épuisé (selon les dispositions des articles 92 à 97 du code électoral) les recours introduits par des tiers soit pour invalidation des candidatures, soit pour rectifier des erreurs matérielles, soit pour des contestations de rejets effectués par l’Autorité Nationale des Élections.

Faisant référence aux dispositions de l’article 37 du code électoral, les différentes candidatures sont invalidées soit pour des casiers judiciaires non valides ou à la frontière d’un faux en écriture passible de peines pénales, soit pour des documents d’état civil non conformes, soit pour des soucis avec les fiscs, d’appartenance à des groupes armés, d’appartenance à un parti politique qui n’est pas légalement constitué, soit des cautions non payées ou de chèques sans provision également constitutifs d’une infraction pénale etc…

A travers cette décision, la cour constitutionnelle a ainsi donné un contenu à la notion de bonne moralité qui paraissait abstraite à l’image d’un fourre-tout. Le coup de poing de la cour constitutionnelle qui sonne la fin de la récréation en marquant son indépendance et sa neutralité laisse perplexe le citoyen lambda qui s’interroge :

Pourquoi ces motifs judiciaires évoqués par la cour constitutionnelle pour l’invalidation des candidatures n’aboutissent-ils pas à des condamnations pénales ?

La cour constitutionnelle confirme t-elle de façon insidieuse que ce régime fait la promotion de l’impunité ?

Puisque selon les dispositions de l’article 106 de la constitution la décision de la cour constitutionnelle s’impose aux pouvoirs publics et aux autorités administratives, peut-on s’attendre à une suite judiciaire ?

Connaissant la mentalité de nos compatriotes, est-il démocratique de remettre en cause les décisions de la cour constitutionnelle ?

En conséquence de ce qui précède, il apparaît important de rappeler que traditionnellement, les délibérations de la cour constitutionnelle sont accusées d’être inféodées ou à la solde du pouvoir alors que sous d’autres horizons comme au Malawi, la cour constitutionnelle a écrit une page de l’histoire jurisprudentielle en invalidant la réélection du président de la république.

Cette décision qui a atteint l’autorité de la chose jugée c’est à dire non susceptible de recours pose les bases de la reconstruction d’un état de droit synonyme d’un envol démocratique. S’inspirant de la décision de la cour constitutionnelle sur les candidatures aux législatives, l’adrénaline monte dans les quartiers généraux des candidats aux présidentielles car ne l’oublions pas…

la candidature du président de la république à sa propre succession est aussi susceptible d’être invalidée…la loi est dure mais c’est la loi.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.

 

Paris le 27 novembre 2020.

Bernard SELEMBY DOUDOU.

Juriste, administrateur des élections.

Tel : 0666830062.

 

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