Centrafrique: Reflexion sur le Programme DDR-R

Publié le 6 août 2016 , 7:59
Mis à jour le: 6 août 2016 7:59 am

Centrafrique: Reflexion sur le Programme DDR-R

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Bangui le 6 Août 2015.11:31′.
Par:TEMY TOMBA. (Production indépendante)
Réflexion sur le DDR-R : Désarmement, Démobilisation, Réinsertion et Reconstruction.
La politique de Désarmement comme composante de la politique de Reconstruction.
L’objet de cette réflexion est de proposée une voie pouvant permettre à la résolution du problème du désarmement qui doit passer par une politique de Reconstruction
L’analyse de la situation actuelle de la RCA montre que l’insécurité n’est pas un problème conjoncturel, mais elle est un problème structurel. Les causes sont à la fois exogènes et endogènes. La résolution de la crise sécuritaire doit donc passer par la prise en compte à la fois des différents aspects sécuritaires et de développement économique. Pour ce faire, dans le cadre de la Reconstruction que propose le Président de la République, le Programme de DDR – R doit s’adosser obligatoirement sur la politique de développement économique envisager pour le relèvement de la RCA.
L’échec du Programme de DDR effectué du temps de BOZIZE peut s’expliquer par le fait qu’on a primé l’urgence, c’est-à-dire le court terme par rapport aux actions de moyen et long terme. Ainsi, on a voulu résoudre un problème structurel en utilisant les solutions d’une situation conjoncturelle, sans s’attaquer véritablement aux causes structurelles profondes de la crise qui sont la pauvreté, la misère, véritable terreau de l’insécurité.
Le programme de désarmement à préconiser doit s’intégrer dans le projet de Reconstruction du pays. Il faut donc faire du programme de désarmement un élément essentiel de la politique économique à mettre en place comme solution à la crise.
En effet, le programme de désarmement, quelque soit la forme que cela pourra prendre, ne doit plus apparaitre comme une prime à l’impunité. Car, c’est facile de se lever un matin et prendre les armes et tuer des innocents, pour quelque raison que ce soit, pour revenir le lendemain réclamer le DDR (l’argent frais) comme un droit.
La nouvelle approche du désarment doit chercher à toucher les causes fondamentales des crises militaro-politiques et sociales qu’a connues la RCA. La profondeur de la crise centrafricaine demande qu’on cherche les racines de cette crise pour mieux la traiter.
Pour ce faire, il faut donc une véritable politique de désarmement adossé sur une véritable politique de développement intégré et durable, en lieu et place d’un simple programme de désarmement type DDR ancien.
Il importe de mener une réflexion profonde permettant d’aller cherchant à toucher toutes les couches des communautés. Et cela ne peut se faire que dans un cadre de politique économique qui englobe les aspects politiques, sociaux et économiques. La crise centrafricaine est à la fois sociale, économique et politique. Les solutions préconisées doivent donc tenir compte des trois aspects. Il s’agira d’une politique de développement intégré et durable.
Les différents programmes de désarmement qui seront mis en place doivent être considérés comme de vraies composantes de la politique de Reconstruction, c’est-à-dire : un ensemble de décisions économiques qui vont permettre de modifier les structures de la société centrafricaine sur le plan social, économique et politique.
L’objectif ici est de passer de la politique de l’urgence (programme de désarmement) à une politique de développement durable (politique de désarmement) et passer ainsi d’une politique de réduction de la pauvreté à une véritable politique de développement durable.
La crise centrafricaine est si profonde qu’elle doit s’inscrire dans la durée, car elle est émaillée de violences sur fond de désintégration de l’Etat, de l’économie, et avec de profonds clivages entre les groupes socio-ethniques et religieux.
La feuille de route ou le plan d’actions qui sera mise en place ne doit pas être une réponse à court terme, car les défis sont de l’ordre du long terme. Ce qui exige une véritable planification des actions dans le temps, avec les objectifs bien définis et bien fixés et les moyens conséquents qui vont avec, afin d’atteindre ces objectifs et d’aboutir aux Finalités qui sont : la cohésion sociale, la justice sociale, l’amélioration du niveau de vie des populations, la sécurité et la Paix. Ces programmes planifiés doivent absolument être respectés pour garantir le succès de la Reconstruction.
La réussite de cette politique doit passer par une politique administrative basée sur la Régionalisation et la Décentralisation. Les Préfectures doivent être dotées de trois principales structures avec une certaine autonomie:
– La Préfecture (avec la sous-préfecture + la Commune) ;
– Le Haut Commissariat au Développement chargé des Pôles de Développement.
– La Région militaire (armée, gendarmerie et police).
Ces éléments permettront de prendre en compte conjointement les aspects politiques, économiques et sécuritaires.
Pour mener à bien cette politique, l’Etat, dans une politique de régionalisation, doit nommer à la tête de chaque structure régionale ou Préfectorale les originaires de ces régions. Et cela aura pour but de responsabiliser les acteurs locaux dans le développement de leur région.
Une structure de contrôle et coordination relevant directement de la Présidence de la République sera chargée du suivi évaluation et de contrôle permanent.
Dans le cadre d’une politique de développement régional à mettre en place, il importe que l’Etat dote annuellement dans un programme triennal de développement chaque région d’une allocation de 8 à 10 milliards de Francs CFA.
C’est donc par une véritable politique de désarmement intégrée dans la politique de Reconstruction qui pourra permettre de réaffirmer l’appartenance de chacun à son sol par cette politique de régionalisation.
Le rôle de l’Etat central est de réguler les disparités, car chaque région doit être la première à bénéficier de ce qui sort de son sous-sol. Cela n’enlève en rien du sentiment d’appartenance à une Nation, la Nation Centrafricaine.
Sur le plan de financement, l’appui de 4 milliards de F CFA apporté par les Chefs d’Etat de la CEMAC est déjà un signal encourageant que les nouvelles autorités légitimes doivent capitaliser en sollicitant le concours des Nations Unies dans le cadre des Fonds de Stabilisation octroyés aux pays post-conflit. L’Etat doit aussi solliciter le renforcement du concours de l’Union européenne dans le cadre du financement des Pôles de développement qu’elle soutient.
C’est donc par une politique de développement régional dans le cadre d’une politique de Reconstruction qu’on parviendra à la Réconciliation nationale et au relèvement du pays. Chacun centrafricain doit d’abord se sentir chez soi. Ainsi, par la prise de conscience de ce qu’on est d’abord chez soi dans sa région d’origine qui permettra la prise de conscience collective d’appartenance à une seule Nation. Et cette Nation doit se traduire dans une Armée Nation où chaque groupe ethnique est représenté.
La sécurité des Centrafricains et la défense du territoire Centrafricain doivent dépendre des Centrafricains dans leur diversité. C’est pourquoi l’Armée Nationale doit être la préoccupation fondamentale des nouvelles Autorités légitimées par le suffrage universel, et celle-ci doit être l’émanation de tous les centrafricains issus de toutes les ethnies qui composent la RCA.
Le Président DACKO l’a fait, on allait recruter dans toutes les régions du pays, avant que BOKASSA ne vienne détruire ; ensuite KOLINGBA est venu l’achever en la tribalisant à outrance jusqu’à l’inféodation ; et enfin PATASSE et BOZIZE sont venus l’enterrer définitivement. La suite, tout le monde le connait, un Etat sans Armée.
Il faut donc repenser l’armée centrafricaine. La RCA a des militaires bien formés dans des académies prestigieuses, mais qui sont devenus des coquilles vides, ayant troqué le treillis au costume trois pièces et cravate. Le désarmement ne passera que par la Reconstruction dans la vision d’un développement économique régional intégré.
De ce qui précède, je suggère ce qui suit :
1- Réhabilitation immédiate des Forces Armées Centrafricaines et suivie de sa réorganisation ethnico-régionale;
2- Redéploiement dans toutes les régions du pays avec la nomination des Chefs de Régions militaires pour désarmer les groupes armés ;
3- Mise en place des Pôles de Développement Régional avec à leur tête des vrais commis (agents de développement) d’Etat originaires des régions pour relancer l’économie;
4- Renforcement de la gouvernance dans le secteur des industries extractives par la réhabilitation des brigades minières, pour arrêter le financement par le diamant de sang des rebelles.
J’ajoute les Recommandations ci-après.
Pour lancer le processus de désarmement des combattants et des communautés armées

I -Au gouvernement centrafricain :

1. Mettre en œuvre une politique de désarmement qui fournit des opportunités de réinsertion réelles et durables en :

a) Finançant et étendant les chantiers à haute intensité de main d’œuvre et en complétant ces chantiers par des programmes de formation professionnelle ;

b) Adossant les programmes de démobilisation, désarmement et réinsertion (DDR), et de réduction de la violence communautaire, aux projets de Reconstruction et de Développement de la Banque mondiale et de l’Union européenne ;

c) Créant des emplois aidés ou des stages au sein des entreprises du Groupement interprofessionnel de la Centrafrique pour les jeunes ayant bénéficié des formations qualifiante et diplômante.

2. Sécuriser et défendre les populations en :

a) Prenant en compte la diversité communautaire dans la sélection et la formation des futures forces de sécurité et de défense;

b) Déployant des unités de gendarmerie et de police professionnelles représentatives des différentes communautés dans les zones où les tensions entre groupes communautaires demeurent vives ;

c) Exiger l’application de la Résolution 2301 de 2016 pour le renforcement des capacités de maintien de l’ordre de la Minusca dans les villes et les zones où les tensions sont fortes et récurrentes afin de protéger les populations civiles ;

d) Multipliant les missions et faire des campagnes de sensibilisation des populations afin de participer au processus de désarmement.

3. Rendre le DDR crédible en :

a) Ouvrant le DDR aux combattants des groupes armés signataires ou non signataires des différents accords, en exigeant strictement la remise d’armes de guerre en état de fonctionner comme condition d’accès au programme et en prévoyant des phases de regroupement très courtes sans distribution d’argent lors de la démobilisation, en les incorporant directement dans programmes prévus ;

b) Rendant l’exécution financière du programme de DDR-R transparente sous contrôle conjoint des internationaux et du l’Assemblée Nationale.

4. Reprendre le contrôle des principaux sites de production d’or et de diamants en :

a) déployant des forces centrafricaines et des fonctionnaires centrafricains des mines et relancer le mécanisme de certification du processus de Kimberley pour les diamants.

b) créant une cellule de lutte contre les trafics de diamants, or et ivoire, ainsi que le braconnage militarisé qui devrait être soutenue par la Minusca grâce à leur moyens aériens.

5. Renouer le dialogue avec les populations des zones sous contrôle des groupes armés en :

a) multipliant les voyages dans ces régions comme à commencer à faire le Président de la République en se rendant à Kaga Bandoro et symboliquement y instaurer et organiser des fêtes tournantes.

6. Combler le déficit de représentation des régions et de leurs ethnies en :

a) diversifiant les nominations et les recrutements dans l’administration et dans les forces armées, la gendarmerie et la police sur des bases géographiques et ethniques et communautaires.

7. Arrêter les chefs de milices qui refusent de désarmer ; que la force reste à la Loi.

Toutes ces recommandations relèvent des autorités centrafricaines légitimes.

II- Aux Nations unies, aux bailleurs de la République centrafricaine, et à la France :

– A la France

8- Avec le départ des forces françaises, notamment « SANGARIS », en raison des Accords qui lient la France et la RCA, la France, au nom des relations privilégiées et historiques, doit aider la RCA à :

a) assurer sa sécurité et défendre son territoire en formant les militaires centrafricains

b) aider financièrement le processus du DDR-R. et

– Aux Nations unies,

9 – Imposer à la MINUSCA l’Application pleine et entière des résolutions votées par le Conseil de Sécurité de L’ONU pour la RCA.

– Aux bailleurs de la République centrafricaine,

10- Suivre le geste des Etats membres de la CEMAC pour financer le processus du DDR et

– la Reconstruction de la RCA.

TEMY TOMBA. (Production indépendante)

 

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