LA VAKAGA :  ENTRE PROPAGANDE ET MISÈRE, LE PARADOXE D’UN APPEL AU TROISIÈME MANDAT DE TOUADERA

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LA VAKAGA :  ENTRE PROPAGANDE ET MISÈRE, LE PARADOXE D’UN APPEL AU TROISIÈME MANDAT DE TOUADERA

 

 

LA VAKAGA :  ENTRE PROPAGANDE ET MISÈRE, LE PARADOXE D'UN APPEL AU TROISIÈME MANDAT DE TOUADERA
Manifestation à Ouandja , Soutien affiché à la candidature de Faustin Archange Touadéra.

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 La sous-préfecture de Ouandja, située à plus de 1000 kilomètres de Bangui, dans la préfecture de la Vakaga, région de Fertit, vient d’enregistrer un acte politique inattendu. Un mémorandum daté du 13 janvier 2025, signé par “la population de Ouandja”, demande officiellement la candidature du président Faustin Archange Touadera aux élections présidentielles de décembre 2025.

 

Appel au troisième mandat de Touadera qui pose question dans la VAKAGA

 

Le document, rédigé sur papier à en-tête officiel de la sous-préfecture de Ouandja, expose deux revendications principales : le développement de l’agriculture mécanisée et la distribution de semences améliorées pour combattre l’insécurité alimentaire. Il se termine par un slogan sans équivoque : “Oui à la candidature du Professeur Faustin Archanges Touadera, Non aux BRDC ennemis de la paix.”

 

Pourtant, ce mémorandum de Ouandja s’inscrit dans un contexte particulier d’abandon administratif et social. La région, située dans la zone des trois frontières entre la République centrafricaine, le Tchad et le Soudan, souffre d’un isolement chronique. Les routes sont inexistantes ou impraticables pendant la saison des pluies qui dure plusieurs mois, transformant ces localités en véritables îlots coupés du reste du pays.

 

Et ce n’est pas tout! L’absence d’infrastructures hydrauliques oblige la population à s’approvisionner dans les marigots, partageant les points d’eau avec le bétail et les animaux sauvages. Cette situation provoque régulièrement des maladies hydriques, particulièrement chez les enfants. Les structures de santé sont quasi inexistantes, le centre de santé le plus proche se trouve à plusieurs dizaines de kilomètres.

LA VAKAGA :  ENTRE PROPAGANDE ET MISÈRE, LE PARADOXE D'UN APPEL AU TROISIÈME MANDAT DE TOUADERA
Mouvement Cœurs Unis , Mobilisation des jeunes en fa

 

Et la sécurité  dans la VAKAGA   dans toute cette histoire?

 

C’est la bonne question. En effet, le désarmement récent de la population par les éléments de l’armée nationale et les mercenaires russes du groupe Wagner a créé un dangereux vide sécuritaire. Auparavant, les habitants disposaient d’armes artisanales ou de récupération pour se défendre contre les incursions des bandits venus du Soudan voisin. Désormais désarmés, ils se retrouvent sans défense face aux braquages et aux exactions.

Un jeune de Boromata décrit la situation :  “les soldats FACA et les Wagner nous ont désarmés, prétendant nous protéger. Mais une fois que le désarmement est terminé, ils sont partis et nous laisser sans défense contre les bandits soudanais qui traversent la frontière comme ils veulent”.

Un jeune homme victime d’un braquage dans la ville de Boromatha, dans la Vakaga, photographié le 13 janvier 2025 avec des blessures visibles à l’épaule droite.”
Un jeune homme victime d’un braquage dans la ville de Boromatha, dans la Vakaga, photographié le 13 janvier 2025 avec des blessures visibles à l’épaule droite.”

 

Et le social dans la VAKAGA  ?

 

Sans passer par quatre chemins, on peut dire aujourd’hui que la préfecture de la Vakaga, que ça soit à Boromata, Gordile, ou encore à Ouandja,  connaît une situation alimentaire alarmante. Les marchés sont mal approvisionnés, les prix des denrées de première nécessité atteignent des sommets. L’agriculture locale, principalement vivrière, peine à nourrir la population. Les promesses de mécanisation agricole mentionnées dans le mémorandum sonnent creux face à l’absence totale d’équipements et d’accompagnement technique.

 

Le document officiel évoque la distribution de semences améliorées pour lutter contre l’insécurité alimentaire. Pourtant, les paysans de la Vakaga n’ont jamais reçu le moindre soutien agricole. Les techniques culturales restent rudimentaires, limitées à une agriculture de subsistance qui ne permet pas de dégager des surplus commercialisables.

 

La situation sécuritaire s’aggrave de jour en jour.

 

Les bandits soudanais, profitant de l’absence totale de forces de l’ordre, multiplient les incursions. Les braquages sont devenus une réalité quotidienne. La population, privée de moyens de défense, vit dans la peur permanente. Ni police, ni gendarmerie, ni armée ne sont présentes pour assurer la sécurité des habitants.

 

Le phénomène d’infiltration démographique inquiète les populations de la Vakaga. Des groupes armés venus du Soudan s’installent progressivement dans les villages, profitant du vide sécuritaire. Cette occupation rampante menace l’équilibre démographique et social de la région. Les autorités locales, démunies, assistent impuissantes à cette transformation.

 

Les conditions de vie des femmes et des enfants sont particulièrement inquiétantes.

 

La malnutrition touche une grande partie de la population. L’accès à l’éducation reste un luxe, les écoles manquent d’enseignants et de matériel pédagogique. Les jeunes filles, confrontées à l’absence de perspectives, quittent souvent la région ou se marient très jeunes.

 

Dans ce contexte de dénuement extrême, l’organisation d’une manifestation de soutien politique pose question. Des témoignages concordants recueillis par la rédaction du CNC indiquent que cette manifestation de soutien à la nouvelle candidature de Baba Kongoboro pour un troisième mandat a  été organisée moyennant de maigres compensations financières. “On distribue 500 ou 1000 francs CFA par personne pour qu’elles marchent avec des banderoles imprimées à Bangui“, affirme un agent de la mairie de Ouandja  sous couvert d’anonymat.

 

Le mémorandum lui-même présente des incohérences.

 

Rédigé dans un style administratif soigné, il contraste avec le niveau d’alphabétisation de la région. Les revendications concernant l’agriculture mécanisée semblent déconnectées des besoins immédiats de la population : accès à l’eau potable, sécurité, désenclavement.

 

La liste des destinataires du document révèle sa dimension politique : Présidence, Gouvernement, ANE, préfecture, MINUSCA. Cette diffusion large vise manifestement à donner l’image d’un soutien populaire au président Baba Kongoboro dans une région pourtant largement délaissée par l’État centrafricain  depuis des années.

 

L’instrumentalisation politique de la misère n’est pas nouvelle en Centrafrique.

 

Les régions les plus pauvres, où la population lutte quotidiennement pour sa survie, deviennent des terrains propices aux manipulations électorales. La précarité économique rend les habitants vulnérables aux pressions et aux incitations financières, même modestes.

 

Le cas de Ouandja, Boromata, Gordile  illustre les limites du développement en Centrafrique. Malgré les discours officiels sur la décentralisation et le développement local, les régions périphériques restent abandonnées. Les services publics sont inexistants, l’État n’assure plus ses fonctions régaliennes de base.

 

Le BRDC, ennemi pointé du doigt par les manipulateurs

 

La mention des “BRDC ennemis de la paix” dans le mémorandum rappelle les tensions politiques qui traversent le pays depuis plusieurs années. Cette référence aux opposants politiques réunis au sein du Bloc républicain pour la défense de la Constitution (BRDC) dans un document censé émaner de la population locale trahit son origine partisane.

 

L’avenir de la Vakaga pousse les citoyens centrafricains à s’interroger. Sans réponse rapide aux problèmes sécuritaires, le risque d’une déstabilisation complète est réel. L’absence de perspectives économiques pousse les jeunes à l’exode. Le tissu social traditionnel se délite progressivement.

 

Ce mémorandum de Ouandja restera comme un exemple de l’écart croissant entre la propagande politique et les réalités du terrain. Pendant que les documents officiels parlent de développement et de soutien populaire, la population de la Vakaga continue de survivre dans des conditions d’une précarité extrême.​​​​​​​​​​​​​​​​

 

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