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CENTRAFRIQUE : LES ENJEUX POLITIQUES ET MILITAIRES DU DIALOGUE DE LA DERNIÈRE CHANCE.

Monsieur Bernard Selembi Doudou, l'auteur de l'article. Photo d'archive.
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l’auteur de l’article. Photo d’archive.

CENTRAFRIQUE : LES ENJEUX POLITIQUES ET MILITAIRES DU DIALOGUE DE LA DERNIÈRE CHANCE. 

 

 

Bangui (CNC) – Après de multiples dialogues d’initiatives locales et religieuses, l’Union Africaine sous l’impulsion de la communauté internationale a organisé à partir du 24 janvier 2019 dans la capitale soudanaise un énième dialogue inter-centrafricain en vue de rapprocher les prétentions des groupes armés non conventionnels à celles du pouvoir.

 

Il faut rappeler au passage qu’il y’a déjà en moyenne sept (7) accords de paix signés sans comprendre les motivations réelles des groupes armés ni la cessation des hostilités militaires sur le terrain. Ce pourparler qualifié par la presse locale, africaine et internationale de la dernière chance est l’occasion idéale de poser le véritable diagnostic de la crise centrafricaine.

L’injustice sociale, la corruption, la mal gouvernance et la dilapidation systématique des maigres ressources de l’Etat justifieraient l’enlisement de la crise. Ces échanges tant attendus sont animés par le souci primordial d’abréger la souffrance d’un peuple meurtri, de ramener la paix en cessant les violences, d’étendre l’autorité de l’Etat sur l’étendue du territoire national et enfin de relancer l’économie en vue d’un développement sain, prospère et durable.

La liste des participants non exhaustive et dûment contestée rendue publique par la présidence de la commission de l’Union Africaine ne définit pas les critères du choix et écarte les principaux acteurs de la crise.

A titre de rappel, il est singulièrement important de souligner que le pays abritant les discussions est dirigé par un dictateur hors pair contesté par son peuple et sous sanction de l’ONU. L’exemplarité et la moralité d’un tel cadre laisse à désirer car les manifestants demandant la démission du guide sont mortellement réprimés par la police. Convoyé comme des bétails humains à Khartoum, aucune absence n’a été enregistrée. Le sort de toute une population épris de paix est suspendu aux conclusions du dialogue qui par la même occasion déterminera l’avenir du quinquennat du Président de la république.

Préoccupé par l’issue de cet énième dialogue non inclusif apparemment, le citoyen lambda s’interroge :

Le salut du peuple centrafricain viendra t-il de ce fameux dialogue ? Ce dialogue n’est-il pas un éternel recommencement ou n’a t-il pas une saveur du « déjà vu »? Pourquoi la liste des participants ne reflète t-il pas les principaux acteurs particulièrement les deux précédents chefs d’Etat ? Pourquoi les forces vives de la nation c’est à dire les partis politiques de l’opposition démocratique, la société civile, les syndicats etc…n’ont que le statut d’observateurs ou consultants au dialogue ? Comment le pouvoir jugulera l’amnistie et l’impunité prônées par les groupes armés avec la farouche opposition de la population de pardonner ? Si le dialogue politique se veut inclusif, pourquoi il ne concerne que le pouvoir et les groupes armés ? Croyez-vous à la sincérité d’un tel dialogue qui est assimilable à une excursion touristique sur les plages brésiliennes ? Le pourcentage d’occupation territoriale des groupes armés sera t-il un indicateur déterminant pour influencer les négociations ? En d’autres termes, comment négocier sereinement et équitablement dès lors que les rapports de force sur le terrain sont en faveur des groupes armés ? En outre, les conclusions de ce dialogue vont-ils s’inscrire dans la logique du respect de la constitution ?

Sachant qu’un dialogue politique aboutit toujours et inévitablement sur des compromis, ce phénomène peut-il aller au delà du cadre juridique et institutionnel ? En conséquence de ce qui précède, quelles seront les sanctions en cas de non respect ou de violation des accords de Khartoum par l’une des parties contractantes ? Quels sont les intérêts des groupes armés qui brassent des milliards en exploitant les territoires occupés de déposer les armes au profit d’un accord de paix qui ne leur rapportera que des miettes ?

Pour revenir à la question substantielle conséquente à une éventuelle amnistie, qu’adviendront les victimes dans cette mascarade ? Le récent transfert du chef des milices « anti-balaka » à la Cour Pénale Internationale (CPI) ne va t-il pas compromettre l’issue du dialogue ? Enfin, que vont devenir les conclusions du forum de Bangui ? Ces innombrables questionnements démontrent de la complexité du problème centrafricain et surtout de la méthodologie utilisée pour aplanir les divergences. Peu d’experts et analystes parieront car nos autorités s’évertuent à ignorer que « les mêmes acteurs agissant pour la même cause quel que soit l’environnement produiront les mêmes effets ».

A l’instar du Vatican et en attendant l’issue de ce conclave, le peuple centrafricain continuera de prier pour qu’enfin la fumée blanche puisse s’échapper de la cheminée…

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi

 

 

Paris le 25 janvier 2019

Bernard SELEMBY DOUDOU

Juriste, Administrateur des élections

Tel : 0666830062

 

 

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