En Centrafrique, l’opposition dénonce un système électoral pourri jusqu’à la moelle
Bangui, CNC. Des tablettes électorales qui dorment à l’aéroport de M’Poko, des surfacturations de centaines de millions, une gestion opaque des fonds : le réquisitoire du Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC) contre l’Autorité Nationale des Élections (ANE) est implacable. Réunis ce mardi 5 novembre au siège du parti PATRIE à Bangui, les leaders de l’opposition ont dévoilé ce qu’ils qualifient de “système organisé de détournement des fonds électoraux” en Centrafrique.
Les chiffres qui accusent
“Nous donnons des chiffres précis, des faits vérifiables”, martèle Nicolas Tiangaye, président du CRPS. “Voilà tel élément qui coûte tel montant, voici la surfacturation. Ce sont des centaines de millions de francs CFA qui disparaissent. C’est l’argent du contribuable centrafricain qui part dans les poches de certains individus qui rentrent dans les institutions non pas pour l’intérêt de notre peuple, mais pour s’enrichir“.
En Centrafrique , un système électoral verrouillé
“Lorsque l’arbitre dort chez l’équipe adverse, comment voulez-vous gagner le match ?”, ironise Martin Ziguelé. “C’est un système où l’ANE penche toujours du même côté, comme la tour de Pise. Un arbitre qui n’est même pas transparent dans la gestion de ses propres affaires, comment peut-il garantir la transparence des résultats électoraux ?”
L’argent des bailleurs en question en Centrafrique
“Notre budget national ici en Centrafrique ne dépasse pas 160 milliards de francs CFA”, rappelle Nicolas Tiangaye. “Nous dépendons des bailleurs pour organiser nos élections. Ces partenaires doivent savoir que leur argent, l’argent de leurs contribuables, est détourné par l’ANE. Vont-ils continuer à financer ce système sans exiger des clarifications ?”
Des preuves tangibles
“Les tablettes sont là, stockées à l’aéroport de M’Poko”, insiste Martin Ziguelé. “Nous indiquons le lieu précis. Que le gouvernement vienne démentir. Que l’ANE explique pourquoi ce matériel électoral dort dans un entrepôt alors qu’il a été payé avec l’argent public“.
En Centrafrique , la justice aux abonnés absents
“Nous citons des faits précis, graves et concordants“, souligne Nicolas Tiangaye. “Où est la justice de notre pays ? Quand des centaines de millions de francs CFA disparaissent, ne mérite-t-elle pas d’ouvrir une enquête ? De vérifier les procédures de marché ? D’auditer les comptes ?”
Le précédent de 2011 ici en Centrafrique
“Nous avons déjà vécu ce scénario en 2011 ici en Centrafrique “, rappelle Nicolas Tiangaye. “Quand nous avons constaté que les résultats ne reflétaient pas la volonté populaire, nous avons retiré nos candidats. La communauté internationale elle-même a reconnu que ces élections étaient sujettes à caution“.
Une réforme, pas des têtes
“Qu’on ne se méprenne pas”, précise Martin Ziguelé. “Nous ne réclamons pas le départ du président de l’ANE. Ce n’est pas une question de personnes. C’est toute la structure qui doit être réformée pour garantir une véritable représentation des forces politiques et une gouvernance électorale transparente“.
L’opposition en gardienne de la légalité
“C’est un comble”, s’indigne Martin Ziguelé. “Dans ce pays, c’est l’opposition qui doit rappeler les principes de bonne gouvernance. C’est nous qui devons exiger la transparence, le respect des procédures, la protection des deniers publics. Pendant que ceux qui sont censés garantir ces principes organisent leur violation systématique”.
Le risque d’une crise majeure
“Si l’opposition démocratique ne participe pas aux élections, la légitimité même des institutions sera en question”, avertit Nicolas Tiangaye. “L’histoire nous a appris qu’un pouvoir issu d’élections truquées ne peut pas tenir. La crise est inévitable“.
Devant ces accusations précises, documentées et chiffrées, l’ANE reste muette. Les partenaires internationaux, qui financent largement le processus électoral centrafricain, sont désormais interpellés. L’opposition attend des réponses concrètes, pas des promesses creuses. En jeu : la crédibilité même du processus démocratique en République centrafricaine.
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