Centrafrique: CAE : Après avoir réquisitionné et commis d’office trois avocats

Publié le 26 juillet 2015 , 5:46
Mis à jour le: 26 juillet 2015 5:46 pm

( Corbeau News Centrafrique)

diouf

CAE : Après avoir réquisitionné et commis d’office trois avocats

 

Bangui, (P.N),27-07-2015

 

La « petite » défense d’Habré plaidera-t-elle dans le vent ?

Si le procès de l’ancien président tchadien Hissène Habré est qualifié d’historique, force est en tout cas de reconnaître le décor de rarissime. Car c’est la première dans l’histoire d’une Cour d’assises au Sénégal, fut-elle une Cour africaine, qu’un accusé refuse de comparaitre. Pire, l’accusé, à savoir Hissène Habré, a entrainé dans sa logique tous ses avocats. Il s’agit d’une situation inédite, mais admise sous certaines conditions par le Code de procédure pénale. Parce que, dans de pareils cas, ce Code donne au président de la Cour le pouvoir d’ordonner la comparution de l’accusé, au besoin par la force. « Si l’accusé refuse de comparaître, sommation lui est faite au nom de la loi » afin qu’il comparaisse. Un huissier doit rendre compte sur procès verbal de la sommation et de la réponse de l’accusé. « Si l’accusé n’obtempère pas à la sommation, le président peut ordonner qu’il soit amené par la force devant la Cour » nous explique un avocat sénégalais ayant suivi l’ouverture du procès d’Habré. Dans l’hypothèse où l’accusé serait obligé de comparaître et où il troublerait les débats de la Cour comme ce fut le cas d’avant-hier, le président ordonne son expulsion de la salle d’audience. Dans ce cas, il est gardé par la force publique, jusqu’à la fin des débats, à la disposition de la Cour. L’accusé peut être gardé n’importe où, dans une salle du tribunal par exemple. D’ailleurs, c’est ce qui s’est passé puisqu’une fois expulsé, Hissène Habré a été retenu dans une pièce du palais de justice jusqu’à la fin de l’audience avant d’être reconduit à la prison. Et hier, lors de la deuxième journée de l’audience, le président Hissène Habré n’a pas perturbé l’audience contrairement à ce qui s’était passé lors de la cérémonie d’ouverture. Seulement, l’accusé a opté pour une autre stratégie, celle de la sagesse et du silence. Un silence de dépit et de défi tout à la fois ! Pour montrer sa détermination du fond de son box, Hissène Habré cherchait du regard la moindre présence de ses avocats ou ex-conseils pour les chasser de la salle. Comme quoi, pour la défense, il n’en veut plus ! Face à cette situation, le président Gberdao Gustave Kam a requisitionné et commis d’office trois avocats pour combler le vide. Il s’agit de Mes Mbaye Sène, Mounir Ballal et Abdou Nging. Elle leur a donné 45 jours pour étudier le dossier de leur « client ». Ce qui entraîne automatiquement l’ajournement du procès jusqu’au 7 septembre prochain. Un vrai plan « B » ! Mais même à cette date, c’est-à-dire à la reprise, le président Habré ne

changera guère de position. Il l’aurait fait savoir hier à ses parents qui lui ont rendu visite dès son retour du Palais de Justice. Cela nous pousse à dire que les avocats commis pour M. Hissène Habré à savoir Mes Mbaye Sène, Mounir Ballal et Abdou Nging risquent de plaider dans…le vent ! Et dans ce cas, le président Gberdao Gustave Kamo va, sans doute, dérouler son plan « C » pour en finir avec Habré…
PAPE NDIAYE
« Le Témoin » quotidien sénégalais

« Le Témoin »/Commentaire :

En attendant la mère des batailles !

Il suffit parfois d’un petit souffle, d’une légère poussée pour que l’échafaudage le plus solide en apparence et le mieux élaboré s’écroule. Comme un château de cartes. Il en est ainsi du procès du président Hissène Habré. Mise en scène millimétrée au cordeau, chorégraphie soignée, sophistiquée et rodée, décor somptueux et majestueux — celui du palais de justice de Dakar —, acteurs prestigieux, casting de rêve — pensez-donc, un ancien chef d’Etat africain dans le rôle du prévenu ! —, souffleurs puissants et redoutables. Surtout, surtout, moyens financiers colossaux — six milliards de francs — pour une superproduction dont le succès était d’autant plus garanti qu’elle avait fait sa propre publicité et que les médias du monde entier avaient accouru, un peu à la manière des Rois mages suivant des yeux l’étoile du berger. Sans compter une armée de figurants claudicants, éclopés et amputés transportés du Tchad par avion. Pour compléter la distribution de cette grande pièce de théâtre, des avocats des causes perdues spécialistes des effets de manches et du captage du financement des Ong, un procureur général sans hauts faits d’armes connu jusque-là mais convaincu que son heure de gloire

est enfin arrivée, un Tribunal olé-olé. Surtout, surtout, des bonnes consciences occidentales venues de Washington, Paris, Bruxelles et La Haye pour assister à — ou, plutôt, superviser ! — la grande première du jugement d’un ancien « dictateur » africain. Succès au box office garanti, vous dit-on ! Avec tous ces ingrédients, si la pièce ne réussit pas à rester à l’affiche pendant trois mois au moins et à se jouer à guichets fermés, ce serait bien le diable ! Surtout qu’à la veille de la première, il y a eu une répétition médiatique, plus exactement télévisuelle, générale, dans les locaux de la Télévision nationale elle-même avec, dans le rôle du réalisateur le Procureur général Mbacké Fall en personne ! Lequel en a profité pour jouer les guest stars sous les sunlights ! Difficile de résister à pareille opportunité de passer de l’ombre à la lumière, surtout celle des projecteurs de télévisions. Son jour de gloire était arrivé, vous dit-on !
Hélas, la superbe pièce n’a figuré à l’affiche que pendant deux jours avant d’être déprogrammée en catastrophe. Il suffit d’un petit rien, disions-nous, pour que tout s’écroule. A peine levés, les rideaux retombaient déjà sur le spectacle. Pour ce qui est du procès Habré, la première chose qui a fait vaciller sur ses fondements l’édifice judiciaire savamment construit par les Chambres africaines extraordinaires (Cae), c’est le discours magistral du futur bâtonnier de l’ordre des avocats du Sénégal, Me Mbaye Guèye. Lequel, s’éloignant de l’hypocrisie habituelle des discours convenus et de circonstance, a fait la remarque qui fâche. En s’étonnant du fait qu’il n’y ait qu’un seul prévenu dans le box des accusés pour un procès de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et actes de tortures (bigre !), le dauphin du bâtonnier Me Hameth Bâ mettait le doigt dans la plaie purulente. « On peut difficilement comprendre que, pour des milliers de morts, il n’y ait qu’une seule personne qui soit jugée ici. Tous les autres mis en cause sont passés entre les mailles du filet par la volonté d’un seul homme qui n’a cure de sa signature » a persiflé Me Mbaye Guèye, l’ancien président de l’Association des Jeunes Avocats du Sénégal. Il faisait bien sûr allusion au satrape qui exerce le pouvoir à Ndjamena.
Bien dit ! Nous, ça fait des années que, dans ces mêmes colonnes, nous nous demandons comment est-ce donc possible de juger le président Habré pour ses crimes supposés sans faire comparaître à ses côtés, à la barre des Cae, l’homme qui avait la haute main sur les commissariats de police, les brigades de gendarmerie et les prisons du Tchad, c’est-à-dire le président Idriss Déby Itno, à l’époque chef de tous les services de sécurité du pays. Car enfin, on ne va pas nous dire que le président Habré a torturé, tué, transporté et enterré lui-même les 4445 victimes supposées de ses atrocités et qu’il était présent dans toutes les officines de la Dds, la sinistre police politique de son époque ? La réponse à la question sur l’absence de Déby coule de source puisque c’est lui-même qui a assuré la plus grande partie du financement du procès de son ancien patron et éternel rival !
Mais surtout, le boulet décisif qui a écrabouillé l’édifice judiciaire des Cae, en particulier celle du maître des poursuites, le procureur Mbacké Fall, c’est, bien entendu, l’intelligence tactique de l’unique prévenu de ce procès à six milliards de francs. Nous voulons parler, bien sûr, du président Hissène Habré. Lequel a montré que sa réputation de stratège militaire n’est pas usurpée. Ce n’est pas pour rien qu’il a infligé une raclée mémorable à la puissante machine de guerre du colonel Kadhafi et qu’il a défait les multiples groupes armés qui écumaient le Tchad dans les années 80 ! Fin renard plus que lion du désert, le président Habré est aussi un redoutable manœuvrier dans la vie de tous les jours. Et en particulier en matière judiciaire. En refusant dès le départ de reconnaître la légitimité des chambres africaines extraordinaires montées de toutes pièces par son successeur à la tête du Tchad, l’Union africaine et l’ancien Premier ministre du Sénégal, Mme Aminata Touré, sous les injonctions des Ong occidentales, en s’abstenant de répondre aux questions des juges de cette Cour financée par Déby, en refusant de comparaître les deux premiers jours du procès et en demandant à ses avocats de s’abstenir de mettre les pieds, dans la salle de théâtre — pardon d’audience ! —du palais de justice, le président Habré a désarticulé totalement la machine des Cae. Comment en effet prétendre tenir un procès équitable lorsque non seulement l’unique prévenu refuse de comparaître, de répondre aux questions de la Cour quand il est transporté de force dans la salle d’audience et, surtout, lorsqu’il n’a aucun avocat pour le défendre ? C’est cette équation difficile à résoudre que Habré a posée au président Gberdao Gustave Kam et au procureur Mbacké Fall. Lesquels n’ont trouvé d’autre solution que de commettre d’office d’autres avocats — pour le compte d’un prévenu qui, non seulement n’est pas indigent mais encore en dispose déjà même s’il leur a demandé de ne pas le défendre ! En conséquence de quoi, ces nouveaux défenseurs venant d’être désignés au pied levé, il a bien fallu leur donner le temps de s’imprégner du volumineux dossier du prévenu qu’on n’ose pas nommer leur client. Ce qui était bien le moins. La Cour était donc obligée d’accorder un délai de 45 jours aux nouveaux avocats, et donc de suspendre les audiences jusqu’au 07 septembre prochain. A la grande fureur des avocats de la partie civile et des prétendues victimes ainsi que des familles de supposés disparus du fait des exactions alléguées du président Habré. Des parties civiles qu’il va bien falloir prendre en charge pendant tout ce temps, à moins de les rapatrier par avion à Ndjamena avant de les ramener ensuite à Dakar. Ne parlons pas des avocats étrangers, de la presse internationale venue en nombre etc. Bref, beaucoup de frais supplémentaires dont on se demande bien qui va les prendre en charge. A moins d’envoyer la facture à Idriss Déby Itno et à Reed Brody de Human Rights Watch. Qu’importe si les responsables des Cae vont pouvoir prolonger d’autant l’existence de ces chambres. Et donc la bamboula !
Certes, le président Habré n’a pas encore gagné la guerre injuste, inique et raciste que lui ont déclarée les puissances occidentales par le biais de leurs Ong et de fantoches comme Idriss Déby Itno et Mimi Touré mais il peut savourer sa joie d’avoir remporté une victoire équivalente, sur le plan symbolique, à celle de Ouadi Doum. Ouadi Doum ? Cette localité du Nord du Tchad où il infligea une défaite

mémorable à la soldatesque du colonel Kadhafi. Et puis, n’en doutons pas, d’autres victoires retentissantes sont à venir dans ce procès de la honte et de l’humiliation de l’Afrique. Chapeau bas, nous disons : « bravo, Monsieur le président Habré ! » et au 7 septembre prochain !

Mamadou Oumar NDIAYE

« Le Témoin » quotidien sénégalais

M. Serigne Fallou Dieng, Responsable des Intellectuels soufis du Sénégal
« Déby paie un procès, commande un verdict et réclame la tête d’Habré… »

Qu’on l’invite ou pas, Serigne Fallou Dieng s’introduit dans tous les débats d’ordre national et international. Le procès de l’ex-président Habré Habré en est un ! Responsable des intellectuels Soufis du

Sénégal et petit-fils de Serigne Touba, Serigne Fallou Dieng plaide dans l’affaire Habré.

Le Témoin : Comment appréhendez-vous l’affaire Hissène Habré dont le procès s’est ouvert hier à Dakar ?

Serigne Fallou Dieng : Avec beaucoup de désolation et d’amertume de voir le Sénégal, pays de Téranga, abriter un tel procès synonyme d’une mise en scène servie aux caméras du monde entier. Car le procès contre Hissène Habré constitue un harcèlement moral. Encore, un harcèlement contre tous les dirigeants africains qui se refuseraient de se mettre au diapason des politiques de domination économique occidentale. Donc, à vrai dire, c’est un procès qui transperce de très fortes incidences morales à la conscience collective sénégalaise. Il est regrettable de voir le Sénégal transformer son terroir en couloir de la mort.

Cela veut dire que vous partagez l’avis de ceux qui le qualifient de procès de la honte…

Plus qu’une honte ! Car le Cercle des intellectuels soufis, par ma voix, dénonce l’incompétence de cette juridiction qui est un tribunal incongru. Parce qu’il est constitué au nom d’un principe de « compétence universelle » dont le fonctionnement est factoriel exploratoire selon la hiérarchie intellectuelle des formes céphaliques des races. C’est à dire selon que l’on porte encéphale de type « sacatre » : (les négros africains) ou les (mongoles caucasiques).
Donc c’est en vertu de cette conception biaisée et univoque du principe de la compétence universelle que la Belgique s’est octroyée en 1993 et 1999, un arsenal de lois, qui octroie aux juges belges une compétence pour juger des crimes quel que soit le lieu d’infraction et la nationalité de l’auteur.
Et pour montrer et prouver que cette juridiction africaine est une juridiction sélective, toutes les actions judiciaires déclenchées contre des accusés de crimes de masse et de génocide se sont échouées sur les rochers de pression occidentale. Sauf les Africains ! On peut citer l’affaire Total en Birmanie, l’affaire des Franck déposée le 14 mai 2013 contre les membres non identifiés des forces américaines etc. Sans oublier le président Paul Kagamé dont l’impunité et l’intouchabilité ont été validées par l’Occident alors qu’il est poursuivi par une ordonnance. La liste est loin d’être exhaustive… Il y a dans la liste, des accusations contre Ariel Sharon et Yeron. De quoi brocarder le travail tendancieux et colonialiste de cette Cour pénale internationale (Cpi).

Serigne Bi, soyons un peu sérieux ! On ne peut pas laisser les gens gouverner dans la dictature sanguinaire sans qu’ils répondent un jour de leur tuerie…

Ecoutez ! Le Cercle n’a jamais cautionné les tueries de Habré, si tueries il y a eu, bien sûr ! Et nous restons catégoriques là-dessus. Seulement, nous dénonçons avec véhémence ce tribunal mis en place par Idriss Deby, lui qui paye et commande. Car non seulement il commande un verdict, mais encore il réclame la tête d’Habré. Et pour montrer comment le peuple africain et les défenseurs des droits de l’homme sont hypocrites, attendons le jour où Déby perdra le pouvoir, ce sont les mêmes soi-disant victimes d’Habré qui vont se retourner contre lui. Et ce sont les mêmes Ong qui vont réclamer sa tête. Cela dit, tant qu’un dirigeant sera au pouvoir, il usera et abusera de son influence pour se tailler un statut d’impunité. L’exemple le plus récent, c’est celui du président Blaise Comparé. Il a fallu qu’il soit chassé du pouvoir pour que des victimes sortent de l’ombre.

En clair, vous soutenez Hissène Habré ?

Je ne soutiens ni l’ancien dictateur, ni l’ex-chef d’Etat, mais j’assiste l’homme et le musulman dans cette épreuve difficile. Comme tous les Sénégalais, dans leur écrasante majorité, soutiennent et assistent Hissène Habré dans son ultime combat contre l’oppression d’Idriss Deby et les supports de la domination économique. D’ailleurs, vous me donnez l’occasion de féliciter et magnifier l’attitude constante et épique d’un valeureux Sénégalais du nom de Mamadou Oumar Ndiaye (Ndlr : Notre Pdg et dirpub du Témoin).

Car sa position restitue les valeurs de reconnaissance, de solidarité et de charité enfouies dans le tréfonds culturel sénégalais. Justement pour dire que Mamadou Oumar ne s’est pas trompé de camp, or personne ne peut renier à Habré sa profonde intégration au Sénégal et son affection pour le pays. A preuve, il a embrassé la voie tidiania. Mieux, Habré était très lié à feu Serigne Saliou Mbacké. Son procès est d’autant plus injuste que les principes et recommandations de l’Islam protègent le réfugié. Donc, dans les marchés comme dans les dahiras et partout, les Sénégalais n’oublieront jamais Habré, un Sénégalais comme eux, qui porte le Sénégal dans son cœur. Un Sénégalais d’origine tchadienne qui a partagé entièrement sa fortune avec toutes les catégories sociales du Sénégal. Alors que Déby, lui, n’a donné une partie de sa fortune qu’aux bourreaux de son éternel adversaire à savoir Habré. Tout cela pour laisser dérouler une parodie de procès organisée par l’Occident. J’ai mal pour l’Afrique !

Propos recueillis par :
Pape NDIAYE
« Le Témoin » quotidien

 

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