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ANALYSE SOCIO-ÉCONOMIQUE DU 13 février  2023 : L’ERE DES EFFONDREMENTS Chronique de Fari Taheruka Shabazz  )

 

Bangui (République centrafricaine) – Comme chaque deux semaines, le politologue Fari Taheruka Shabazz  livre sa chronique sur la situation socio-économique de son pays, la République centrafricaine sur CNC. Pour lui, la situation va de mal en pire.  

Fari Tahéruka Shabazz
Fari Tahéruka Shabazz

 

Rédigé par Fari Taheruka Shabazz

Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le mardi 14 février 2023

 

ANALYSE SOCIO-ÉCONOMIQUE DU 13 février  2023

 

  1. À l’approche du 15 février 2023 (date fatidique) le régime de Touadéra entre dans l’ère des effondrements : effondrement budgétaire, effondrement à venir du tissu économique, effondrement total du système de santé, effondrement moral de l’appareil militaire et sécuritaire, effondrement accéléré du tissu social…

 

  1. C’est le 20 février 2023 que le gouvernement Moloua tentera d’aller chercher à lever une de plus (en vain?) 12,5 milliards de FCFA sur le marché sous-régional des titres publics. Ce qui signifie que les signaux économiques, sécuritaires, budgtaires et sociaux que vont lancer dans les jours précédant cette opération sont d’une importance capitale. Surtout quand on lit dans le communauté N°23/20 du 26 janvier 2023 que les services du FMI, en fin de mission en RCA en décembre dernier, avaient déjà mis en garde le gouvernement Moloua contre une dégradation quasi-inéluctable de sa note souveraine justement à cause de ses trop nombreuses contre-performances économiques.

 

  1. L’effondrement budgétaire n’est plus à démontrer, c’est un fait aujourd’hui acté par le gouvernement Moloua via le ministère des finances et du budget dirigé par le ministre Hervé Ndoba. Le 10 février 2023 ledit ministère insistait, dans une publication de sa page Facebook, sur l’état de “dégradation des finances publiques” caractérisée notamment par “la rareté des ressources extérieures”, “la baisse des recettes (propres)” et “la hausse des dépenses publiques”. Les caisses de l’État sont désespérément vides malgré la hausse vertigineuse du prix du carburant, la taxation à 26% désormais de la téléphonie et autres pressions fiscalo-douanières exercées contre les contribuables centrafricains les plus modestes et les PME déjà fragilisées.

 

L’effondrement du tissu maigre économique

 

  1. L’effondrement du tissu maigre économique est en cours de maturation. Les entreprises mettent la clé sous la porte les unes après les autres, font faillites en cascade dans le plus grand silence voire la plus grande indifférence des ministère du commerce, des PME ou encore de l’économie. Rappelons que le gouvernement Moloua s’est fixé comme objectif principal d’extorquer aux entreprises centrafricaines, en 2023, plus de 12 milliards de FCFA supplémentaires par rapport à l’année fiscale 2022. Sans oublier que depuis plus de deux ans les prestataires et fournisseurs de l’État centrafricain ont vu leurs factures impayées jusqu’à aujourd’hui, ce qui a laissé sur la paille un bon nombre d’entre eux.

 

  1. Pour l’année 2023 aucun dispositif budgétaire n’est prévu pour soulager ses créanciers locaux de l’Etat centrafricain. La rencontre inter-ministérielle, le 10 février 2023, entre le ministre des finances et du budget, Hervé Ndoba, et la ministre du commerce, Léa Koyassoum-Doumta, n’a rien donné. Aucune mesure n’est prévue pour soutenir les PME centrafricaines en très mauvaise santé financière. En plus des ces tragédies, il faut ajouter deux éléments qui finiront très certainement par provoquer l’effondrement de l’écosystème économique du pays : la taxation scandaleuse imposée aux importateurs centrafricains par la société libanaise Mercure Logistique Centrafrique au niveau du port-sec de PK26 et la tendance outrageusement haussière des cours mondiaux du baril du pétrole qui vont renchérir la facture énergétique déjà salée des PME centrafricaines. La hausse généralisée des coûts d’importation et de la production, comme l’affirme le FMI, la persistance d’une inflation à deux chiffres (la pus élevée de la zone CEMAC) et le recul de la demande intérieure donneront à n’en pas douter le coup de grâce aux opérateurs économiques centrafricains déjà très mal en point.

 

La grève et ses effets

 

  1. La prolongation de la grève lancée par le syndicat des personnels de santé risque d’être fatal au gouvernement Moloua incapable de pouvoir répondre favorablement aux quatre principales revendications des grévistes. Pour rappel, les personnels de santé exigent la réforme du statut particulier du personnel de santé, le versement des primes Covid-19 des années 2021 et 2022, l’intégration massive des jeunes diplômés du secteur ainsi que les états généraux de la santé. Si le régime de Touadéra ne réagit pas prestement par des mesures concrètes et que la grève se durcit c’est tout le système de santé centrafricain, déjà très fébrile, qui risque de sombrer avec les conséquences apocalyptiques qu’on devine assez aisément. D’autant plus qu’au niveau humanitaire 49% de la population centrafricaine souffrent déjà de crise alimentaire aiguë selon le Programme Alimentaire Mondial (PAM), un des taux les plus élevés au monde. Un mois de grève du personnel de santé combiné à une non-réaction du ministère de l’action humanitaire face au désastre humain, aura pour résultat la mise à terre des infrastructures sanitaires et humanitaires du pays. Mais est-ce que le régime Touadéra est prêt à sauver le système de santé de la RCA ou préfère-t-il plutôt maintenir en poste l’homme de l’échec et du dogmatisme et du déshonneur, Félix Moloua ?

 

  1. Plus que les déclarations alambiquées voire l’absence totale de communication des ministères de la défense et de la sécurité publique, c’est vers les autres ministères régaliens comme celui des finances ou les rapports des partenaires techniques et financiers de la RCA qu’il faut se tourner pour avoir une image un tant soit peu réel de la situation sécuritaire du pays. Le porte-parole du gouvernement, le ministre Serge Ghislain Djorie, a beau s’égosiller sur les antennes des médias publics et privés pour nous faire croire à l’image d’une RCA présentée comme un havre de paix dont l’autorité centrale aurait sécurisé 100% du territoire. Mais la réalité est toute autre. Partout ailleurs, les experts, les partenaires, les observateurs avisés voire les ministres les plus réalistes parlent pour leur part d’aggravation de la situation sécuritaire (FMI), de regain d’insécurité (MinFin), de situation préoccupante (Dpt d’État US), etc. La fameuse politique touadérienne d’une armée de garnison est désormais vécue comme une chimère, comme vaste blague , une fumeuse propagande soviétisante donc mensongère. Pour preuve, le minuscule camp Béal à Bangui accueille à lui seul pas moins de six régiments (bataillons) différents dont les forces spéciales, le BIT6, le Bataillon d’Honneur, le Bataillon du Génie, etc. Obligés de se marcher sur les pieds et de se serrer colle dans une boîte de sardine.

 

La dette de Wagner

 

  1. Perclus de dettes (facturés impayées de 18 milliards de FCFA au Wagner), sans véritables moyens de tenir la guerre (carence de logistique, de financement, de PGA, de commandement unifié, …), démoralisée par les lourdes pertes notamment ceux causés par les attaques de drones et les opérations-éclairs comme à Béloko ou Ndélé et l’absence de repos ou de renouvellement des détachements, la Grande Muette est au bord de la crise de nerf. Le refus du ministre russe des affaires étrangères de se rendre à Bangui alors qu’il sillonne toute l’Afrique de long en large ( Brazzaville, Luanda, Alger, Bamako, Khartoum, etc.) est de nature à miner le moral des troupes qui commencent à comprendre que la RCA est en réalité un partenaire de seconde zone qui n’a pas droit aux officiels russes de haut rang mais seulement aux Wagner classés partout comme une organisation terroriste.

 

  1. Désormais le Tchad accuse le régime de Bangui de soutenir la rébellion tchadienne qui auraient des bases en territoire centrafricain (dans le nord-ouest précisément). Le média Tchad TV5 parle même de la volonté du président de la transition, le général Mahmat Kaka Déby, d’intervenir militairement sur le sol centrafricain afin de déloger ces rebelles. Une telle escalade serait catastrophique pour l’armée centrafricaine et contribuerait après tous les maux qui la frappe à s’effondrer sur son propre poids. Un effondrement du même acabit que celui qui a atteint l’armée afghane face aux talibans. En effet, est-ce que les forces armées centrafricaines ont la capacité d’affronter deux armées en même temps sur son territoire (armée du Tchad et celle de la CPC)? Il est certain que non. Et ce n’est pas le mini-sommet fiasco de Luanda, le 9 février 2023, entre Lourenço, Déby fils et Touadéra qui sera de nature à baisser la température militaire.

 

Effondrement social

 

    1. Quant à l’effondrement social, il est lié à l’effondrement en perspective de l’autorité de l’État dont parle le ministère des finances et du budget impuissant devant la montée en flèche des mouvements sociaux dans chaque secteur de la vie.

 

 

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