Des parlementaires et des hauts gradés s’alarment des conséquences de la baisse des effectifs dans les armées et craignent toujours une érosion des crédits militaires.
Leurs inquiétudes sont au centre des débats de l’université de la défense, qui se tient les lundi et mardi 8 et 9 septembre à Bordeaux.
Les craintes demeurent, dans les milieux de la défense, sur les conséquences des baisses d’effectifs et la pérennité des crédits militaires. Plusieurs participants à l’université de la défense, qui se tient les 8 et 9 septembre à Bordeaux, ont décidé de profiter des débats de ces assises pour le dire. Parmi eux, des parlementaires de tous bords, des hauts gradés et des industriels.
Ils vont trouver un renfort de poids dans le rapport de deux députés, Yves Fromion (UMP, Cher) et Gwendal Rouillard (PS, Morbihan). Ce rapport, qui porte sur les opérations militaires Serval au Mali et Sangaris en République centrafricaine, doit être présenté dans le cadre des travaux de l’université. Lancée en janvier 2013, Serval s’est achevée en juillet dernier, tandis que Sangaris, commencée en décembre 2013, a toujours cours.
Missionnés par la commission de la défense de l’Assemblée nationale pour faire le bilan de ces deux opérations et évaluer le dispositif militaire français prépositionné en Afrique, les deux parlementaires sont revenus de leur périple avec des conclusions pessimistes.
Réduction globale des effectifs militaires
Les forces prépositionnées sur le continent africain sont actuellement réparties entre le Gabon (900 militaires), le Sénégal (350), Djibouti (1 950) et la Côte d’Ivoire (450). Sur la base de la réduction globale des effectifs militaires inscrite par l’Élysée en avril 2013 dans le livre blanc sur la défense, les deux sites les plus importants, le Gabon et Djibouti, vont, d’ici à 2017, perdre la moitié de leurs postes.
Les deux rapporteurs s’inquiètent surtout pour Djibouti, position stratégique au sud de la mer Rouge, dans la Corne de l’Afrique. Ils qualifient de « massif » et « trop rapide dans le calendrier » le projet de passer de 1 950 à 950 hommes, qui repose « sur un objectif strictement quantitatif et non sur une analyse fonctionnelle préalable ». Et concluent que cela « remet sérieusement en cause la crédibilité de notre dispositif ».
Crises africaines
Concernant les deux dernières opérations militaires françaises, les deux députés affirment avoir constaté une série d’« insuffisances » qui « montre les limites des capacités françaises d’intervention dans les crises africaines ».
À propos de Serval – dont ils reconnaissent par ailleurs le « succès indéniable » –, ils soulignent des flux logistiques « extrêmement tendus » sur le vaste territoire malien à cause du « manque de vecteurs aériens stratégiques » (avions gros-porteurs) ainsi que des camions « à bout de souffle ». De manière plus générale, Yves Fromion et Gwendal Rouillard dénoncent une « vétusté » des matériels des forces prépositionnées plus importante que celle relevée dans l’Hexagone.
Pour Sangaris, le rapport juge « trop faibles » les effectifs déployés (1 600 soldats). Auditionné par les deux parlementaires, le général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées françaises, invoque une « pression budgétaire continue ».
Menaces de démission
Le sujet n’est pas nouveau. En mai dernier, se fondant sur une note d’un conseiller de François Hollande, l’ancien ministre UMP Xavier Bertrand avait affirmé que la loi de programmation militaire 2014-2019 (183,9 milliards d’euros au total), déjà en retrait par rapport à la précédente, serait amputée de 1,5 à 2 milliards d’euros par an. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, et tous les chefs d’état-major avaient alors fait connaître leurs inquiétudes auprès de l’Élysée et auraient menacé de démissionner. Le 2 juin, l’Élysée publiait un communiqué pour confirmer les engagements financiers de cette loi.
Par: ANTOINE FOUCHET dans lacroix.fr