samedi, novembre 16, 2024
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Passé le cyclone, la violence meurtrière des islamistes a repris au Mozambique

Des rebelles de Boko haram pour illustration de l’article.

 

 

La trêve a été de courte durée. Quelques jours à peine après le passage dévastateur du cyclone Kenneth fin avril, la routine des attaques islamistes a repris dans l’extrême nord du Mozambique, avec son cortège quasi quotidien de morts et de destructions.

En moins d’un mois, le mystérieux groupe désigné par la population locale sous le nom de “al-shabab” – “les jeunes” en arabe – a tué au moins 22 personnes, blessé des dizaines d’autres et incendié des centaines de maisons à travers la province du Cabo Delgado (nord), selon un décompte de l’AFP.

Le déploiement massif de forces de l’ordre et les destructions provoquées par Kenneth qui a fait au moins 41 morts n’ont en rien diminué leurs raids, et Maputo redoute qu’ils n’entravent la tenue des élections générales d’octobre.

Depuis fin 2017, le nord du Mozambique à majorité musulmane est la proie d’une vague de violences attribuées à des radicaux qui prônent une application stricte de la loi islamique. Leurs raids contre les civils et les forces de l’ordre ont déjà fait au moins 200 morts.

Le 3 mai, les ONG et les agences onusiennes étaient encore à pied d’oeuvre dans les villages soufflés et noyés par Kenneth lorsque les “shabab” sont ressortis de leur maquis.

Vers 21h00, une poignée d’entre eux a envahi la bourgade de Nacate, tué six de ses habitants et brûlé des dizaines de cases.

Les deux jours suivants, Ntapuala, Banga-Vieja, Ida, Ipho et Minhanha se sont ajoutés à la longue liste des cibles des jihadistes. Cinq civils ont été tués, selon des sources locales.

Les attaques se succèdent depuis à un rythme quasi-quotidien.

Comme à Ngalonga le 18. Un habitant a été tué, deux enlevés et l’essentiel du village brûlé. “Ils nous ont crié de partir”, a raconté à l’AFP un témoin qui préfère taire son nom. “Ils ont dit +On ne veut plus personne ici. Pourquoi vous êtes encore là. Vous ne voyez pas qu’on est en guerre ?+”.

– “Présence étrangère” –

En plus des villages, les groupes armés visent les routes de la province. Comme le 10 mai à Olumbi. Deux passagers d’un minibus ont été exécutés, selon un responsable local.

Le 22, les islamistes s’en sont pris à un convoi funéraire sur une route du district de Palma. Bilan: deux blessés par balle.

Sur le plan humanitaire, ces attaques perturbent la logistique, sans avoir pour autant “d’impact” sur les sinistrés du cyclone, assure un humanitaire sous couvert d’anonymat. “On reporte dans certains cas” des distributions d’aide “quand ce n’est pas sûr de voyager de nuit”, ajoute-t-il à l’AFP.

Cette campagne de terreur a en tout cas causé dans de nombreux districts l’interruption des opérations d’enregistrement sur les listes électorales en vue des scrutins présidentiel, législatif et provinciaux du 15 octobre, selon le Centre pour l’intégrité publique, une ONG basée à Maputo.

Un an et demi après leurs premières opérations, l’identité et les motivations de ces islamistes, qui n’ont jamais revendiqué leurs actes, restent une énigme.

“C’est un petit groupe qui n’utilisait à l’origine que des armes rudimentaires”, note Cheik Saide Habibe, un porte-voix respecté de la communauté musulmane mozambicaine.

A l’origine formé de jeunes musulmans radicaux originaires du Cabo Delgado, explique-t-il, il s’est étoffé depuis, à la faveur de l’extrême pauvreté ambiante et de la répression souvent aveugle des autorités, dénoncée par des ONG.

“Tous les gens à qui on parle disent qu’il y a des étrangers parmi les assaillants”, souligne Cheik Saide Habibe. “Ils disent aussi que les opérations sont dirigées de l’étranger”.

Il y a un mois, un tribunal local a condamné 37 “shabab” à des peines de prison. Parmi eux, plusieurs Tanzaniens.

Dans un entretien mi-mai à la presse locale, le président Filipe Nyusi a assuré que l’Etat consacrait “toute sa capacité de renseignement” à identifier les auteurs des attaques, qu’il croit lui aussi pilotées de l’extérieur du Mozambique.

– “Pourquoi nous ?” –

“Le pays est visé et nous devons nous demander pourquoi. Est-ce parce (…) qu’il y a des richesses au Mozambique ? Certains parlent d’islamistes mais il ne faut pas utiliser cette dénomination comme un masque.”

Le président Nyusi fait référence aux immenses gisements gaziers offshore découverts au large du Cabo Delgado. Il rêve que ces potentielles richesses fassent de son pays en crise le Qatar de l’Afrique.

Une des “majors” à pied d’oeuvre à Palma (nord) a récemment été victime des attaques. En février et le 10 mai, les jihadistes s’en sont pris à des convois d’entreprises travaillant pour l’Américain Anadarko, tuant au moins deux personnes et en blessant plusieurs.

Le groupe a confirmé l’embuscade à l’AFP. “L’incident n’apparaît pas lié au projet gazier”, a-t-il toutefois indiqué.

Dans les villages, la population locale ne fait plus confiance depuis longtemps aux autorités pour ramener l’ordre.

“Il y a des soldats en véhicules blindés mais on vit dans la peur d’une attaque à tout moment”, confie Barnabe Samuel Mussa, 66 ans, chef du village de Mitumbate.

“Notre communauté est détruite”, renchérit le chef d’une bourgade voisine, “cette guerre est sans fin”.

 

 

AFP

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