Centrafrique : pourquoi Touadera révise-t-il son décret de 2023 sur l’installation des barrières sur la RN2

0
38

Centrafrique : Touadera révise son décret sur l’installation des barrières sur la RN2

Centrafrique : pourquoi Touadera révise son décret sur l’installation des barrières sur la RN2?
Un gendarme centrafricain prospectant des bagages à un barrage routier. , VOA, Freeman Sipila

 

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 Lors du Conseil des ministres du 15 mai 2025, le gouvernement centrafricain a annoncé la révision d’une mesure sécuritaire concernant le village Wawa, situé sur le tronçon Sibut-Grimari de la route nationale numéro 2 (RN2), conformément au décret n°23.149 du 6 juin 2023.

 

Présentée comme une initiative décisive du président Faustin-Archange Touadéra alias Baba Kongoboro, cette décision cache mal les failles d’une gouvernance sécuritaire erratique. Deux ans après l’adoption de cette mesure, censée garantir la sécurité intérieure, pourquoi le gouvernement est-il contraint de faire machine arrière ? Cette volte-face révèle un État dépassé, incapable de planifier ou de communiquer efficacement.

 

En effet, la révision de cette mesure sécuritaire, annoncée avec une solennité exagérée, pousse à s’interroger : pourquoi une politique aussi importante , touchant un axe routier vital, n’a-t-elle pas été correctement évaluée avant sa mise en œuvre ? Le tronçon Sibut-Grimari, sur la RN2, est un corridor essentiel pour le commerce et la mobilité des populations. Toute restriction ou barrière, comme celle instaurée à Wawa, a des répercussions économiques et sociales immédiates. Pourtant, il aura fallu deux ans pour que le gouvernement reconnaisse, implicitement, que cette mesure était inadaptée. Cette lenteur traduit un manque criant de foresight stratégique. Les ministères des Transports, de la Défense et de l’Intérieur, chargés de sa mise en œuvre, semblent avoir agi sans données fiables ni consultation des communautés locales, exposant ainsi les citoyens à des contraintes inutiles.

 

Pourtant, le compte rendu du Conseil des ministres, d’une vague inquiétante, ne précise ni les raisons de cette révision ni les dysfonctionnements qui l’ont motivée. Quels incidents ont nécessité cette correction ? Quelles plaintes des populations ou des acteurs économiques ont poussé le président Baba Kongoboro à intervenir ? Cette absence de transparence est inacceptable dans un pays où la confiance envers les institutions est déjà fragile. En se contentant d’une formulation laconique :  une « instruction » présidentielle –, le gouvernement prive les Centrafricains d’explications claires sur une décision qui affecte leur quotidien. Cette opacité renforce l’impression d’une gouvernance improvisée, où les citoyens sont tenus à l’écart des processus décisionnels.

 

L’insistance sur l’intervention personnelle du président Touadéra, qualifié de « chef suprême des armées » et « toujours attentif aux questions de sécurité », trahit une centralisation excessive du pouvoir. Pourquoi une question aussi technique, comme la gestion d’une barrière routière, nécessite-t-elle l’arbitrage direct du chef de l’État ? Cette dépendance à la présidence marginalise les ministères compétents, réduits à de simples exécutants sans autonomie. Le ministre de la Défense, celui de l’Intérieur ou des Transports auraient dû anticiper et corriger les failles de cette mesure bien avant qu’elle ne remonte au sommet de l’État. Cette hyper-centralisation ralentit les prises de décision et expose l’incapacité de l’administration à fonctionner efficacement.

 

La RN2 n’est pas une simple route : c’est une artère économique reliant Bangui à l’Est du pays, mais également au nord pour sortir vers le Soudan, le Soudan du Sud ou la République démocratique du Congo. Toute mesure mal calibrée, comme la barrière de Wawa, peut entraver la circulation des biens, faire grimper les prix des produits de première nécessité et redoubler les tensions communautaires dans une région déjà troublée par l’insécurité. Le compte rendu ne mentionne aucun bilan des impacts de cette mesure sur les habitants ou les commerçants. Cette omission explique que le gouvernement agit sans évaluer les conséquences de ses politiques sur les populations, une négligence d’autant plus grave dans un contexte de fragilité économique et sociale.

 

En outre, en ordonnant cette révision, le président Touadéra tente de se poser en sauveur d’une situation qu’il a lui-même cautionnée. Car c’est sous son autorité que le décret de 2023 a été adopté, sans apparemment les garde-fous nécessaires pour en assurer le succès. Cette décision n’est pas une preuve de réactivité, mais un aveu d’échec masqué par une rhétorique héroïque. Elle illustre une gouvernance qui avance à tâtons, corrigeant ses erreurs au gré des crises plutôt que de les anticiper. Dans un pays où la sécurité intérieure est un « postulat à l’exercice des libertés », selon les mots du président, de telles approximations sont inadmissibles.

 

Ceci dit, la révision de la mesure sécuritaire sur la RN2 n’est qu’un signe d’un mal plus profond : une gouvernance sécuritaire désordonnée, avec l’improvisation, l’opacité et une centralisation paralysante….

 

 

CONTACTER CORBEAU NEWS CENTRAFRIQUE

Corbeaunews Centrafrique

Tel/ WhatsApp : +236 75 72 18 21

Email: corbeaunewscentrafrique@gmail.com

Rejoignez notre communauté

Chaine officielle du CNC

Invitation à suivre la chaine du CNC

CNC Groupe 3

CNC groupe 4

CNC groupe le Soleil

Note : les deux premiers groupes sont réservés  uniquement aux publications officielles du CNC