CENTRAFRIQUE : PLAN GLOBAL D’UNE SORTIE DEFINITIVE DE CRISE PROPOSÉ PAR EULOGE KOI.
Bangui, le 4 août 2017.
Par : Euloge Koi.
Contexte et justification
La situation sécuritaire volatile actuelle en République Centrafricaine n’incite guère à l’optimisme ni même au maintien de l’espoir né au lendemain de l’élection truquée de Faustin Archange TOUADERA à la magistrature suprême de l’Etat.
La paix sociale et la cohésion nationale continuent d’être fracturées, les activités productives demeurent ébranlées et le risque de partition du pays en trois blocs est élevé.
Pour dire les choses sans langue de bois, il faut reconnaitre que la crise actuelle, la plus grave et la longue de l’existence de la République Centrafricaine, s’explique par des revendications légitimes portées par les ressortissants des préfectures abandonnées depuis belle lurette par le pouvoir central. Celles-ci manquent d’infrastructures, n’ont pas accès aux services sociaux et sanitaires de base et ne disposent pas de conditions minimales d’une vie humaine digne et décente.
La sous-représentation de certaines catégories sociales au sein des services publics et des institutions nationales, en considération de leur appartenance ethnique et religieuse, a fortement influé sur l’explosion de la crise. Il s’agit là de la violation de l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui garantie l’égalité de tous les citoyens devant la loi et l’admission à toutes dignités, places et fonctions publiques selon le mérite, les capacités professionnelles et les talents.
Les tracasseries et les traitements discriminatoires et dégradants parfois exercés par les gendarmes, policiers et militaires sur les compatriotes de confession musulmane ont sérieusement ravivé la crise.
La période de transition dirigée par Mme Catherine Samba-Panza était censée mettre fin à l’instabilité et jeter les bases d’une vraie réconciliation et d’un climat de paix, de sécurité et de cohésion nationale.
Malheureusement, les autorités de transition n’étant pas à la hauteur de leurs missions, se sont empressées pour organiser les élections qui ont abouti à la victoire de Faustin Archange TOUADERA dans des conditions douteuses. L’ancienne Cheffe de l’Etat avait d’ailleurs reconnu que ces élections avaient été truquées au profit du Professeur TOUADERA.
Qu’a cela ne tienne, le vainqueur recalé, M. Anicet Georges DOLOGUELE, s’était au nom de la paix, plié au présumé verdict des urnes.
Cependant, le mal élu depuis son investiture, a montré ses limites de leadership et de gestion efficace des questions sécuritaires, politiques, sociales et économiques.
Au lieu de tirer les leçons du passé, le Président voleur des élections TOUADERA a non seulement reproduit, mais accentué les pratiques désuètes de mal gouvernance à l’origine de multiples crises que le pays a traversées. Son refus de limoger le Premier Ministre, Dr Simplice Mathieu Sarandji, et la plupart des membres du gouvernement jugés incompétents, rentiers, pervers et prédateurs, et son incapacité totale à solutionner la crise, constituent les ingrédients qui ont replongé le pays dans les violences et l’incertitude politique et économique.
A l’exception de Bangui la capitale et de deux préfectures dont le Président TOUADERA a une relative autorité, toutes les autres quatorze préfectures, soit 80% du territoire national échappent au contrôle gouvernemental.
Les populations vivent dans la psychose et craignent chaque instant pour leur sécurité et pour leur vie.
Aujourd’hui, on compte près d’un million de personnes déplacées et réfugiées, au moins 2,7 millions dans le besoin d’une aide humanitaire, 1,5 million en situation d’insécurité alimentaire et plusieurs milliers de morts.
Le Président mal élu TOUADERA ne peut se dédouaner de sa responsabilité dans ces situations déplorables.
Que vaut le maintien en fonction des hommes incapables, amateurs, pervers, rentiers et capteurs de finances publiques par rapport à la protection des précieuses vies humaines, la sécurité, l’ordre et l’intégrité du territoire d’un pays ?
De plus en plus de voix se lèvent pour s’opposer à toute mesure de clémence à l’égard des acteurs politico-militaires sans mesurer les conséquences. Les partisans de l’intransigeance soutiennent que les crises qui ont secoué la RCA trouvent leurs racines dans des mesures qui apparaissent comme de l’impunité.
Cette affirmation n’est pas tout à fait erronée, mais la question de l’impunité dans le contexte centrafricain est complexe. Elle ne concerne pas seulement les violences armées, mais elle touche également les pratiques de corruption, de détournement des deniers publics et de népotisme qui ont toujours gangrené la gestion des affaires publiques.
Les auteurs des crises centrafricaines ne sont ni la France ni le Tchad que d’aucuns accusent par mauvaise foi, mais ce sont les régimes politiques qui ont fait de l’exclusion, le népotisme, la prédation et la répression sauvage un mode de gouvernement, et les leaders politiques qui cherchent à accéder à la mangeoire par l’instrumentalisation et la manipulation.
Nul ne peut douter le fait que les pratiques de mal gouvernance et les ambitions pouvoiristes fondées sur des projets fallacieux constituent des viviers de l’insurrection et de tensions.
C’est à l’aune de ces situations hideuses que les groupes armés sont nés pour défendre les droits des populations martyrisées, exclues et abandonnées à leur triste sort.
La question de l’impunité susmentionnée doit être traitée de manière globale. Au tant prendre des mesures légales pour sanctionner les actes constitutifs de crime de guerre, de crime contre l’humanité et de crime économique dont les effets disposeront pour les faits survenus après leur entrée en vigueur que de s’obstiner à punir exclusivement les politico-militaires, lesquels ne se laisseront pas trainer comme des moutons à l’abattoir.
Les mesures et procédures du DDRR en cours ne produiront pas de résultats escomptés dans la mesure où d’importantes réalités sont occultées dans les démarches y relatives. Les quotas, les homologations de grade et les mesures d’accompagnement sont les segments indispensables d’un DDRR réaliste et lisible.
Le pays est encore dans le fossé de l’instabilité. Il n’est donc pas sensé de brandir les menaces de poursuites et de condamnation comme si la justice ne devrait être appliquée qu’aux seuls acteurs politico-militaires. Qu’en sera-t-il des pouvoirs publics et des acteurs politiques, auteurs primaires des violences en RCA ? Qui des groupes armés, des pouvoirs publics ou des leaders politiques accepteront-t-ils d’être les potentiels clients de la chaine pénale ?
De toute évidence, les politico-militaires n’accepteront jamais de se faire passer pour les seules victimes expiatoires qu’il faudra offrir sur l’autel de la justice.
C’est la raison pour laquelle l’adoption des mesures légales sus évoquées devient une nécessité urgente.
Le contexte des crises centrafricaines exige une approche fondée sur la sagesse et la prudence par l’adoption des mesures de clémence, car il vaut mieux une paix définitive aux prix de sacrifices vivants qu’une instabilité permanente aux prix de vies humaines et des pertes matérielles.
Le gouvernement actuel, dirigé par un historien idiot et incompétent et composé des ministres des copains et copines, n’est pas en mesure d’apporter les solutions fiables à la crise. Devra-t-on, dans ces conditions, le laisser continuer à patauger dans l’eau boueuse d’incompétence, d’instabilité et d’incertitude, et de nager dans le marigot de mal gouvernance ?
La situation sécuritaire de plus en plus précaire et dégradante et le souci de préserver le pays de l’aggravation des tragédies exigent des centrafricains la reprise en mains de leur destin commun, et imposent au Président TOUADERA le limogeage de son ami SARANDJI et la dissolution du gouvernement, faute de quoi, il devra lui-même prendre la porte suivant une initiative personnelle, légale ou militaire.
FORMATION D’UN GOUVERNEMENT D’UNION, DE RECONCILIATION ET DE RETABLISSEMENT DE LA SECURITE ET DE L’AUTORITE DE L’ETAT-GURSAE-
Dans tous les cas de figure, la situation actuelle du pays exige la mise en place d’un gouvernement composé de tous les protagonistes de la crise et de toutes les forces vives de la Nation. Ce gouvernement sera investi des missions suivantes :
Faire adopter et promulguer les textes réglementaires, législatifs et constitutionnels permettant la mise en place et le fonctionnement du nouveau cadre institutionnel, politique, sécuritaire, social et économique.
Rétablir la sécurité, la paix sociale, la concorde nationale et l’autorité de l’Etat.
Organiser les élections présidentielles, législatives et municipales. Les objectifs majeurs assignés à ces missions sont :
Pacifier le pays et rétablir la sécurité partout sur toute l’étendue du territoire national ;
Assurer le redéploiement des services déconcentrés de l’Etat ;
Assurer le retour des personnes déplacées et réfugiées ;
Mettre en place un dispositif robuste de sécurité pour assurer la paix, la quiétude et la sécurité des personnes et des biens ;
Créer des brigades mixtes spéciales de patrouille, de contrôle et d’intervention rapide (BS) composées des éléments issus des groupes armés et des Forces de Défense et de Sécurité restructurées, pour assurer la sécurité et garantir la libre circulation des personnes et des biens ainsi que la protection et la défense de l’intégrité du territoire national ;
Créer des équipes mobiles de contrôle des BS pour se rassurer de leur efficacité sur le terrain et du respect des consignes relatives à la libre circulation des personnes et des biens ;
Former les ex-combattants sur les droits de l’homme et le droit humanitaire international ;
Former les ex-combattants afin de renforcer leurs compétences et capacités opérationnelles avant de rejoindre les Forces de Défense et de Sécurité restructurées ;
Réactualiser les états généraux de la défense et explorer d’autres pistes pour une gouvernance militaire juste et équitable ;
Restructurer les Forces Armées Centrafricaines-FACA- en vue de l’édification d’une armée nationale professionnelle, républicaine et dépolitisée pour ne servir que les intérêts supérieurs de la République ;
Institutionnaliser et constitutionnaliser le principe de séparation et de l’indépendance de l’armée de la politique afin d’éviter l’influence et l’ingérence du politique dans les affaires militaires et celles du militaire dans les affaires politiques ;
Rétablir l’Etat de droit par la lutte contre la corruption, le népotisme, l’exclusion et l’impunité ;
Procéder à la prise en charge des victimes civiles et militaires ;
Porter assistance à la réinsertion socio-économique des personnes affectées par la crise ;
Réparer les torts occasionnés par la crise par l’indemnisation substantielle des victimes, leurs familles et leurs ayants droit ;
Relancer les activités économiques.
CANTONNEMENT-DESARMEMENT-DEMOBILISATION-INTEGRATION-REINTEGRATION-REINSERTION-RAPATRIEMENT- CDDI3R.
Le programme du DDRR tel que conçu en ce moment n’atteindra pas les objectifs fixés, car il n’aura pas l’adhésion totale et complète des groupes armés qui y voient d’énormes insuffisances.
Cantonnement : regrouper les ex-combattants sur des sites sécurisés afin de les identifier et les recenser. Cette opération permettra de connaitre et de résoudre les problèmes d’effectifs réels de chaque groupe armé.
Démobilisation : les ex-combattants non éligibles à l’intégration et à la réintégration sont libérés de toute obligation militaire et réinsérés dans la vie civile.
Intégration : les ex-combattants éligibles sont versés dans les administrations publiques et au sein des Forces de Défense et de Sécurité après avoir reçu les formations nécessaires.
Réinsertion : rendre autonomes les ex-combattants démobilisés par l’apprentissage d’un métier et l’accompagnement dans le développement d’une activité durable génératrice de revenus. Il sera procédé à la mise en place des brigades de rapatriement volontaire ou forcé des ex-combattants démobilisés. Les groupes armés récalcitrants qui n’auront pas adhéré au programme CDDI3R seront traqués et mis hors d’état de nuire.
Rapatriement : les ex-combattants étrangers sont impérativement tenus de rentrer dans leurs pays d’origine. A cet effet, le programme CDDI3R donnera les moyens aux états majors des groupes armés pour intéresser les éléments issus de leurs rangs respectifs et les rapatrier ensuite sous l’égide des Nations Unies.
Réintégration : on compte parmi les ex-combattants des éléments issus des FACA. Ceux qui sont éligibles seront repris dans les rangs de leurs différents corps d’origine.
Désarmement : Les ex-combattants sont tenus de déposer les armes, munitions et matériels de guerre en leur possession.
Le CDDI3R apparait comme la solution idoine à l’épineuse question d’insécurité.
COMITE POPULAIRE CONFESSION-PARDON-JUSTICE-REPARATION-RECONCILIATION CPCPJ2R.
La restauration d’une paix durable, gage de développement, est une urgente nécessité pour le GURSAE. Ainsi, il mettra des moyens conséquents à la disposition du CPCPJ2R, qui aura la lourde tâche de rebâtir la concorde nationale et le vivre ensemble durement frappés par les multiples crises.
Missions principales :
Le CPCPJ2R, considéré comme l’ultime dispositif conduisant à une sortie durable de la crise, agira dans un esprit de bienveillance, d’entente, de conciliation, d’écoute et rejettera tout sentiment d’animosité en soi.
Identifier et recenser les victimes ;
Enregistrer les auteurs des crimes sur la base d’une présentation volontaire ;
Mener une campagne de communication visant la sensibilisation des auteurs de crimes pour se rendre et faire des dépositions volontairement, sous peine de faire l’objet de poursuites devant les tribunaux et la Cour pénale spéciale ;
Organiser et conduire les audiences populaires dites « NGBANGA TI SIRIRI » au cours desquelles les victimes, les témoins et les auteurs des crimes sont invités à s’exprimer librement.
NB : La CPS se chargera de juger :
les actes survenus après la promulgation des mesures légales de clémence ;
Les auteurs des crimes qui auront refusé de se rendre volontairement au CPCPJ2R.
REFORME DES COLLECTIVITES TERRITORIALES
La RCA a élaboré les textes de décentralisation pour ensuite les ranger dans les casiers. Le développement durable à la base n’est possible qu’avec des projets bancables présentés directement aux partenaires non pas par des conseils municipaux relevant du dispositif nominatif, mais par ceux qui sont issus des élections au suffrage universel.
La RCA, en faisant abstraction de ce pallier important de la démocratie depuis près de trois décennies, a retardé le développement intégré et équitable du pays et maintenu les collectivités territoriales dans la précarité, la misère et la dépendance.
Les centrafricains, ont besoin à tout prix des élections municipales pour choisir leurs représentants locaux avec lesquels ils souhaitent construire un avenir meilleur de leurs communes.
Il suffira de réactualiser les textes susvisés pour :
Ancrer la démocratie à l’échelle locale ;
Accorder aux collectivités territoriales de pouvoirs plus étendus ;
Transférer par exemple 25% des recettes budgétaires de l’Etat aux collectivités territoriales ;
Rétrocéder aux collectivités territoriales au moins 15% des revenus provenant de l’exploitation des ressources issues de leurs territoires.
ORGANISATION DES ELECTIONS
L’organisation des élections crédibles et transparentes sans TOUADERA viendra couronner l’ensemble des acquis sur les plans sécuritaire, politique, institutionnel, social et économique. Aucun dérapage ne sera donc toléré.
Pour garantir la transparence, la crédibilité et le caractère démocratique des élections, et pour éviter toute tentative de fraude et de tripatouillage des résultats, il est impératif de réviser la loi électorale en vue d’ y introduire de nouvelles dispositions à savoir :
Etablissement de fichier électoral biométrique ;
Confection des cartes d’électeurs biométriques ;
L’attribution de l’organisation technique à une commission internationale composée par exemple des personnalités de l’Union Européenne, des Etats Unis, du Ghana et du Benin.
Ce dispositif introduit à titre exceptionnel pourra être levé après sa première mise en œuvre ;
La publication des résultats des élections après seulement 24h ou 48h au lieu de quinze jours.
Doctrouvé Euloge KOI
Master en Études de Paix et Sécurité
Ancien Directeur de Cabinet
Tél : 00236 72072299
Email : beafrika.dek@gmail.com
Consultant Indépendant auprès des Groupes Armés
Docteur en Science Politique