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RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE : POURPARLERS DE KHARTOUM, DEUX AVANCÉES MAJEURES ?

salle du dialogue de Khartoum entre le gouvernement centrafricain et les groupes armés sous l'égide de l'Union africaine
Pourparlers de Khartoum. Minusca photo.

 

 

RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE : POURPARLERS DE KHARTOUM, DEUX AVANCÉES MAJEURES ?

 

 

LE PARTAGE DES POUVOIRS ET L’AMNISTIE GÉNÉRALE ONT ÉTÉ RETIRÉS DES DÉBATS 

         C’est une formidable surprise et une bonne nouvelle. Il va de soi que ce retrait des deux principales revendications des groupes armés – impunité et partage du pouvoir – va irriter au plus haut point les factions rebelles. Mais force est de constater qu’un gouvernement légitime s’est comporté mieux que prévu au début de ces âpres pourparlers, alors que nous étions un certain nombre à supputer que les rebelles feraient triompher leurs revendications.

A l’ouverture des pourparlers donc, l’espérance d’une conclusion acceptable des débats, pour tous les Centrafricains, est devenue possible.

         Malheureusement, des craquements sinistres n’ont pas tardé à briser l’espoir de tous. Abacar Sabone, conseiller politique virulent de l’un des groupes armés des ex-Sélékas, a jeté une pierre dans la rivière calme du début des pourparlers. Menaces et vociférations n’ont pas tardé : « la paix n’a pas de prix, il faut tenir compte des populations qui souffrent. Il faut des sacrifices. Si nous voulons la paix, nous devrons amnistier certaines personnes (lesquelles ?) et aller au pardon, ainsi qu’à la réconciliation nationale. » Plus loin, il ose conclure, avec cynisme et indécence : « ce n’est pas une insulte à la mémoire des victimes, c’est pour sauver ce qui reste. Personne ne veut la partition du pays. Personne n’a demandé la démission du président Touadera démocratiquement élu. »

         C’est ce même Abacar Sabone qui déniait auparavant toute légitimité au président de la République et narguait le gouvernement du pays. Il était, en outre, l’apôtre acharné de la partition du territoire !

                   Et maintenant, ce chef de guerre, après avoir massacré les populations, demande aux victimes de pardonner à leurs bourreaux sans qu’ils passent par la case justice ! C’est une insulte effarante à la mémoire des suppliciés.

         Il faudra beaucoup de doigté et d’effort pour surmonter les pièges tendus par les ex-Sélékas.

 

EX-SELEKAS ET ANTIBALAKAS ENTRE ROUBLARDISE ET REVIREMENTS

         En Centrafrique, il semble qu’on rejoue sans cesse les mêmes scènes dramatiques.

         Pourtant, les pourparlers de Khartoum ont commencé sous de bons auspices et restent chargés d’espoir : les principales revendications des groupes armés ont été retirées des pourparlers. Cette manière de faire, c’est précisément ce que souhaite le peuple centrafricain : impunité zéro pour les criminels de guerre et les auteurs de crimes contre l’humanité.

         Mais les seigneurs de guerre excellent dans le tango : un pas en avant, deux pas en arrière. Leurs petits intérêts reprennent vite le dessus, sans tenir compte de l’avenir d’une nation et de son peuple. Quand les ex-Sélékas claironnent à qui veut les entendre qu’ils ne souhaitent que la paix et la réconciliation nationale, ils bluffent. Depuis près de six ans de conflit, les criminels sélékistes ne veulent pas autre chose que leur élargissement pour leurs crimes et le partage du pouvoir sans passer par une élection démocratique.

         Mais le souhait profond du peuple centrafricain est, précisément, que les auteurs avérés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité soient poursuivis par la justice et non pas amnistiés.

 

L’UNION AFRICAINE, L’ONU ET LES PUISSANCES ETRANGERES IMPLIQUÉES DANS LE CONFLIT CENTRAFRICAIN DOIVENT PRENDRE LEURS RESPONSABILITÉS

         Un pays en voie de partition. Des victimes innocentes par milliers. Des centaines d’exilés partis sans espoir de retour pour beaucoup. Des orphelins abandonnés, livrés à eux-mêmes, éloignés à tout jamais d’un horizon radieux. La Centrafrique est une nation martyre dont il faut en urgence arrêter le supplice.

         Les puissances étrangères ont une lourde responsabilité dans le drame qui ensanglante le pays. La France et la Russie, sans oublier la Chine et les Etats-Unis en embuscade, ont les moyens militaires de lancer un ultimatum aux rebelles. Elles peuvent les obliger à déposer les armes et à respecter le droit international. Elles sont à même de saisir leur fortune, amassée grâce au trafic de matières premières et planquée dans les paradis fiscaux et les banques étrangères.

         Désormais, la responsabilité de tous est engagée.

         Si Khartoum échoue, l’espoir d’une paix durable en Centrafrique s’éloignera à tout jamais. La partition risquera alors de devenir effective.

         Il faut donc tout faire pour éviter au pays de Barthélémy Boganda le scénario apocalyptique qui semble se profiler à l’horizon.

         Des pourparlers de Khartoum doivent surgir la paix et la réconciliation nationale, pour éviter à la Centrafrique de plonger dans une nuit interminable.

PS : Pourquoi n’a-t-on pas convié les ex-présidents François Bozizé, Catherine Samba et Michel Djotodia aux pourparlers de Khartoum ? N’est-ce pas surprenant ?

          Djotodia, en particulier, aurait beaucoup de choses à dire sur l’intrusion des Sélékas dans le pays. Il a une terrible responsabilité dans le chaos centrafricain.

         Ne faut-il pas, si on veut la paix et une véritable réconciliation, que tout le monde s’explique et demande pardon ?

                                                                                                                                                                  JOSEPH AKOUISSONNE DE KITIKI

                                                                                                                                                                                 (31 janvier 2019)

 

 

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