À l’hôpital communautaire de Bangui, un système de soins en plein chaos

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À l’hôpital communautaire de Bangui, un système de soins en plein chaos

 

À l'hôpital communautaire de Bangui, un système de soins en plein chaos
hôpital communautaire de Bangui, sur l’avenue des martyrs. CopyrightCNC

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 À l’hôpital communautaire de Bangui, situé sur l’avenue des Martyrs, les malades et leurs familles subissent quotidiennement les conséquences d’un système de santé défaillant. Une enquête de trois jours menée par la rédaction de Corbeau News Centrafrique révèle des dysfonctionnements majeurs, malgré les récentes mises en garde du ministre de la Santé publique et de la Population, le Dr Pierre Somsé.

 

Trafic de médicaments institutionnalisé à l’hôpital communautaire de Bangui

 

La vente parallèle de médicaments s’est transformée en un véritable réseau organisé au sein de l’hôpital communautaire de Bangui. Notre équipe a observé des soignants qui sortent systématiquement des médicaments de leurs poches pour les proposer aux patients. Les prix pratiqués dépassent largement ceux des pharmacies de l’hôpital. Un exemple, une plaquette de paracétamol vendue 300 FCFA à la pharmacie de l’hôpital atteint 1500 FCFA dans ce circuit parallèle. Des antibiotiques comme l’amoxicilline voient leur prix multiplié par quatre.

 

“Quand j’ai amené mon enfant malade, on m’a dit que la pharmacie était en rupture de stock pour les antibiotiques. Dix minutes plus tard, une infirmière m’a proposé les mêmes médicaments à un prix exorbitant”, raconte Marianne, mère d’un patient de 5 ans.

 

Un ancien employé de la pharmacie hospitalière, sous couvert d’anonymat, dévoile les mécanismes de ce trafic : “Certains membres du personnel détournent une partie des stocks pour les revendre ensuite. Les médicaments disparaissent mystérieusement des armoires de la pharmacie pour réapparaître dans les poches des soignants“.

 

Services désorganisés à l’hôpital communautaire de Bangui

 

L’absence totale d’organisation des services médicaux transforme chaque consultation en parcours du combattant à l’hôpital communautaire de Bangui. Les patients attendent des heures, parfois des jours, sans savoir quand ils seront pris en charge.

 

Au service des urgences, le chaos règne. “J’ai attendu cinq heures avec mon mari qui souffrait d’une crise d’appendicite avant qu’un médecin daigne l’examiner”, témoigne Marie-Claire.

 

Dans les services d’hospitalisation, aucun planning de visite n’est affiché ou respecté. Les patients ne savent jamais à quelle heure le médecin passera. “Le docteur peut arriver à 8h comme à 14h, ou ne pas venir du tout”, explique un agent d’entretien qui côtoie quotidiennement cette désorganisation.

 

Examens sans suite

 

Le service des examens médicaux fonctionne de manière totalement anarchique. “J’ai fait une radio il y a dix jours, mais je n’ai toujours pas l’interprétation car le docteur est toujours absent”, déplore Paul, patient en attente de diagnostic.

 

Les résultats d’analyses s’accumulent sans être lus ni interprétés. Un policier témoigne : “Voilà deux semaines que je cherche un médecin pour lire mes résultats d’analyse. Personne ne peut me dire quand il sera disponible“.

 

Permanence des soins inexistante à l’hôpital communautaire de Bangui

 

La nuit, l’hôpital communautaire de Bangui  se transforme en désert médical. Les équipes de garde, théoriquement obligatoires, sont souvent absentes ou réduites au minimum. “La semaine dernière, mon frère a fait une crise. Nous n’avons trouvé qu’un infirmier stagiaire, incapable de gérer l’urgence”, raconte Jean-Baptiste.

 

Les patients hospitalisés se retrouvent livrés à eux-mêmes pendant la nuit. “Si une complication survient, il faut espérer tenir jusqu’au matin”, confie amèrement un garde-malade.

 

Relations tendues avec les familles

 

Le comportement du personnel de l’hôpital communautaire de Bangui  envers les accompagnants des malades génère des tensions quotidiennes. Les écarts de langage sont fréquents : “Quand je demande des informations sur l’état de ma mère, on me répond avec agressivité ou on m’ignore”, témoigne Sylvie N.

 

Les familles, pourtant essentielles dans le système de santé centrafricain où elles assurent une grande partie des soins de base, subissent un mépris constant. “On nous traite comme des gêneurs alors que nous sommes indispensables pour nourrir et laver nos malades“, explique un groupe d’accompagnants.

 

Hygiène et maintenance négligées

 

L’état des locaux reflète l’abandon général. Les couloirs sales, les sanitaires hors service et le matériel défectueux créent un environnement propice aux infections nosocomiales.

 

“Les femmes de ménage font ce qu’elles peuvent, mais elles manquent de produits et de matériel”, observe un brancardier. Les déchets médicaux s’accumulent parfois dans des coins, créant des risques sanitaires majeurs.

 

Initiatives de réforme au point mort

 

Les tentatives de réforme semblent systématiquement vouées à l’échec. La récente déclaration du ministre de la Santé sur le déploiement d’enquêteurs n’a produit aucun effet visible à l’hôpital communautaire de Bangui. “Les pratiques sont tellement ancrées que seules des sanctions pénales pourraient changer les choses”, estime un cadre administratif.

 

L’hôpital communautaire de Bangui, qui devrait être une référence sanitaire dans la capitale, continue de dysfonctionner sous les yeux des autorités. Cette situation dramatique traduit l’urgence d’une réforme profonde du système de santé centrafricain.

 

Notre rédaction poursuivra son enquête sur ce dossier qui engage directement la santé publique des Centrafricains.

 

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