Centrafrique : la loi sur la cryptomonnaie peu après sa promulgation, est contestée

Publié le 27 avril 2022 , 8:10
Mis à jour le: 27 avril 2022 4:19 pm

 

Rédigé par Gisèle MOLOMA

Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le vendredi 29 avril 2022

 

Bangui (CNC) -– ça y est et c’est fait. La Centrafrique, pays le plus pauvre au monde et enclavé sur tout le plan, devient le deuxième pays au monde, après le Salvador, a adopté le Bitcoin, comme une nouvelle monnaie. En Afrique, elle est le premier pays à l’adopté aux côtés de F CFA. La loi sur la cryptomonnaie, adoptée par acclamation par les députés le jeudi 21 avril dernier, est précipitamment promulguée par le président Touadera.

Simplice Mathieu SARANDJI
Le Président de l’assemblée nationale, l’honorable Simplice Mathieu SARANDJI. Photo gouvernement

 

La loi la plus courte dans l’histoire du pays

 

Rédigée par des Camerounais initiateurs et soumis au vote par acclamation des députés dans une extrême rapidité sans précédente, sans consultation et sans amendement, la loi Sarandji sur la cryptomonnaie est la première loi la plus courte dans l’histoire du pays.

Pour les ministres et agents et défenseurs du projet de loi devant les élus de la nation, cette loi a pour objectif, au-delà de la création d’un cadre légal à la cryptomonnaie, la mise en place d’un environnement favorable du secteur financier. L’envoi et la réception d’argent avec la République centrafricaine deviennent « très difficiles », a argumenté l’un des deux ministres défenseurs.

Justin Gourna Zacko : « Avec la cryptomonnaie, il n’y a plus de contrôle de la Banque Centrale. Vous avez votre argent, vous envoyez à un investisseur pour une entreprise, vous la recevez dans n’importe quelle monnaie, vous pouvez disposer avec elle en Dollar, en Euro, en CFA, ou en Naira ».

 

Une loi très dangereuse pour l’économie centrafricaine

 

Si l’on en croit à la position du Fonds Monétaire International, FMI, qui avait qualifié et dénoncé comme une décision dangereuse pour la « stabilité financière, l’intégrité financière et la protection des consommateurs » lorsque le Salvador avait adopté, le 7 septembre 2021, le bitcoin, comme monnaie légale dans le pays, la Centrafrique va traverser ainsi dans les jours à venir, des moments très sombres de son histoire.

 

L’opposition démocratique alerte

 

Dans un rapport porté à l’attention du président de la Commission mixte sur le Projet de Loi régissant la Cryptomonnaie, trois élus de l’opposition démocratique, Anicet Georges Dologuélé, Martin Ziguelé et Rachel Ngakola, la jeunesse de cette monnaie et le fait qu’elle ne bénéficie ni d’un cours légal, ni de la garantie d’une banque centrale, ni d’une couverture par un fonds de garantie de dépôts ni d’une règlementation formelle, l’exposent aux risques ci-après. Peut-on lire dans le rapport. Et c’est une monnaie extrêmement instable et volatile : son prix peut atteindre des sommets, mais peut également plonger du jour au lendemain. L’investisseur court un risque réel de perte en capital de tout ou partie de son capital, du fait d’une forte spéculation ; il court également des risques importants de fraude et d’escroquerie, dus à l’existence sur le marché d’un nombre important de courtiers peu scrupuleux. Ont fait observer ces trois élus. Cette volatilité figure pourtant bien dans l’article 5 de la loi.

 

Les réactions se multiplient

 

Peu après la publication de cette loi, les réactions des Centrafricains sur les réseaux sociaux ne se font pas attendre.

« On ne développe un pays avec des illusions, surtout pour un pays comme le nôtre avec une économie réelle insignifiante et qui prétend se développer avec des illusions.

« La démarche du pouvoir en place trahit sa fébrilité et sa fragilité structurelle. Tout ce que des marchands d’illusion leur vendent est pris pour de l’argent comptant. Mais ceux qui tirent les ficelles dans l’ombre savent exactement ce qu’ils veulent faire : avoir une place financière sous lois. »

« Combien des Centrafricains pourront investir là-dessus sans être formés pour ça ? »

Pour Charles Armel Doubane, ancien ministre des Affaires étrangères, « le 2e État le plus pauvre au monde, la dernière économie de la zone XAF et de la CEMAC réalise la plus belle et grande prouesse de son histoire, l’adoption du Bitcoin comme monnaie officielle. Ainsi, la République centrafricaine a, en pleine conscience de toutes les conséquences à venir et en toute connaissance de cause, décidé un véritable saut dans……..l’inconnu », avant de souhaiter bonne chance et demander à Dieu de sauver ce pays et son peuple.

Ces différentes prises de position sonnent comme une malédiction sur le président Touadera lui poussant à ordonner à son Directeur de cabinet de réagir en son nom.

 

La présidence se réjouit.

 

Dans un communiqué de presse signé le 26 avril 2022 par le ministre d’État, Directeur de Cabinet de la Présidence de la république, le président Touadera dit vouloir prendre note avec satisfaction et enthousiasme de la décision unanime de l’Assemblée nationale relative au projet de loi qui établit le cadre légal qui régit la cryptomonnaie et instaure le Bitcoin en tant que monnaie officielle en République centrafricaine. Peut-on lire dans le communiqué enthousiastique, dicté par le président Touadera.

Pour le président Touadera, l’adoption du Bitcoin en tant que monnaie officielle représente un plan décisif vers l’ouverture des nouvelles opportunités pour son pays : « Bangui ».

 

Une loi est personnalisée, taillée sur mesure et sévère anticonstitutionnelle

 

A en croire aux écritures de l’article 2 de ladite Loi, la Loi Sarandji sur la cryptomonnaie ne concerne que les personnes physiques ou morales du droit privé ou droit privé et qui exercent des activités bien énumérées.

Art.2 : la présente Loi s’applique aux personnes physiques ou morales de droit public ou privé : qui assure des activités de commerce en ligne liées aux cryptomonnaies ; dont l’activité est d’offrir un accès à des services de cryptomonnaies au public, par le biais des technologies de l’information et de Communication ; qui offrent des services par voie de technologie BLOKHAIN qui donne lieu à la conclusion de smart-contrat pour se procurer en bien ou prestations de service.

D’après un avocat d’affaires contacté par la Rédaction, en lisant cette loi, elle est taillée sur mesure afin de garantir l’installation de l’entreprise du sulfureux Émile Parfait Simb, soi-disant, spécialiste de cryptomonnaie et pour lui protéger dans ses activités criminelles de blanchiment d’argent sale.

Côté sévérité, cette loi impose le Bitcoin comme deuxième monnaie désormais officielle alors que la Constitution, quant à elle, ne parle que d’une seule monnaie. Elle ne donne aucune possibilité aux juges de choisir l’année de prison qu’ils doivent décider en son âme et conscience. Tout agent économique est tenu d‘accepter les cryptomonnaies comme forme de paiement lorsqu‘elles sont proposées pour l’achat ou la vente d’un bien ou d‘un service. Et tous les contrevenants aux dispositions de cette loi seront possibles d’une peine de prison ferme de 20 ans, assortie d’une amande comprise entre 100 000 000 à 1 000 000 000 de F CFA.

Au finshi, d’après nos informations, la BEAC qui garantit les monnaies dans la zone de F CFA en Afrique centrale, a déjà réagi négativement à l’application de la cette loi. Tout comme la COBAC, Commission Bancaire de l’Afrique Centrale.

 

Corbeaunews Centrafrique

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