République centrafricaine : La crédibilité des Nations unies est en jeu (Amnesty International)

Publié le 5 novembre 2014 , 10:40
Mis à jour le: 5 novembre 2014 10:40 pm

Amnesty International  /  Corbeau News Centrafrique: 06-11-2014,  3h36

les victimes de guerre en Centrafrique
©Amnesty International

La mission de maintien de la paix des Nations unies en République centrafricaine doit prendre des mesures courageuses afin de protéger les civils face aux attaques croissantes motivées par l’intolérance religieuse dans le centre du pays. Malgré le déploiement d’une nouvelle mission de maintien de la paix des Nations unies le 15 septembre, des dizaines de civils, dont plusieurs enfants, ont été tués et des milliers d’autres ont été déplacés ces dernières semaines.

DE NOUVELLES VIOLENCES À BANGUI

Si la capitale, Bangui, est secouée par de nouvelles violences depuis le début du mois d’octobre, les populations vivant dans les régions du centre de la République centrafricaine paient un tribut particulièrement lourd à l’intensification du conflit entre différents groupes armés.

Si l’on veut qu’elle soit un tant soit peu crédible, la mission de maintien de la paix des Nations unies doit prendre des mesures plus fermes pour véritablement protéger les civils des nombreuses violations auxquelles ils sont exposés.

LES VIOLENCES DE L’ANNÉE DERNIÈRE SE RÉPÈTENT

Compte tenu des attaques menées par la Séléka, les forces anti-balaka et des combattants peuls armés dans les régions du centre de la République centrafricaine, la situation est extrêmement explosive et dangereuse. Si les mesures qui s’imposent ne sont pas prises de toute urgence, elle pourrait basculer dans une violence sans limite motivée par l’intolérance religieuse, comme ce que nous avons vu cette année dans l’ouest.

 

Lors d’une mission dans les régions du centre du pays, nous avons recueilli des informations sur des attaques récentes ayant visé des civils dans les villes de Dekoa et Bambari, et dans plusieurs villages à proximité de Bambari, notamment Yamalé, Batobadja, Matchika, Tchimangueré, Gbakomalékpa et Baguela. Les forces de la Séléka, majoritairement musulmanes et désormais scindées en au moins deux groupes armés, et les milices anti-balaka, essentiellement chrétiennes et animistes, s’affrontent dans la région depuis plusieurs mois.

LES COMBATS DES FORCES FRANÇAISES CONTRE LA SÉLÉKA A DEKOA

Le 10 octobre, une attaque lancée par la Séléka dans la ville de Dekoa – à 260 kms de Bangui – et aux alentours a causé la mort de 14 civils. Trois femmes et quatre enfants figuraient parmi les personnes tuées ce jour-là. Neuf des victimes ont péri dans l’enceinte de l’église catholique ; cinq ont été directement prises pour cible alors qu’elles essayaient de se cacher dans le salon du principal bâtiment résidentiel.

Cinq autres victimes ont été tuées plus tard ce même jour par des membres de la Séléka qui s’enfuyaient dans la brousse. Deux autres civils pris en otage par des combattants de la Séléka disant vouloir les utiliser comme « guides » n’ont pas reparu depuis lors.

Les forces armées françaises sont toutefois arrivées à l’église peu après le début de l’attaque. Elles se sont engagées dans un combat prolongé avec la Séléka, tuant au moins six membres de celle-ci, dont le « colonel » ayant mené l’attaque. Un nombre plus restreint de soldats de la paix des Nations unies a également contribué à mettre un terme aux homicides de civils.

LES PERSÉCUTIONS DES MUSULMANS À BAMBARI

Miliciens anti-balaka © Ivan Lieman/AFP/Getty Images

 

Miliciens anti-balaka © Ivan Lieman/AFP/Getty Images

De nombreuses attaques ont eu lieu ces dernières semaines dans la ville de Bambari – à 380 km au nord-est de Bangui – et aux alentours, et leur rythme semble s’accélérer actuellement.

Le 29 septembre, des combattants anti-balaka ont tué Abdou Salam Zaiko, un civil musulman, après que le véhicule de cet homme fut tombé en panne. Au moins deux autres musulmans passagers de ce véhicule auraient perdu la vie au cours de cette attaque. Les tensions ont fortement augmenté lorsque le corps d’Abdou Salam Zaiko a été ramené gravement mutilé à Bambari, où il résidait. Plus tard, le 1er octobre, en guise de représailles semble-t-il, un groupe composé de membres de la Séléka et de jeunes gens armés s’en est pris à un camp de personnes déplacées à Bambari, tuant cinq civils et en blessant plusieurs autres. L’homicide d’Abdou Salam Zaiko et de plusieurs des passagers de sa voiture s’inscrit dans une série de cas de musulmans de Bambari pris pour cible par des miliciens anti-balaka.

LES CIVILS, FORCÉS DE FUIR LE CONFLIT

Les populations fuient près de Bambari © AI
Les populations fuient près de Bambari © AI

Ces récentes violences ont déclenché une nouvelle vague de déplacements dans la zone. Des milliers de personnes ont fui, beaucoup se sont réfugiées à l’église de Notre-Dame des Victoires, à l’extrémité ouest de Bambari. D’autres ont marché jusqu’à Grimari, à 80 km à l’est de Bambari.

Tous les camps, qu’il s’agisse de la Séléka, des anti-balaka ou des Peuls armés (membres de l’ethnie peule, et dont beaucoup appartiennent à un sous-groupe de la Séléka), prennent systématiquement pour cibles les civils qu’ils soupçonnent de soutenir leurs adversaires.

©Amnesty International

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