CENTRAFRIQUE : CACOPHONIE DIGNE D’UNE TÉLÉ-RÉALITÉ AU SOMMET DE L’ÉTAT, LA STABILITÉ ET LA PÉRENNITÉ DU POUVOIR SONT-ELLES MENACÉES ?

Publié le 19 mars 2017 , 6:53
Mis à jour le: 19 mars 2017 6:53 pm

CENTRAFRIQUE : CACOPHONIE DIGNE D’UNE TÉLÉ-RÉALITÉ AU SOMMET DE L’ÉTAT, LA STABILITÉ ET LA PÉRENNITÉ DU POUVOIR SONT-ELLES MENACÉES ?

 

Monsieur Bernard Selembi Doudou
Monsieur Bernard Selembi Doudou

Bangui, le 20 mars 2017.

Par : Bernard Selemby-Doudou.

 

Après la valse des décrets mettant en place les institutions prévues par la constitution du 30 mars 2016, le palais de la renaissance s’est lancé à l’assaut pour le contrôle du pouvoir législatif en vue de se représenter majoritairement dans l’équipe dirigeante de l’assemblée nationale. Conformément aux règlements intérieurs de cette haute institution, le bureau de l’assemblée nationale doit connaître un renouvellement à l’exception du seul mandat du président de l’assemblée nationale qui couvre le quinquennat. C’est ainsi que le groupe parlementaire “cœurs unis” soutenu par l’élu de la nation a lancé la chasse aux postes dans le bureau de l’assemblée nationale contre le groupe parlementaire “chemin de l’espérance” soutenu par le President de l’assemblée nationale.

La défaite de la coalition c’est à dire du camp présidentiel est cuisante et amère. Cette défaite a par la même occasion fragilisé l’union sacrée et les “cœurs unis” qui vient de se muer sans honte en “Alliance Patriotique Présidentielle”. Cette terrible défaite laisse présager des épisodes titanesques dans les jours, mois et années à venir. Ainsi, de multiples interrogations taraudent dans la tête de nos concitoyens : comment expliquer cette déconfiture ? Quelles sont les raisons alors que le camp Présidentiel avait les moyens de se faire représenter ? Les candidats présentés ne sont pas des idéaux ? Ont-ils des moralités et/ou profils douteux à l’instar de François Fillon en France ? S’agit-il encore de promesses non tenues ou de la corruption de la part du President de l’assemblée nationale ? Le President de la République est-il intègre et ne veut pas utiliser les méthodes du President de l’assemblée nationale ? La corruption avérée qui a atteint le bureau de l’assemblée nationale et les accusations de connivence avec les groupes armés ne sont-elles pas constitutives de haute trahison ?

Il faut noter que le President de la République se retrouve depuis son élection dans une situation politique inédite et délicate. Les précédents régimes s’arrangent toujours à avoir un homme de confiance à la présidence de l’assemblée nationale. L’autre particularité inédite réside dans le statut identique des deux protagonistes. Les deux sont des candidats indépendants aux dernières Présidentielles, ils n’ont pas de partis politiques et ont un groupe parlementaire façonné et/ou acheté. Cette situation élève le risque de danger pour notre jeune démocratie. Le chef de l’Etat ne peut éviter un duel fatal face à un farouche concurrent qui nourrit et murmure depuis des décennies des ambitions présidentielles nonobstant sa large désillusion aux dernières présidentielles.

De prime abords, les relations entre le chef de l’Etat et le President de l’assemblée nationale qui a une forte personnalité sont souvent électroniques et basées sur des suspicions, de méfiance et des accusations nauséabondes qui sont préjudiciables à la stabilité de notre chère nation. Face à cette cacophonie digne d’une télé-réalité, le citoyen lambda s’interroge : pourquoi le President de la République a attendu une année pour lancer une contre-offensive contre l’instance dirigeante de l’assemblée nationale ? Était-ce le délai minimum pour comprendre l’enjeu, l’utilité et la portée d’un bureau de l’assemblée nationale ? Pourquoi cette envie subite de se représenterdans le bureau de l’assemblée nationale ?

La naïveté et la non maîtrise des rapports exécutif/législatif sont-elles à la base de ce réveil tardif ? La présidence de la République n’a t-il pas un conseiller juridique dans ses rangs ?

Dans ce conflit stérile de positionnement politique entre le President de la République et le President de l’assemblée nationale, où se trouve la priorité des centrafricains ? De cette envie d’envahir et de contrôler l’instance dirigeante de l’assemblée nationale, que faites-vous du principe de séparation de pouvoir édicté par Montesquieu ? Fort de ce qui précède, lequel des deux protagonistes dégainera en premier l’arme “de destructions massives ” mise à leur disposition respective par la constitution ? Il s’agit de la dissolution de l’assemblée nationale par le President de la République et inversement la motion de destitution ou de censure contre le gouvernement pour le parlement. N’oublions pas qu’en cas de dissolution de l’assemblée nationale prévue par l’article 46 de la constitution, le chef de l’Etat doit recueillir l’avis du bureau de l’assemblée nationale et encore, a t-il les moyens d’organiser de nouvelles élections législatives ? Parallèlement, le parlement peut aussi initier une procédure de destitution du Président de la République ou de voter une motion de censure contre le chef du gouvernement. En cas de destitution du President de la République, le President de l’assemblée nationale qui a des ambitions présidentielles avant sa naissance n’acceptera pas d’assurer l’intérim qui ne dure logiquement que trois mois. Ainsi, ce dernier placera son vice-président qui sera en retour son faiseur de roi. En cas de statuquo, c’est à dire que la situation actuelle ne change pas, le pays sera à un moment donné de son histoire ingouvernable car le parlement va faire piétiner les initiatives gouvernementales. L’équation est tellement technique qu’elle donne des migraines à celles ou ceux qui tenteront de la résoudre. Pour finir et en guise de contribution, nous nous permettons de mettre en garde les deux protagonistes qui murmurent des projets visant à déstabiliser notre démocratie embryonnaire. Celui qui osera sera responsable devant l’histoire. Nous vous invitons in fine de vous débarrasser de vos égos et de privilégier l’intérêt supérieur de la nation. Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 18 mars 2017.

 

Bernard SELEMBY DOUDOU

Juriste, Administrateur des Elections

Tel : 0666830062.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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