Centrafrique : vers un isolement total de Touadera du pouvoir

Publié le 12 juin 2018 , 5:06
Mis à jour le: 12 juin 2018 5:06 pm

 

 

Centrafrique : vers un isolement total de Touadera du pouvoir

 

 

Bangui, le 13 juin 2018.

Par : Gisèle Moloma Cnc

 

Après plus de deux ans à la tête de l’État, un réel doute désormais s’installe sur la capacité de Faustin Archange Touadera à gérer le pouvoir. Jour après jour, il détruit quasiment tous les acquis sociopolitiques, sécuritaires laissés par sa prédécesseur Madame Catherine Samba-Panza, sous l’impulsion de la Communauté internationale. Des tractations sont en court afin d’émietter son pouvoir. C’est l’objet du périple marathon du ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian à Brazzaville, N’Djamena et Addis-Abeba. Enquête.

Connue pour son instabilité chronique, la Centrafrique est devenue un pays sans maitre et ni loi. Une jungle où des groupes armés font la pluie et le beau temps et le Chef de l’État, Faustin Archange Touadera, la transforme en un clan qu’il la gouverne à la manière du Maire de sa ville de Damara. Il s’est lui-même hissé au-dessus la loi et laisse son gouvernement bat de l’aile comme une termite ailée à la recherche de la lumière.

D’après une source bien renseignée, Faustin Archange Touadera, sous l’impulsion de son Directeur de cabinet, avait signé avec plusieurs sociétés russes des accords financiers et commerciaux et plusieurs permis de recherches et d’exploitations leur ont été donnés, sans se soucier des dispositions de l’article 60 de la Constitution qui exige à ce que l’Assemblée nationale donne son aval. C’est ce qui a choqué l’ensemble des partenaires du pays, en tête les USA et la France.

Jean-Yves Le Drian : « J’ai évoqué cette question avec le ministre Lavrov lorsque je l’ai vu après Saint-Pétersbourg. Nous sommes tout à fait déterminés à ce que les engagements constitutionnels, électoraux et militaires qui ont présidé à l’arrivée du président Touadera peuvent être respectés sans l’ingérence d’acteurs étrangers ».

Quels sont ces engagements ?

Engagements constitutionnels : article 60 de celle-ci qui exige à ce que l’Assemblée nationale ou le bureau de cette Assemblée, selon un avis juridique de la Cour Constitutionnelle centrafricaine, étudie au préalable l’accord et donne ensuite son aval. Ce qui n’est pas le cas dans les accords secrets passés avec les Russes par le seul président Touadera.

Engagements électoraux et sécuritaires : l’achèvement de DDR et RRS avant tout redéploiement des FACAs sur le terrain. Force est de constater que les FACAs se déploient sur instruction d’un autre état-major, notamment russe que l’état-major propre à ces FACAs. C’est ce que Le Drian qualifie « de l’ingérence d’acteurs étrangers ».

Pour la Communauté internationale, le retour aux violences comme mode de résolution de conflits, les tueries à grande échelle et l’augmentation des nombres des personnes déplacées prouvent que Faustin Archange Touadera n’est pas l’homme de la situation.

« Il est là, avec son Premier ministre, que pour faire des affaires ». Propos d’un diplomate de l’Union africaine.

« Regarde comment Sarandji construit simultanément trois immeubles R+1 à Bangui et Bégoua » conclut notre diplomate.

« En deux ans de règne, il n’a produit aucun résultat visible » a fait savoir à CNC un autre diplomate européen en poste à Bangui et qui poursuit « il faut confier désormais son plein pouvoir à quelqu’un d’autre ».

Quelqu’un d’autres : qui et comment ?

Un nouveau Premier ministre lors du énième dialogue placé sous l’égide de l’Union africaine qui va s’ouvrir dans les semaines à venir, le 5 juillet prochain, si les acteurs militaires notamment les rebelles et l’acteur politique, le Premier ministre Sarandji font franche jeu, d’après une source autorisée auprès de l’Union africaine à Bangui.

D’après cette source, François Bozizé sera le dernier chef de guerre que le Panel des Facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine compte le rencontrer d’ici le 20 juin prochain.

Le document-cadre du dialogue consulté par CNC et actuellement à l’étude comporte certains points dévoilés par David Brownstein  chargé d’Affaires américain en Centrafrique lors de son point de presse du 24 avril dernier.

Lesquels…..?

« Un dialogue inclusif et contraignant; un dialogue qui force les décisions et qui cadre un vrai plan avec des carreaux : développement, participation dans le gouvernement et partage de toutes les ressources de manière équitable entre le peuple….».

Le mot qui agite et tremble : Participation dans le gouvernement.

D’après nos informations, majorité présidentielle, société civile et groupes armés dit les « Nairobistes » réclament la Primature. Et le schéma à mettre en place ressemble plus ou moins aux schémas imposés à Francois Bozize alors Chef de l’État et Catherine Samba-Panza. « Un Premier ministre inamovible avec tous les pouvoirs »

Contacté par CNC, un cadre militaire de la Séléka proche de Nouredine nous a fait savoir que sa coalition, pour signer l’Accord, doit obtenir la Primature; Eau et Forêt et la Défense. Ce qui n’est du gout de l’ensemble des cadres proches du président Touadera.

« Ils ont l’Assemblée nationale et demandent à avoir en plus la Primature. Ça ne passera pas » clame un député de Cœur uni.

Un situation confuse pour Touadera

Face à ces tractations, le président Touadera et son Premier ministre Sarandji s’emmêlent les pinceaux. D’après une source résidentielle, Sarandji était sorti très nerveux avant-hier nuit après une rencontre avec son patron chez lui à Boye-rabe.

D’après cette source, le président Touadera envisage de nommer un nouveau Premier ministre plus connu, proche de l’Occident et issu de son rang d’ici la fin de cette semaine et aurait demandé à son Premier ministre de lui présenter sa démission.

« Négatif » renchérit Sarandji, qui une fois au bureau hier, chante sa chanson :

« J’ai fait de Touadera ce qu’il est aujourd’hui. La Primature durant son mandat me suffit. Et je dois garder pendant qu’il garde le Palais. Un point! Un trait ».

Difficile d’imager la suite. Mais une chose est sûre, ce dialogue va émietter, qu’il le veuille ou pas, le pouvoir de Touadera pour ne pas dire, comme veut le titre, isoler totalement Touadera du pouvoir acquis par défaut le 30 mars 2016.

 

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