RCA : La Cour Constitutionnelle pouvait bien sauver la République, si elle avait dit le droit et rien que le droit…,

Madame Danielle Darlan, Présidente de la cour constitutionnelle, le 03 décembre 2020. Photo CNC / C.J. Y apendé
Madame Danielle Darlan, Présidente de la cour constitutionnelle, le 03 décembre 2020. Photo CNC / C.J. Y apendé

 

Bangui, République centrafricaine, dimanche, 24 janvier 2021 ( Corbeaunews-Centrafrique). La Cour Constitutionnelle pouvait bien sauver la République, si elle avait dit le droit et rien que le droit…, mais pour des raisons que la Raison ignore, elle a fait l’option de ne pas entrer dans l’histoire politico-juridico-juridictionnelle du pays

 

En effet, Dame DARLAN et ses Juges Constitutionnels pouvaient nous faire l’économie de la crise de la Coalition des Patriotes pour le Changement-CPC en cours, si, rien que le droit  était dit, et pour ce faire, ils avaient eu plusieurs occasions, en or, (1) le recours formulé par le compatriote BEDOUNGA, Président du MDRC, qui devrait permettre aux Membres de notre Cour Constitutionnelle de faire une interprétation assez extensive des dispositions de la loi en se fondant sur des motivations politiques, (2) l’examen des dossiers de candidature au regard des dispositions de la Constitution de la République, des Accords et Conventions Internationaux, qui devaient leur permettre de déclarer inéligibles à jamais les anciens et actuel Présidents BOZIZE YANGOUVONDA, NDJOTODIA, SAMBA PANZA et TOUADERA, (3) le retrait du candidat BOKASSA Jean Serge, (4) le très faible taux de participation aux votes du 27 décembre 2020 : 655 054 votants effectifs pour 1 856 236 inscrits, soit 35 % de participation, et 318 626 voix obtenues par le Président TOUADERA déclaré ré élu, soit 17 % des électeurs inscrits ; mais ils n’ont pas capitalisé ces occasions qui devraient faire jurisprudence et les élever au haut niveau de respectabilité nationale.

 

Et, pour n’avoir pas dit le droit et rien que le droit, Dame DARLAN et ses Juges constitutionnels ont validé une légitimité à moins de 1/5ème, parce que moins de 20% des électeurs inscrits ont voté le candidat TOUADERA, malgré les bourrages d’urnes, tripatouillages des procès-verbaux et autres… S’il faudrait apprécier les 318 626 voix obtenues au plan territorialité, nous pouvons affirmer sans équivoque que c’était la ville de Bangui qui avait voté pour le candidat TOUADERA. Et par voie de conséquence, n’ayant pas dit le droit et rien que le droit, les Membres de la Cour Constitutionnelle ont contribué, malgré eux, à l’avènement de la crise de la Coalition des Patriotes pour le Changement-CPC, laquelle crise induit actuellement des problématiques que nous évoquerons après constatation partagée des dispositions constitutionnelles et conventionnelles, dont la correcte application ou observation devrait leur conférer le qualificatif de ‘’Sauveurs du Peuple Centrafricain’’:

  1. Des dispositions constitutionnelles et conventionnelles non observées
    • : Constitution du 30 mars 2016

PREAMBULE (partie intégrante de la constitution) :

  • 7ème paragraphe : ‘’ Résolu à construire un Etat de droit fondé sur la démocratie pluraliste, le respect de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs en vue de garantir la sécurité des personnes et des biens, la protection des plus faibles, notamment les personnes vulnérables, des minorités et le plein exercice des libertés et des droits

fondamentaux’’

  • 9ème paragraphe : ‘’S’opposant fermement à la conquête du pouvoir par la force et toute forme de dictature et d’oppression, ainsi qu’à tout acte de division et d’entretien de la haine’’
  • 10ème paragraphe : Conscient que la tolérance, l’inclusion, la concertation et le dialogue constituent le socle de la paix et de l’unité nationale’’
  • 17ème paragraphe : Réaffirme son attachement à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981 et à la Charte Africaine de Démocratie, des Elections et de la Gouvernance du 30 juin 2007’’
  • 18ème paragraphe : ‘’ Réaffirme son adhésion à toutes les Conventions Internationales dûment ratifiées, notamment celles relatives à l’interdiction de toute forme de discrimination à l’égard des femmes, à la protection des droits de l’enfant et celles relatives aux peuples autochtones et tribaux’’

ARTICLES :

Art. 28 : ‘’ L’usurpation de la souveraineté par coup d’Etat, rébellion, mutinerie ou tout autre procédé non démocratique constitue un crime imprescriptible contre le peuple centrafricain. Toute personne ou tout Etat tiers qui accomplit de tels actes aura déclaré la guerre au peuple centrafricain.

Toute personne physique ou morale qui organise des actions de soutien, diffuse ou fait diffuser des déclarations pour soutenir un coup d’Etat, une rébellion ou une tentative de prise de pouvoir par mutinerie ou par tout autre moyen, est considérée comme co-auteur.

Les auteurs, co-auteurs et complices des actes visés aux alinéas 1 et 2 sont interdits d’exercer toute fonction publique dans les Institutions de l’Etat.’’

 

Art.35 : ‘’ Le Président de la République est élu au suffrage universel direct et au scrutin majoritaire à deux (2) tours.’’

 

Art. 36 : ‘’ Ne peuvent être candidats à l’élection présidentielle que les hommes et les femmes remplissant les conditions suivantes :

  • Être de nationalité centrafricaine ;
  • Jouir d’une bonne santé morale et physique ;
  • Être de bonne moralité.

 

Art. 94 : ‘’Les Accords ou Traités régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque Accord ou Traité, de son application par l’autre partie’’

 

1-2:  Loi n° 19 Portant Code Electoral de la République Centrafricaine

Art. 115 : ‘’En cas de décès, d’empêchement définitif ou de retrait de l’un des candidats entre la publication de la liste des candidats et le premier tour, l’organisation de l’élection est entièrement reprise avec une nouvelle liste de candidats, sur décision de la Cour Constitutionnelle, saisie sans délai par l’A N E ou toute partie intéressée’’

 

2: CHARTE AFRICAINE DE LA DEMOCRATIE, DES ELECTIONS ET DE LA GOUVERNANCE

PREAMBULE (partie intégrante de la Charte):

  • 7ème paragraphe : ‘’Soucieux d’enraciner dans le continent une culture d’alternance politique fondée sur la tenue régulière d’élections transparentes, libres et justes, conduites par des organes électoraux nationaux, indépendants, compétents et impartiaux’’

 

3 – PROTOCOLE SUR LA DEMOCRATIE ET LA BONNE GOUVERNANCE DE LA CONFERENCE

INTERNATIONALE SUR LA REGION DES GRANDS LACS

  • 3 : DROIT DE VOTE – ‘’ Les Etats Membres doivent garantir à tout citoyen éligible le droit de voter et d’être élu sans discrimination’’

 

  • 4 : MODIFICATION DE LA LOI ELECTORALE – ‘’ Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement de la majorité des acteurs politiques et sociaux’’

 

  • 7 : INDEPENDANCE DES ORGANES ELECTORAUX : ‘’
    • Les organes chargés des élections doivent être indépendants et neutres. Chaque Etat membre doit organiser une concertation nationale appropriée pour déterminer la nature et la forme desdits organes.
    • Ces organes doivent, dans leur composition, refléter le principe de parité entre les hommes et les femmes ‘’

 

  • 8 : ETAT CIVIL FIABLE ‘’
  • Chaque Etat membre doit s’assurer de l’établissement d’un système d’état civil fiable et stable
  • Les Etats membres s’engagent à coopérer dans ce domaine par des échanges d’expériences et au besoin par une assistance technique ‘’

 

  • 9 : Etablissement des listes électorales :’’ Les organes électoraux doivent établir les listes électorales de manière transparente et crédible. Les parties prenantes peuvent les consulter autant que de besoin’’

 

  • 10 : TRANSPARENCE – ‘’ L’organisation, le déroulement des élections et la proclamation des résultats s’effectueront de manière transparente’’

 

1-5 : PROTOCOLE PORTANT AMENDEMENT AU PROTOCOLE PORTANT STATUT DE LA COUR AFRICAINE DE JUSTICE ET DES DROITS DE L’HOMME OU PROTOCOLE DE MALABO

 

Art ; 28 E : CRIME RELATIF AU CHANGEMENT ANTICONSTITUTIONNEL DE GOUVERNEMENT

1- ‘’Aux fins du présent Statut, ‘’changement anti constitutionnel de gouvernement’’ signifie le fait de commettre ou d’ordonner de commettre les actes suivants, avec intention d’accéder ou de se maintenir au pouvoir :                ……..

f)- toute modification substantielle des lois électorales durant les six (6) mois précédant les                élections sans le consentement de la majorité des acteurs politiques’’

 

  1. Des Problématiques induites par le fait de n’avoir pas dit le droit et rien que le droit

Si Dame DARLAN et ses Juges Constitutionnels avaient dit le droit et rien que le droit, au regard des dispositions légales sus-évoquées, les anciens et actuel Présidents de la République, BOZIZE YANGOUVONDA, NDJOTODIA, SAMBA PANZA et TOUADERA, ne pourraient pas ou ne pouvaient plus prétendre être candidats à une quelconque élection en Centrafrique. Ces quatre anciens et actuel Président de la République, une fois déclarés inéligibles, la Cour Constitutionnelle aurait énormément contribué à solutionner de nombreux problèmes politico-politiques et centrafricano-centrafricains. Mais hélas, n’ayant pas dit le droit et rien que le droit, Dame DARLAN et ses Juges Constitutionnels ont facilité l’émergence de problématiques, ci-après, qui ne pourront être résolues, que si nous Centrafricains faisions preuve de résilience pour une introspection commune et une réconciliation intra centrafricaine préalables :

  • Une légitimité politique incongrue ou étriquée : les militants et sympathisant du Mouvement des Cœurs Unis-MCU argueront que le Président TOUADERA a une légitimité partielle conférée par 318 656 Centrafricains, soit 17 % des Centrafricains inscrits. Et les 83 % des Centrafricains qui n’ont pas voté le Président TOUADERA ne se reconnaitront pas en lui et se feront de fervents opposants politiques ;
  • Un état de siège de fait par la CPC qui encercle la ville de Bangui, prenant à la fois en otages les Autorités Politiques et la population de la ville de Bangui ;
  • Un état d’urgence décrété par le Président TOUADERA le jeudi 21 janvier 2021 sur toute l’étendue du territoire national, alors que son pouvoir ne contrôle que les 89 km² de la ville de Bangui, soit 0,016 % du territoire, un non-sens politique et sécuritaire ;
  • La cristallisation des déchirures sociales et les clivages communautaires exacerbés depuis 2012-2013 qui rendent aléatoire la symbiose nationale, sans une réconciliation nationale, préalable ;
  • La désacralisation de la Cour Constitutionnelle et de l’ANE, d’où parjures, discrédits, déshonneur pour les Membres de ces deux Institutions de la République, qui sont pourtant d’éminents Cadres dont le pays en aura encore besoin ;
  • Les grognes sociales et les frondes socio-politiques permanentes, les désobéissances civiles multiformes ;
  • Les compensations-récompenses aux mercenaires importés, dont nombreux ont trouvé la mort, et la problématique de leurs rapatriements;
  • Les nombreux supplétifs étrangers importés pour faciliter la ré élection du candidat TOUADERA, à qui de faux jugements d’actes supplétifs de naissance ont été remis, ce qui constituera un autre complexe problème au plan nationalité;
  • Les conséquences politiques, diplomatiques et juridiques des mercenaires importés ;
  • Les relations diplomatiques et économiques avec les pays voisins dont certains opposants aux régimes politiques de ces pays ont intégré le mercenariat ;
  • La restauration de l’Autorité de l’Etat et la problématique de compensations ou réparations à l’endroit des victimes co-latérales, innocentes et ayants-droits centrafricains ;
  • La fin du FCFA et les accords d’indépendance de 1960 de plus en plus décriés par les Centrafricains, qui sont pendants et impacteront la reformulation des relations diplomatiques entre la France et Centrafrique ;
  • La reconstruction du pays, et tant d’autres problématiques qui seront encore induites, le temps que durera cette crise CPC.

 

Il n’y a pas et il n’y aura pas de miracle à opérer. Le réalisme et le pragmatisme politiques s’imposent et vont s’imposer. Et la seule et possible alternative demeure la concertation citoyenne, peur bleue des Autorités Politiques de Bangui depuis deux (2) ans. Au Président TOUADERA et à l’ancien Président BOZIZE YANGOUVONDA de se transcender et faire la paix des braves pour mettre fin aux supplices du Peuple Centrafricain.

 

Sincères considérations

 

WAFIO Jean Serge

                                                                                                                Président du PDCA