Centrafrique : une enquête internationale indépendante est nécessaire sur l’assassinat des journalistes russes, selon RSF

Publié le 3 août 2019 , 5:10
Mis à jour le: 3 août 2019 5:10 am
Des militaires russes dans un pickup de la gendarmerie à Bangui, République centrafricaine
Des mercenaires russes dans un pickup de patrouille de la gendarmerie au centrwe-ville de Bangui. Crédit photo : AFP

 

 

Bangui (CNC) – Un an jour pour jour après l’assassinat des trois (3) journalistes russes en Centrafrique, l’ONG Reporters sans frontières (RSF), qui défend la liberté de la presse à travers le monde, a réitéré sur son compte Twitter un appel pour qu’une enquête internationale indépendante soit ouverte sur ce dossier sensible. t pour cause.

 

Rappelons nous, le 30 juillet 2018, trois journalistes d’investigation russes étaient assassinés, dans la région de Sibut par des personnes armées non identifiées. Les reporters enquêtaient alors sur les agissements discrets de la mystérieuse société Wagner, une entreprise russe de mercenariat, déployée en Ukraine, en Syrie, en Libye et dans tous les pays où le Kremlin entend défendre ses intérêts sans nécessairement afficher sa présence de manière officielle.

Face cette tuerie, les autorités russes ont parlé d’un crime crapuleux qui aurait mal tourné, en pointant du doigt les négligences de l’employeur des trois journalistes, qui n’est autre que Mikhail Khodorkovski, un opposant politique russe vivant en exil à Londres. Cette thèse présente l’avantage de dédouaner la nébuleuse de la Wagner de toute responsabilité, mais elle peine à convaincre.

Les proches des victimes en sont convaincus : les trois journalistes ont été attirés dans un guet-apens parce que leur travail sur la Wagner dérangeait des responsables hauts placés. Le Dossier Center, le centre de journalisme d’investigation de M. Khodorkovski, a mené sa propre enquête dont les résultats ont été rendus publics en janvier dernier. Celle-ci révèle l’existence de liens avec la Russie qui n’avaient pas été pris en compte jusque là. En particulier, un gendarme centrafricain a été en contact permanent avec le conducteur des trois victimes ainsi qu’avec le mercenaire russe Alexandre Sotov. De même, l’homme qui a servi d’intermédiaire aux journalistes leur a été recommandé par un journaliste russe. Or cet intermédiaire n’a été ni identifié ni arrêté. Et comme le conducteur des reporters, il a utilisé un numéro de téléphone enregistré sous un faux nom et avec de faux passeports. Autant d’éléments qui indiquent que les assassins étaient bien plus organisés que de simples coupeurs de routes.

Relayée dans la presse russe, cette enquête documentée du Dossier Center a amené Reporters sans frontières à demander l’ouverture d’une enquête internationale indépendante sur ces faits dès le mois de janvier dernier via un communiqué mis en ligne sur son site Internet.

Ces dernières semaines, le ministre russe des affaires étrangères a profité du forum économique international qui s’est tenu à Saint-Pétersbourg le 6 juin, pour demander à son homologue centrafricain d’accélérer l’enquête sur ce triple meurtre. Le même jour, un média numérique russe sous la houlette d’Evgueni Prigojine livrait une nouvelle version des faits qui, elle aussi, fait l’impasse sur le rôle de la Wagner et qui s’efforce de rechercher coûte que coûte un nouveau bouc émissaire. Quand on sait qu’Evguéni Prigojine, oligarque russe proche du pouvoir moscovite, finance et supervise aussi les activités de la Wagner, on comprend que son agence médiatique serve à la défense d’intérêts partisans quelle que soit la vérité.

Rappelons également que M. Prigojine est présenté comme un expert de la manipulation des informations sur Internet, s’étant fait connaître pour avoir tenter de manipuler les élections présidentielles américaines de 2016 avec ses usines à trolls.

Plus récemment, le 26 juillet, le parquet général de la cour d’appel de Bangui a annoncé que « l’enquête a évalué d’une manière significative » et « que dans les jours à venir le Doyen des Juges d’instruction rendra ses conclusions en tout indépendance ». Toutefois, peut on vraiment espérer voir les véritables coupables désignés au regard du contexte diplomatique si particulier de cette affaire ? Et surtout qui croire ? Peut-on faire confiance à la justice centrafricaine qui tarde à sortir ses conclusions sur cette affaire après plus d’un an d’enquête ? La partie russe n’a-t-elle pas intérêt à brouiller les pistes ?

Dès lors, la vérité sur cette affaire semble mal embarquée et l’enquête internationale indépendante voulue par RSF n’est-elle pas la meilleure voie pour voir émerger la vérité ?

 

 

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