Centrafrique: Le point de dégringolade globale
Bangui 17-10-2014 (Corbeau News Centrafrique): Nous avons fonctionné dans les ténèbres et sommes arrivés à la croisée des chemins où nous nous sommes mis à nus au vu et au su de la communauté internationale qui nous observe malgré son intervention pour nous sauver du chaos. Le mot manque aujourd’hui pour qualifier le degré de la barbarie en Centrafrique et le niveau de notre spécialité en matière de prédation, de gabegie, du népotisme, du clanisme et du clientélisme. En bref, les pouvoiristes qui se dévorent ont transformé notre territoire national en boucherie humaine et c’est la désolation.
Permettez-moi de paraphraser le sage Flaubert le 26 juin1870 qui disait à George Sand, « je suis écœuré, navré par la bêtise de mes compatriotes.
Notre crise qui persiste comme une pandémie qui impose la mobilisation du monde entier contre, je dirai qu’on est encore très loin d’atteindre l’objectif recherché puisqu’on continue de ramer à contre-sens des vertus de la société, du bien-être social pour ne pas dire de l’humanité. Le monde entier qui nous regarde persévérer dans l’animosité est aussi dépassé de cette barbarie qui nous colle à la peau. Je dis bien nous, parce que les séléka et les antibalaka sont nos frères hormis les mercenaires tchadiens et soudanais, mais les actes odieux que continuent de poser ces groupés armés non conventionnels assoiffés démesurément du pouvoir sèment une désolation généralisée, à telle enseigne que ceux-là méritent qu’on leur ôte la nationalité centrafricaine. Ils ont perdu les repères des hommes dignes, civilisés, vivant ensemble harmonieusement dans une nation, dans un pays laïc, dans une république en respectant les lois, fondée par un vaillant fils du pays, en la personne de son fondateur, Barthélemy BOGANDA qui, nous regarde faire. Puisque les morts ne sont pas morts. Après la mort, il y a la vie de notre âme qui nous fait respirer sur la planète terre.
Les mutineries, les coups d’Etat, les rébellions et la guérilla urbaine qu’on a opté depuis plus de vingt décennies comme bonne procédure de résolution politique pour atteindre son objectif en soient nous ont conduit aujourd’hui dans l’enfer puisqu’on n’agit plus en tant qu’humain mais en tant qu’animal. Du moment où la crise fait qu’on ne respecte plus la valeur humaine, on est dans un monde purement de l’animosité qui ne se décrie pas. C’est les véritables ténèbres dans lesquelles nous-nous sommes plongés en ce début du 21è siècle.
En écoutant certains députés de la transition lors de la première interpellation du premier ministre défaillant Mahamat Kamoun qui a fait un aveu le 14 octobre 2014 et les arguments non convaincants des inconditionnels de Catherine Samba-Panza lors de la conférence de presse du gouvernement relative au détournement de 2,5 milliards du don angolais, je me dis que la République de Barthélemy BOGANDA qui prônait l’unité, la dignité et le travail est très mal partie. Tout porte à croire qu’on manque cruellement des filles et fils du pays qui ont une vision pour un Etat de droit, pour une république. En effet, les principaux acteurs de la crise qui enterrent la République centrafricaine et paralyse le bon fonctionnement sous régional (CEMAC) ne marchent plus sur leurs deux pieds mais sur leur tête à cause de leur boulimie et intérêt purement égoïste qui leur font perdre tous les sens humains et le raisonnement correct d’un homme d’Etat.
L’affaire du détournement du quart du don angolais finira, je crois, de jaser Bangui en ébullition que quand les autorités actuelles de la transition seront conséquentes envers elles-mêmes pour prendre une décision honorable en sortant par la grande porte. Du moment où la présidente de transition, Catherine Samba-Panza déclare que le moment venu elle va citer les noms de ceux qui ont perçu l’argent de ses propres mains et que le premier ministre Mahamat Kamoun de son côté face aux parlementaires reconnaît la mauvaise procédure entamée pour descendre avec la mallette angolaise sur Bangui, il n’y a pas à tergiverser ou mener un débat qui fait perdre le temps sur le détournement. La présidente Catherine Samba-Panza et son premier ministre ne doivent qu’emboîter le pas à Michel Djotodia et son premier ministre Me Nicolas Tiangaye qui ont aussi très mal géré le pays pendant neuf (9) mois. Il va sans rappeler que le régime démissionnaire de Séléka a bel et bien brillé par les assassinats, les pillages, les viols, les détournements de fonds publics et d’autres exactions de tout genre sans que la sommité hausse le ton et prenne des mesures pour condamner les auteurs des crimes contre les populations. Idem pour le régime Samba-Panza qui a démarré à une vitesse vertigineuse en détournant sans vergogne la poignée de 10 milliards de fcfa offerte par le président angolais Dos Santos pour soutenir la bonne marche et la réussite de la transition, en sacrifiant la population qui meurt du jour au jour depuis son élection par la criminalité des antibalaka et ex-séléka retranchés en provinces dont les représentants siègent au parlement et au gouvernement. Indiscutablement, le régime actuel de la transition est caractérisé par l’amateurisme, l’inefficacité et le favoritisme clanique pour ne pas mener à bon port le processus du retour à l’ordre constitutionnel. Son équipage frileux mène une politique de ventre en lieu et place d’une politique d’intérêt général. On ne dira pas que Catherine Samba-Panza n’a pas fait si tôt noyer le navire et perdre la confiance placée en elle par les pays amis et les institutions financières internationales qui auraient ralenti leur intention d’apporter l’aide budgétaire à la République centrafricaine. Quand bien même que cette dernière fait appel à une commission d’enquête du FMI-BM pour un éclairage, elle est en train de se serrer la corde au cou en reconnaissant dans sa déclaration que des gens ont perçu l’argent angolais distribué.
Cependant, le peuple souffre et meurt sous le feu des antibalaka, des maisons sont incendiés par ces barbares et son ancien premier ministre, André Nzapayéké a laissé des arriérés de trois mois des salaires. Les fonctionnaires, les agents de l’Etat et les pensionnaires continuent de tirer le diable par la queue. Ce qui prouve à suffisance que les autorités de la transition sont des mauvais élèves et de surcroît de bons voleurs qu’on attrape la main dans le sac.
Sous d’autres cieux, une telle affaire honteuse comme celle d’Angolate qui défraie la chronique, des personnalités d’une intégrité morale démissionnent de leur poste de responsabilité. Au Mali, un pays africain qui vit la même crise que la République centrafricaine, même s’il est encore loin de voir le bout du tunnel avec la position inflexible des jihadistes au nord, il y a eu du progrès dans le processus de la sortie de crise. Les gens prennent des décisions responsables. L’affaire des contrats d’armement surfacturés a fait démissionner des personnalités maliennes mais pourquoi pas chez nous ? Pourquoi il nous manque souvent le courage politique et on se cramponne au pouvoir ?
Nous avons écoutez un ministre en fonction lors de la conférence de presse en cascade du gouvernement déclarer qu’il faut quitter le chantier des mutineries, qu’il faut quitter le chantier des coups d’Etat, qu’il faut quitter le chantier de la rébellion. Une très belle et bonne déclaration du membre du gouvernement de transition qui croit mieux faire que les autres alors qu’il s’enfonce indéniablement. Je ne dirai pas le contraire de ses propos puisque appliquer les principes de la démocratie c’est d’éviter tout cela. Le ministre Gaston Mackouzangba a oublié de déclarer aussi ou soit il a voulu cacher l’un des péchés du gouvernement de transition que pour quitter tous ces chantiers d’enfer et reconstruire un Etat de droit digne de ce nom, il faut quitter également le chantier de la mal gouvernance qui nous pique et pénètre le corps comme une sangsue. C’est à ce niveau le point de dégringolade globale. Il va sans dire que le plus souvent, ce sont les fossoyeurs de la démocratie qui entretiennent la mal gouvernance qui débouche à une crise incurable comme la nôtre. C’est pour cela, chers compatriotes, les mêmes causes produisent les mêmes effets…
Pierre INZA