CENTRAFRIQUE : LE CLIMAT DE MÉFIANCE, DE SUSPICION ET DE PROVOCATION POLITIQUE CONTRIBUE T-IL À L’ORGANISATION D’UNE ÉLECTION APAISÉE ? 

Publié le 25 juillet 2020 , 12:26
Mis à jour le: 25 juillet 2020 12:26 am
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l'auteur de l'article. Photo de courtoisie.
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l’auteur de l’article. Photo de courtoisie.

 

Bangui, République centrafricaine, 25 juillet 2020 (Corbeaunews-Centrafrique). Depuis le retour à l’ordre constitutionnel amorcé par la prestation de serment du président de la république le 16 mars 2016, la scène politique centrafricaine est restée très mouvante car les citoyens de tous bords gardent encore en tête le traumatisme des exactions commises par les différents groupes armés non conventionnels qui ont pris le pouvoir par effraction en 2013. Ce serment d’assurer la sécurité du peuple et de défendre l’intégrité territoriale corollaire de notre fierté et de notre souveraineté nationale n’a pas tenu ses promesses.

 

La recherche isolée et aveugle de la paix sans l’aval du peuple a abouti à l’hypothétique accord de Khartoum qui n’a créé que des problèmes au lieu d’en résoudre. En outre, il est important de souligner que depuis le retour inattendu du général déserteur la physionomie de l’arène politique à radicalement changé condensant au passage des tensions électrostatiques dans l’espace. Faisant l’économie de la balance comptable déficitaire du quinquennat, le pouvoir de Bangui entretient un climat de méfiance, suspicion génératrice de tensions voire de provocation à la veille des élections groupées du 27 décembre 2020.

L’opposition démocratique, ignorée de la gestion de la chose publique et du processus électoral est souvent accusée de complot, d’incitation à la haine, de coup d’état ou de tentative de déstabilisation du pouvoir. Inversement et à l’instar de graves manquements dans l’enrôlement des électeurs, les principaux leaders de l’opposition accusent le pouvoir de fraudes émaillant les différentes étapes du processus électoral. Pire, il existerait une liste calquée sur le modèle du fichier « S » à la française à l’aéroport international de Bangui pour inquiéter les membres de la diaspora qui se permettraient de contredire la vision politique du président de la république.

Inquiet et incertain de l’issue des prochaines échéances électorales, le citoyen lambda s’interroge :

Pourquoi le pouvoir de Bangui entretient-il un climat de méfiance, de suspicion, de peur, d’intimidation et de provocations à l’orée du scrutin de tous les dangers ? Faisant fi des leçons du passé, à qui profite ce crime planifié ? Conscient que les élections n’auront pas lieu à bonnes dates, pourquoi le président de la république ne convoque t-il pas la concertation nationale proposée par la Cour constitutionnelle afin de définir collectivement une issue apaisée ?

S’agissant de l’existence du fameux fichier « S », un citoyen qui marque son désaccord avec un régime qui pactise avec les bourreaux du peuple est-il systématiquement passible d’un délit pénal  au regard des textes en vigueur ? Cette mise en scène avec des acteurs amateurs relève t-elle de l’intimidation ou d’un signal envoyé aux activistes des réseaux sociaux ?

A vouloir faire cavalier seul, le peuple frustré par des inégalités sociales s’est senti désabusé et ne se voit pas concerné par les inscriptions sur les listes électorales car les résultats des élections sont toujours ailleurs que dans les urnes à l’instar des précédentes élections.

En conséquence de ce qui précède, le taux d’absentéisme à l’enrôlement risque d’être très élevé avec des répercussions sur la légitimité et la représentativité du nouveau élu. Pour finir, devant l’essoufflement de notre pessimisme dû au retard visible et chronique du chronogramme électoral, nous invitons humblement le président de la république à aplanir les tensions latentes. L’élection étant le baromètre de la démocratie, vouloir la bâcler ou la brader comme en 2016 nous plongerait dans une série noire qui remettra sensiblement en cause nos acquis démocratiques ainsi que les efforts tous azimuts de la communauté internationale.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 24 juillet 2020.

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