CENTRAFRIQUE : LA CAMPAGNE ÉLECTORALE RATTRAPÉE PAR DES DÉRAPAGES SÉCURITAIRES POSE LA PROBLÉMATIQUE DE LA SINCÉRITÉ ET DE LA LÉGITIMITÉ DU SCRUTIN. 

Publié le 18 décembre 2020 , 11:23
Mis à jour le: 18 décembre 2020 11:23 pm
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l'auteur de l'article. Photo de courtoisie.
Monsieur Bernard Selembi Doudou, l’auteur de l’article. Photo de courtoisie.

 

Bangui, République centrafricaine , samedi, 19 décembre 2020 ( Corbeaunews-Centrafrque). a notion émergente de la démocratie impose à toutes nations civilisées d’organiser des élections inclusives, apaisées, crédibles et transparentes en respectant les intervalles prévues par la loi fondamentale. C’est dans cette logique cartésienne que le chronogramme de l’Autorité Nationale des Élections (ANE) a prévu des élections présidentielles et législatives pour le 27 décembre 2020.

 

La campagne électorale a commencé depuis le 12 décembre mettant en concurrence dix sept (17) candidats pour les présidentielles et plus de mille cinq cent (1500) candidats pour les législatives. Ces différents candidats sont appelés à sillonner le territoire national à la rencontre de la population afin de solliciter leur suffrage. Force est de constater avec beaucoup de regret que le processus électoral piloté par le gouvernement via l’Autorité Nationale des Élections avait ignoré le volet sécuritaire qui représente le défi majeur de ce processus électoral. Les groupes armés non conventionnels qui, à l’occasion ont dénoncé les accords de Khartoum sèment la désolation et la psychose d’un coup d’état s’empare du pays.

Après des âpres combats avec les forces loyales, des morts se comptent par dizaines, des candidats aux élections braqués et dépouillés, des villages brûlés et déserts…tandis que dans la capitale qui jouit encore d’un semblant sécuritaire, la campagne continue au mépris du principe d’égalité des candidats devant les électeurs.

On remarque en conséquence de ce qui précède la banalisation de la vie humaine avec la cohabitation des morts et la continuation de la campagne électorale alors que les dispositions de l’article 1 de la constitution consacre le caractère sacré et inviolable de la vie humaine.

S’inscrivant dans la suite logique d’idée, l’article 5 de la constitution dispose que « la liberté de la personne est inviolable ». Considérant que certains compatriotes égoïstes et haineux se réjouissent de la déconfiture de la situation sécuritaire alors que d’autres s’alarment, le citoyen Lambda s’interroge :

Quel sera le sort d’une élection organisée dans des conditions sécuritaires aussi tendues ? Qui est politiquement et juridiquement responsable de cette déconfiture ? La communauté internationale qui encourageait les protagonistes à adhérer au processus électoral est-elle en partie responsable de ce chaos électoral ? Allons-nous assister dans les jours à venir à la suspension de la campagne électorale ou carrément au report du scrutin ? Existe-t-il une solution alternative pour palier à la carence collective du gouvernement et de la communauté internationale ? Pourquoi le système des Nations Unies en Centrafrique a t-il réduit ses opérations essentielles à l’intérieur du pays ? Ce comportement est-il un geste d’aveu ou alors une confirmation de l’échec du processus électoral ? Dorénavant, quel sera le sort de l’accord de Khartoum qui constitue la grosse bêtise du quinquennat ?

A défaut de reporter les élections, observant scrupuleusement la loi électorale centrafricaine et en l’absence de toutes formes de pressions, le conseil constitutionnel dans la plénitude de sa composition collégiale devrait invalider une élection groupée organisée dans des conditions sécuritaires aussi catastrophiques.

Nous saisissons l’opportunité pour marquer notre farouche opposition à la prise de pouvoir par les armes. Seule l’expression de la volonté souveraine du peuple demeure le mode exclusif de dévolution de pouvoir c’est à dire par la voie des urnes.

Fort de ce qui précède, il apparaît important de souligner qu’à défaut d’organiser des élections dans le respect des standards internationaux, nous invitons humblement le pouvoir qui n’a d’autorité que dans la capitale et sa périphérie de privilégier le dialogue et la concertation entre les acteurs centrafricains tel que proposé par un avis de la noble cour constitutionnelle…sauvons les meubles avant qu’il ne soit trop tard.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.

 

Paris le 18 décembre 2020.

Bernard SELEMBY DOUDOU.

Juriste, Administrateur des élections.

Tel : 0666830062.

 

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