CPI: La démission suspecte du juge allemand Hans Peter Kaul

Publié le 4 juillet 2014 , 6:55
Mis à jour le: 4 juillet 2014 6:55 am

Le juge allemand Hans Peter Kaul, l’un des deux juges de la chambre préliminaire I de la cour pénale internationale (CPI) qui ont confirmé le 12 juin dernier les charges contre le président laurent Gbagbo, a démissionné. Selon un communiqué diffusé par la présidence de la CPI, hier, Hans Peter Kaul a démissionné « pour raisons de santé ». Sans plus de précision.

A 71 ans bientôt (il est né le 25 juillet 1943), Hans Peter Kaula été élu par les Etats parties du traité de Rome en 2003 pour un mandat de trois ans. En 2006, il a été réélu pour un mandat de neuf ans qui s’achève normalement le 11 mars 2015.

De quoi souffre le juge allemand pour qu’il rende le tablier juste deux semaines après été l’homme qui a fait peser la balance en faveur de la procureure Fatou Bensouda dans le dossier Laurent Gbagbo? Le communiqué de la CPI qui annonce la démission du juge allemand ne dit aucun mot du mal qui ronge celui-ci, ni depuis quand cela lui était devenu insupportable.

Le 3 juin 2013, le juge Hans Peter Kaul et sa collègue belge Christine Van den Wyngaert avaient contraint la juge argentine Silvia Fernandez de Gurmendi à ajourner l’audience de confirmation des charges contre le président Gbagbo. Ils estimaient que les preuves apportées par la procureure Fatou Bensouda n’étaient pas suffisantes pour renvoyer Gbagbo en procès. Un an plus tard, curieusement, alors que la procureure n’avait rien ajouté de probant à son dossier, Hans Peter Kaul changeait d’opinion en votant pour la confirmation des charges. On était encore en train de s’interroger sur les raisons profondes de ce changement d’opinion du juge allemand quand survient sa démission. Pourtant, l’affaire n’est pas encore définitivement sortie de la chambre préliminaire I. Puisque dans quelques semaines, on saura si la défense du président Gbagbo demande à faire appel de la décision du 12 juin. Et la chambre devra dire si elle l’autorise à faire appel ou non.

La démission de Hans Peter Kaul dans cet intervalle ne manque pas de susciter des interrogations. Les raisons de santé invoquées pour rendre démission ne cachent-
elles pas autre chose? Autrement dit, le juge allemand est-il pris de remords après avoir contribué à prendre une décision qui n’est nullement conforme à ses convictions profondes?

La raison de santé peut aussi être invoquée pour cacher des divergences profondes dans la gestion d’une situation embarrassante.« Parfois, certaines personnes sont amenées à invoquer des raisons de santé pour quitter leurs fonctions quand elles ne veulent pas mettre gravement en cause le fonctionnement ou la crédibilité d’une institution respectable», commente un analyste politique qui se dit surpris de cette démission brutale. Surtout que cela intervient dans un contexte où la CPI apparait de plus en plus clairement comme l’instrument pour châtier un président qui n’a pas voulu se plier aux injonctions de quelques puissants du monde.

On peut croire que le juge Hans Peter Kaul s’en veut de n’avoir pas pu résister aux pressions de divers ordres qui ne manquent pas dans ce genre de dossier. Au contraire de sa collègue belge qui est restée ferme sur ses convictions en produisant une opinion dissidente dans laquelle elle estime qu’il n’y aucune raison d’ouvrir un procès contre le président Gbagbo.

Le juge allemand s’est certainement souvenu que trois ans plus tôt, le 15 mars 2011, il avait contesté la compétence de la CPI dans le cas du Kenya. Dans une opinion dissidente, il avait estimé que les crimes commis pendant la crise post-électorale en 2008 au Kenya ne relevaient pas de la compétence de la cour pénale internationale, mais bien des tribunaux de droit commun. Selon lui, l’article 7-2 du statut de rome relatif aux attaques contre les populations civiles exige que ces exactions soient commises « en application ou dans la poursuite de la politique d’un Etat ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque ». Ce qui ne paraissait pas être le cas, de son point de vue, dans le cas du Kenya.

La crise ivoirienne étant une crise post-électorale comme celle du Kenya, comment donc a-t-il pu soutenir une chose dans le cas du Kenya et le contraire dans celui de la côte d’ivoire ?

La démission surprise de Hans Peter Kaul vient assurément en rajouter au caractère énigmatique et à la complexité du dossier ivoirien à la CPI

Source: Notre Voie

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