Centrafrique : JUSTICE en RCA, LE JUSTICIER EST-IL DEVENU LE BOURREAU DU JUSTICIABLE ?

Publié le 29 avril 2017 , 7:52
Mis à jour le: 29 avril 2017 7:52 pm

Centrafrique : JUSTICE en RCA,  LE JUSTICIER EST-IL DEVENU LE BOURREAU DU JUSTICIABLE ?                                                                                                                       

 

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Bangui, le 30 avril 2017.

Par : Bernard Selemby-Doudou.

 

La magistrature centrafricaine est une branche de métier noble, organisée et hiérarchisée. Elle détient à elle seule le monopole de la noble mission de rendre la justice au nom du peuple. La justice étant le fondement de toute démocratie et aussi un outil de l’harmonisation de la vie en société. Depuis fort longtemps, le peuple au nom duquel la justice est rendue se plaint et redoute les comportements, exactions, malversations, manipulations voire la corruption de ceux qui ont prêté serment de dire le droit, de rendre la justice et de redresser les torts. Ainsi le citoyen lambda se pose sans cesse les questions suivantes : le justicier est-il devenu le bourreau du justiciable ? Peut-on parler de respect de l’éthique et de la déontologie dan la justice centrafricaine ?

Comment expliquer que le sort de certains dossiers en instance est traité et scellé en dehors des tribunaux ? Une affaire pendante qui a fait le tour des réseaux sociaux mettant à nue les dysfonctionnements de cette structure nous amène à nous intéresser à ce secteur d’activité. Il s’agit de l’affaire Christ BANGASSOU contre Banque Populaire Maroco-Centrafricaine (BPMC). Dans cette affaire, le Defunt père François BANGASSOU avait contracté un crédit à la consommation à la BPMC pour deux millions de francs CFA en hypothéquant sa maison. Le dit prêt n’étant pas encore soldé que l’emprunteur mourut en exile à Lomé au Togo. Ayant constaté la défaillance dans l’exécution du contrat, la maison hypothéquée fut systématiquement et sans autre forme de démarche vendue pour cinq millions à une tierce personne par la BPM. Ainsi commença une interminable bataille judiciaire entre les héritiers légaux du decujus et l’acquéreur de la maison sur fond de rebondissements épisodiques étonnants. Ce cas pratique digne d’un thème de travaux dirigés des étudiants en droit suscite des indignations et interroge : la BPMC avait-elle connaissance que l’emprunteur est hors du territoire national et de surcroît mort avant de vendre la maison ?

Sachant que la seule absence ne justifie pas la défaillance, la banque s’est-elle rapprochée des héritiers ou de la famille avant de procéder à la vente du bien ? La maison avait-elle fait l’objet d’une évaluation par un expert ? La mise à prix aussi ? Les cinq millions représentaient-elles la valeur marchande de la maison ? Entre le prêt et la vente de la maison, la différence a fait l’objet d’un versement à la famille ? Est-ce logique que pour un prêt minable, une famille perd un patrimoine inestimable de plus de cinq cents hectares de terre ? Comment expliquer le fait q’une procédure suivait son cours que parallèlement la banque conclût un accord de versements avec les héritiers de l’emprunteur ? La logique aimerait qu’à la constatation de la défaillance, la banque se rapproche des co-emprunteurs ( s’il y en a ), des héritiers ou de la famille via des relances avant de mettre à exécution son droit d’hypothèque.

De nombreuses vices de procédure et de zones d’ombre gravitent autour de ce dossier et cela nous ouvre la voie de faire le procès de la justice centrafricaine. Il faut noter que le vrai désordre dans une société, c’est le manque de justice. Force est de constater que les animateurs de cette justice utilisent ce privilège comme un patrimoine familial pour régler de sales besognes. La magistrature en général n’est pas mise en cause mais quelques brebis galeuses se sont invitées dans ce corps de noblesse pour hypothéquer leur image. Il est vrai que la justice manque cruellement de moyens matériels, financiers et humains pour mener à bien sa mission. Ce phénomène est à l’origine de la lenteur, retard avec des conséquences immédiates sur l’augmentation des détenus en instance de jugement. Il faut aussi relevé que la magistrature est rattrapée par la corruption, la partialité, la malversation, le laxisme imputant ainsi la confiance du peuple. La magistrature est ainsi devenue une des administrations les plus corrompues alors qu’ils ont un traitement salarial privilégié par rapport à la grille indiciaire générale. Notre justice est malade et doit être mise en soins intensifs. Il est temps que les choses reviennent à l’état initial en modifiant les comportements par des réformes et des cycles de formation pour les adapter à l’évolution de la société ( cybercriminalité, économie numérique etc…).

Cette analyse est loin d’un réquisitoire contre la magistrature centrafricaine mais plutôt une inquiétude, un ressenti sociétal. Pour ce faire, nous invitons le President de la République qui de droit est le President du conseil supérieur de la magistrature, garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire sans ignoré le garde des sceaux de prendre leur responsabilité pour faire cesser ce dysfonctionnement. La confiance aux institutions, la réconciliation, la sécurité et la paix n’ont d’autre dénominateur que la justice…alors pensez-y. Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 29 avril 2017

Bernard SELEMBY DOUDOU

Juriste, Administrateur des Elections.                                                                              Tel : 0666830062

 

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