Centrafrique: J-B Yarissem , Coordonnateur National du WWF salue le retour de la population animale des Aires protégées de Dzanga Sangha

Jean-Bernard Yarissem coordonnateur de WWF à Bangui
Jean-Bernard Yarissem coordonnateur de WWF à Bangui

J-B Yarissem , Coordonnateur National du WWF salue le retour de la population animale des Aires protégées de Dzanga Sangha

« Après la crise dévastatrice, les populations d’éléphants et de gorilles sont de retour dans les Aires protégées de Ndzanga Sangha » dixit J-B Yarissem du WWF-Centrafrique

La tragédie actuelle n’a pas épargné les ressources fauniques de la RCA. Au pic de cette crise, une trentaine d’éléphants ont été massacrés par les éléments de la Coalition Séléka dans les Aires protégées de Dzanga Sangha dans la préfecture de Sangha Mbaéré dans l’ouest du pays, mettant en déroute le population animale restante, détruisant systématiquement les installations et mettant un coup d’arrêt au tourisme. A la mi-décembre dernière, deux missions se sont dirigées conjointement à Bayanga : une mission de la coordination nationale du WWF et une autre du WWF Allemagne. Dans une interview exclusive accordée à Corbeaunews Centrafrique, vendredi 19 décembre 2014 à Bangui, Jean-Bernard Yarissem Coordonnateur National du WWF a noté avec satisfaction le retour de la population animale et la reprise globale des activités à la faveur de l’amélioration de la situation sécuritaire tout en déplorant les campagnes de dramatisation menées par les ambassades étrangères qui ne correspondent pas à la réalité et qui continuent de dissuader les touristes à destination de la RCA.

Corbeaunews Centrafrique (CNC) : Monsieur Jean-Bernard Yarissem, bonjour !

Jean-Bernard Yarissem (JBY) : Bonjour !

CNC : Vous êtes Coordonnateur National de WWF en RCA. Pourriez-vous nous donner un aperçu bref des activités du WWF en RCA et le but de la mission que vous venez de conduire à Bayanga ?

JBY : Je tiens à préciser tout d’abord que c’est depuis plus d’une trentaine d’années que WWF qui est la première organisation internationale en charge de la conservation de la nature exerce en République centrafricaine. Présent dans 105 pays de par le monde, WWF emploie environ 5 000 personnes. Ses réalisations en RCA ont permis la création du parc Dzanga Ndoki et les Aires protégées de Dzanga Sangha à Bayanga dans la préfecture de Sangha Mbaéré.

Revenant à votre question, ma mission à Bayanga s’inscrit dans le cadre d’appui à l’équipe de WWF sur place qui travaille avec le gouvernement, notamment le ministère des Eaux et Forêts. Il s’agit de voir comment on pouvait mieux coordonner nos activités sur le terrain. Heureuse coïncidence, on s’est rencontré avec l’équipe de WWF Allemagne qui était en visite sur le site des Aires protégées de Dzanga Sangha qu’ils financent depuis plusieurs années. L’occasion m’a permis de féliciter nos deux équipes qui travaillent sur place qui ont pu faire le nécessaire, malgré la crise pour conserver le potentiel faunique qui est là-bas. Donc, cela a permis également de remonter le moral du personnel, afin de les motiver à persévérer dans leurs activités.

CNC : Au terme de cette mission, que peut-on retenir de l’état des lieux de cette réserve classée patrimoine mondial par l’UNESCO, ainsi que de Bayanga en tant que destination touristique par excellence ?

JBY : Il faut d’abord dire que la crise qui a touché la zone d’intervention de WWF à Bayanga est exceptionnellement la plus cruelle et la plus dévastatrice. Il vous souviendra qu’en mai 2013, un groupe de braconniers soudanais se réclamant de la Coalition Séléka s’était déployé à Bayanga où ils se sont rendus dans la clairière de Dzanga et massacré une trentaine d’éléphants, mettant ainsi toute la population restante en déroute. Moi-même ils ont failli me kidnapper, mais Dieu-merci je me suis réfugié en brousse toute une journée durant avant de ressortir tard le soir pour constater seulement les dégâts. La situation a été dramatique avec toutes les infrastructures vandalisées, des véhicules emportés avec tous nos équipements. Dieu-merci une fois de plus, nos collègues de WWF du réseau ont dû nous apporter leur assistance financière, ce qui nous a donc permis de renouveler notre outil de travail. A ce jour, je puis vous dire qu’on a repris le travail plus correctement.

Concernant le potentiel faunique, la population des animaux après ce massacre, est revenue. Sur la saline Dzanga aujourd’hui, en tout temps et en toute heure, il y a au moins une quarantaine d’éléphants ; quatre groupes de gorilles habitués sont mis à la disposition des touristes. Cette reprise nous a permis jusqu’à la fin juillet et début août dernier de recevoir la première visite d’une trentaine de touristes Espagnoles. Cela a été un véritable levier qui a motivé le moral du personnel. Mais malheureusement, nous jouons contre la campagne des ambassades occidentales qui découragent leurs ressortissants de venir compte tenu de la crise. Et donc, cet élan de la relance du tourisme fonctionne un peu au ralenti d’où nécessité de travailler encore beaucoup plus pour convaincre beaucoup plus de touristes à venir, parce qu’actuellement la sécurité est revenue, les activités socioéconomiques dans les campagnes ont repris. Il n’y a donc rien à craindre.

CNC : Que peut-on donc attendre de cette mission conjointe ?

JBY : Un illustre président africain disait que l’argent n’aime pas le bruit. Effectivement, pendant la crise, beaucoup de partenaires se sont abstenu et tous les financements étaient mis en berne. Heureusement, l’arrivée de ces collègues de WWF Allemagne et aussi celle d’une équipe de KFW (Banque allemande pour le développement) qui finance le Tri-national de la Sangha (TNS) dont font partie les Aires protégées de Dzanga Sangha ont dissipé les inquiétudes et incertitudes sur le retour effectif de la sécurité. Et de notre côté, tout le staff est en place, motivé et passionné par le travail. Tout cela a concouru à donner espoir aux partenaires qui ont remis en route le processus pour le décaissement de l’argent qui était en attente. D’ici le début de l’année 2015, nous sommes convaincus que nous allons travailler à la vitesse de croisière, dès qu’on aura tout le financement attendu.

La deuxième chose à retenir de cette mission, c’est que pendant notre séjour, nous avons tenu des réunions de travail aussi bien avec l’équipe de WWF de la partie nationale puis les deux équipes ensemble, afin de se donner la main et travailler mutuellement dans l’optique d’une meilleure coordination de nos activités.

CNC : Votre message…

JBY : Si jamais j’avais un message de fin, ce serait celui d’espoir, de paix et d’amour. En effet, la crise que le pays avait connue est une réalité, mais il faut maintenant regarder vers l’avenir et se dire que ce ne sera que nous-mêmes centrafricains qui construirons notre pays. Pour cela, il faut inévitablement taire nos divergences et nos querelles et voir plutôt ce qui nous rassemble. Disons que c’est notre pays, notre terre natale et notre nation. Il faut voir comment la relancer après cette crise qui l’a frappée durement.

CNC : M. Jean-Bernard Yarissem, je vous remercie.

Propos recueillis par Fred Krock, Journaliste-Grand reporter CNC