CENTRAFRIQUE : TOUT EXERCICE DU POUVOIR AU DELÀ DU MANDAT CONSTITUTIONNEL EST ILLÉGAL. 

Publié le 18 avril 2020 , 12:11
Mis à jour le: 18 avril 2020 1:51 am
Le Chef de l'État Faustin Archange Touadera à gauche et à droite.
Le Chef de l’État Faustin Archange Touadera à gauche et à droite.

 

Bangui (République centrafricaine ) – La République centrafricaine à l’instar des autres États du monde a été surpris par la crise sanitaire née de la pandémie du coronavirus. Ce fléau mondial a boulversé sensiblement le comportement, le mode de vie de la société et a considérablement impacté l’économie mondiale. Ce phénomène n’a pas épargné la politique centrafricaine et surtout le processus électoral en cours.

 

De mémoire et selon les dispositions constitutionnelles, le président de la république depuis son investiture consacrée par son serment du 30 mars 2016 était investi d’un mandat de cinq (5) ans renouvelable une seule fois c’est à dire que le corps électoral devrait être convoqué par décret pour désigner la personnalité politique qui devrait assurer leur destinée pour les cinq années à venir. Le cas de force majeure n’étant prévue par la constitution et pour éviter le vide juridique avec des conséquences incalculables, certains députés véreux à la solde du pouvoir ont initié un projet suicidaire de révision de la constitution en vue de proroger le mandat du président de la république au delà du délai constitutionnel.

A l’origine, il apparaît important de souligner que la démarche des parlementaires s’inscrit dans la logique constitutionnelle qui énonce que l’initiative de la révision constitutionnelle relève concurremment du président de la république et des députés. Comme d’habitude, cette démarche moribonde des initiateurs est caractérisée par la promesse des billets de banque moyennant l’adhésion massive d’une centaine de députés. Ce projet machiavélique de prorogation du mandat du président de la république a fait l’objet de vives polémiques au sein de la classe politique centrafricaine.

Des juristes chevronnés en passant par des juristes en herbes se sont prêtés au jeu d’interprétation parfois partisane de la pensée du législateur au détriment de la sauvegarde de notre démocratie sous perfusion. Au delà de ces polémiques politiciennes, nous opposons aux initiateurs de ce projet les dispositions constitutionnelles de l’article 152 alinéa 2 qui dispose que : « aucune procédure de révision constitutionnelle ne peut être engagée ou poursuivie en cas de vacances de la présidence de la république ou lorsqu’il est porté atteinte à l’unité et à l’intégrité du territoire ».

Conscient de l’occupation du territoire national à hauteur de 80% par les groupes armés, l’intégrité de notre territoire est le seul enjeu qui fait obstacle à tout projet de révision constitutionnelle. Animé par le souci de convaincre ses détracteurs, le citoyen lambda s’interroge :

Peut-on modifier la loi fondamentale, socle de notre démocratie quand l’intégrité du territoire national est sévèrement atteinte ? Les parlementaires centrafricains, représentants du peuple peuvent-ils se substituer au peuple pour décider de la prorogation du mandat du président de la république ? A défaut de l’initiative parlementaire, pourquoi ne pas consulter le peuple directement par voie référendaire ? Même si cette option est retenue, comment peut-on organisé un référendum dans le contexte centrafricain ? Les autorités sont-elles conscientes du risque de chavirement de ce projet ainsi que de ses conséquences ?

En conséquence de ce qui précède, nous estimons qu’il n’est pas tard de sauver notre jeune démocratie, patrimoine commun en qui nous espérons un avenir meilleur. Par ailleurs, nous tenons à rappeler aux autorités centrafricaines que le dénominateur commun de gestion de crise liée à un vide juridique demeure la voie du dialogue et d’échange.

Pour ce faire, nous invitons humblement les autorités à engager en urgence des discussions avec les forces vives de la nation c’est à dire les partis politiques, la société civile, les syndicats, les confessions religieuses ainsi que les représentants du peuple en vue de créer un cadre d’entente habillé d’une force probante pour gérer le glissement de calendrier…n’oublions surtout pas que l’humilité précède la gloire.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 17 avril 2020.

Bernard SELEMBY DOUDOU.

Juriste, Administrateur des élections.

Tel : 0666830062.

 

Aucun article à afficher