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La santé en RCA : un système en ruine, une population en détresse

La santé en RCA : un système en ruine, une population en détresse

 

Dr. Pierre Somsé, ministre de la santé et de la population lors de son point de presse à Bangui le 7 avril 2024 à Bangui.
Dr. Pierre Somsé, ministre de la santé et de la population

 

Bangui, CNC. Le dernier magazine santé diffusé sur la radio Ndékè Luka la semaine dernière dresse un tableau effarant de la situation sanitaire en République centrafricaine. Entre un système de santé délabré et des autorités incompétentes, la population centrafricaine se trouve littéralement abandonnée à son sort.

 

La santé en RCA : l’hôpital de la honte à Kaga-Bandoro.

 

À Kaga-Bandoro, 385 km au nord de Bangui, l’hôpital local ressemble davantage à un mouroir qu’à un établissement de santé. Le Dr Jerry Martial Mouté, chef du district sanitaire, avoue sans sourciller que seuls “6 à 8 cas de hernie par semaine” peuvent être traités. Une goutte d’eau dans l’océan des besoins. Les patients, livrés à eux-mêmes, agonisent dans des couloirs insalubres, attendant une prise en charge qui ne vient jamais.

 

Paul, un patient récemment opéré, témoigne : “J’ai souffert durant trois jours. J’avais une douleur intense au ventre.” Un calvaire qui aurait pu être évité avec une prise en charge rapide. Mais dans ce pays où la santé n’est qu’un vœu pieux, chaque jour est une lutte pour la survie.

 

La santé en RCA : un personnel médical au bord du gouffre.

 

L’infirmier anesthésiste Dieudonné Ladum, visiblement dépassé, lâche : “Quand on parle de hernie étranglée, c’est des urgences. On les prête rapidement”. Cette phrase trahit l’ampleur du désastre. Les soignants, en sous-effectif chronique, jouent les équilibristes entre urgences vitales et moyens dérisoires.

 

Le manque de formation est criant. Les gestes les plus basiques deviennent des défis insurmontables. Comment parler de qualité des soins quand le personnel peine à maîtriser les protocoles élémentaires ? C’est un miracle que des vies soient encore sauvées dans ces conditions.

 

Des autorités sanitaires aux abonnés absents.

 

Pendant ce temps, que font les autorités ? Le ministre de la Santé, Dr Pierre Somsé , se contente de vagues appels à la vigilance. Aucune mesure concrète n’est proposée pour endiguer la catastrophe sanitaire qui se profile. Son intervention sur le Monkeypox est symptomatique de cette politique de l’autruche : “Notre pays va faire partie des premiers contingents de pays qui recevra le vaccin contre le M-Pox.” Une annonce creuse, sans calendrier ni plan de déploiement.

 

Cette inaction coupable laisse le champ libre aux épidémies. Le choléra, la rougeole, la poliomyélite… autant de fléaux qui menacent une population déjà exsangue. Mais à Bangui, on préfère se gargariser de promesses plutôt que d’agir.

 

L’alimentation, parent pauvre de la santé publique.

 

Le Dr Barry Siolo, invité de l’émission, tente d’aborder la question cruciale de l’alimentation. Mais ses conseils semblent sortir d’un autre monde. “Mangez tout, vous avez tout”, affirme-t-il. Une phrase qui sonne comme une cruelle ironie dans un pays où 63% de la population vit sous le seuil de pauvreté absolue.

 

Comment parler d’alimentation équilibrée quand la majorité des Centrafricains luttent pour avoir même un repas par jour ? Le docteur évoque les bienfaits des fruits et légumes, oubliant que ces denrées sont un luxe inaccessible pour beaucoup. Son discours déconnecté des réalités du terrain illustre le fossé entre les élites médicales et la population.

 

Un système de santé en état de mort cérébrale.

 

La vérité, c’est que le système de santé centrafricain est cliniquement mort. Les hôpitaux, quand ils existent encore, sont des coquilles vides. Le matériel médical, obsolète ou inexistant, met en danger la vie des patients. Les médicaments ? Un mirage pour la plupart des malades, contraints de se tourner vers des remèdes traditionnels aux effets incertains.

 

La formation du personnel médical est une farce. Les écoles de médecine, sous-financées, produisent des diplômés mal préparés aux défis qui les attendent. Comment s’étonner ensuite des erreurs médicales à répétition qui émaillent le quotidien des structures de santé ?

 

La corruption gangrène le peu qui reste. Les postes sont attribués au favoritisme plutôt qu’au mérite. Les fonds, déjà insuffisants, sont détournés au profit de quelques-uns. Pendant ce temps, les patients meurent faute de soins basiques.

 

Un avenir sanitaire en péril.

 

Si rien n’est fait, la RCA court à la catastrophe sanitaire. Les indicateurs sont déjà alarmants : mortalité infantile parmi les plus élevées au monde, espérance de vie en berne, résurgence de maladies pourtant évitables… Le pays semble revenir des décennies en arrière en matière de santé publique.

 

L’aide internationale, quand elle arrive, est une goutte d’eau dans un océan de besoins. Les ONG, débordées, ne peuvent pallier les carences d’un État défaillant. Il est urgent que les autorités centrafricaines prennent enfin leurs responsabilités.

 

Des solutions existent, mais nécessitent une volonté politique forte. Réinvestir massivement dans les infrastructures de santé, former et recruter du personnel qualifié, lutter sans merci contre la corruption… Autant de chantiers titanesques, mais vitaux pour l’avenir du pays.

 

La santé n’est pas un luxe, c’est un droit fondamental. Il est temps que les Centrafricains l’exigent haut et fort. Sans un sursaut national, c’est tout l’avenir d’une nation qui est compromis. La RCA mérite mieux que ce système de santé moribond. Il est grand temps d’agir, avant qu’il ne soit trop tard.

 

Par Alain Nzilo

Corbeaunews Centrafrique

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