La mine d’or de Ndassima: Une mainmise lucrative de Wagner en Centrafrique

Publié le 28 juin 2023 , 7:15
Mis à jour le: 28 juin 2023 9:02 am

La mine d’or de Ndassima: Une mainmise lucrative de Wagner en Centrafrique

 

un mercenaire russe dans un pick-up des rebelles de l'upc à ndassima
un mercenaire russe dans un pick-up des rebelles de l’upc à ndassima, dans la préfecture de la Ouaka, au centre de la République centrafricaine.

 

 

Bangui, 29 juin 2023 (CNC) —  Un nouveau rapport publié par l’ONG américaine The Sentry dévoile les dessous de l’exploitation minière la plus importante de Wagner en Centrafrique, mettant en lumière les méthodes économiques prédatrices du groupe.

 

Suite à la récente mutinerie d’Evgueni Prigogine, le chef de Wagner, l’avenir de cette milice proche du Kremlin, qui sert les intérêts russes en Afrique depuis 2017, est incertain. Bien que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, ait affirmé que les “instructeurs” de Wagner continueraient d’apporter leur assistance en Afrique, notamment en Centrafrique et au Mali, il n’a pas précisé si la gestion du groupe allait changer de main ni si les activités économiques du groupe seraient maintenues. En effet, en plus de leur soutien militaire, Wagner exploite plusieurs entreprises, notamment dans le secteur minier, dans les pays où il est présent. Le rapport d’enquête publié par The Sentry expose en détail le plus grand chantier minier de Wagner en Centrafrique ainsi que les méthodes de prédation économique utilisées par le groupe.

Arrivée du convoi de 10 camions transportant des équipements d'exploitation minière de Wagner à quelques kilomètres de Ndachima, non loin de Bambari. CopyrightCNC
Arrivée du convoi de 10 camions transportant des équipements d’exploitation minière de Wagner à quelques kilomètres de Ndachima, non loin de Bambari. CopyrightCNC

 

Ndassima, située dans la préfecture de la Ouaka, au centre de la République centrafricaine (RCA), est la mine d’or centrafricaine au potentiel industriel le plus élevé. Selon un document du ministère des Mines, la valeur brute estimée du gisement atteindrait 2,8 milliards de dollars. Ce site, dont les permis étaient précédemment détenus par la société canadienne Axmin, est passé sous le contrôle de Midas Ressources en 2020, dans des circonstances controversées et contestées par Axmin.

 

La nature de Midas Ressources, une entreprise liée à Wagner, témoigne des pratiques commerciales opaques et informelles du groupe russe. Bien que l’entreprise semble enregistrée en RCA, elle n’apparaît pas dans le registre du commerce centrafricain. Son actionnariat officiel est basé à Madagascar, bien que cela semble être une couverture. Midas a bénéficié de traitements de faveur en Centrafrique, notamment en matière fiscale et dans l’attribution de permis miniers. Le site de l’entreprise affiche le numéro de téléphone d’un proche de Touadéra, le diamantaire William Wabem Ndede. De plus, bien que l’entreprise soit en activité, Midas ne figure pas dans les statistiques du ministère des Mines.

Exploitation minière de la société russe Lobaye Invest à Ndassima, aux environs de Bakala, dans la préfecture de la Ouaka, au centre de la République centrafricaine. CopyrightCNC
Exploitation minière de la société russe Lobaye Invest à Ndassima, aux environs de Bakala, dans la préfecture de la Ouaka, au centre de la République centrafricaine. CopyrightCNC

 

Selon le rapport de The Sentry, Midas opère activement à Ndassima. L’ONG s’appuie sur l’analyse de photos satellites datant de mai et juillet 2022, qui montrent des installations industrielles sur le site. Les machines industrielles ont été acheminées en RCA via le réseau d’entreprises de Wagner basées au Soudan, au Cameroun, à Madagascar et en Russie, selon l’ONG.

 

L’exploitation de cette mine s’accompagne d’une campagne de terreur orchestrée par Wagner pour dissuader les populations locales d’acc

 

éder à la zone et pour s’assurer le monopole de l’activité aurifère. The Sentry a interrogé des soldats centrafricains et des miliciens affiliés à Wagner, qui ont décrit des opérations de “nettoyage” sur les sites miniers, au cours desquelles il est ordonné de tuer toute personne présente. Une victime confirme ces allégations en déclarant : “Ils ont interdit à quiconque d’aller creuser à Ndassima. Avant cela, ils avaient tué quatre collecteurs qui possédaient plus de 200 millions de XAF [environ 329 000 dollars] et 50 kilogrammes d’or. Ils ont tout volé. Ensuite, ils ont versé du carburant sur les personnes attachées et y ont mis le feu”.

 

Midas emploie des travailleurs centrafricains dans des conditions déplorables pour exploiter Ndassima, selon les témoignages recueillis par l’ONG. En septembre 2021, environ 300 mineurs auraient été recrutés pour travailler dans l’exploitation minière de Ndassima. Ils sont répartis en deux équipes qui travaillent respectivement de jour et de nuit. Outre les bas salaires, les employés se plaignent de traitements inhumains et dégradants, allant des passages à tabac aux meurtres en passant par les viols.

 

En plus de cette exploitation localisée, Wagner s’est arrogé le monopole de l’or et du diamant dans la zone entourant Ndassima. Le groupe a interdit la vente d’or et de diamant à d’autres acteurs que lui dans les zones qu’il contrôle. Les collecteurs sont donc contraints de vendre leurs diamants et leur or exclusivement à Wagner, à un prix bien inférieur à celui du marché. Selon les sources interrogées par l’ONG, un prix fixe de 16 000 FCFA par gramme d’or est imposé, bien en dessous des prix moyens compris entre 24 000 et 29 000 FCFA par gramme.

 

Étant donné les investissements matériels et sécuritaires consentis par Wagner dans cette mine, il est peu probable que cette activité soit abandonnée. La question est de savoir si Prigozine parviendra à conserver ce trésor ou s’il devra le céder à des réseaux plus fidèles au Kremlin.

 

La mine d’or de Ndassima en Centrafrique reste le symbole de l’exploitation minière lucrative de Wagner en Afrique. Malgré les controverses entourant son actionnariat, les pratiques prédatrices et les violations des droits humains perpétrées par le groupe, l’avenir de cette exploitation demeure incertain. Il est crucial que la communauté internationale continue de surveiller de près les activités de Wagner en Afrique et prenne des mesures pour mettre fin à ces pratiques préjudiciables à la population locale et à l’économie du pays.

par Aza Boukhris

 

 

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