mercredi, décembre 18, 2024
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Bambari : ces femmes évaporées dans la nuit, une ville hantée par ses disparues

Bambari : ces femmes évaporées dans la nuit, une ville hantée par ses disparues

 

Bambari : ces femmes évaporées dans la nuit, une ville hantée par ses disparues
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Par la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique.

 “Elle est sortie acheter du pain ce matin-là.” Florence caresse la photo jaunie de sa sœur Prisca, volatilisée depuis 847 jours. “Elle portait sa robe bleue, celle avec les fleurs. Elle m’a dit ‘je reviens tout de suite’. Depuis, le silence.” À Bambari, les disparitions de femmes s’accumulent, comme autant de trous noirs dans le cœur de la ville.

 

Dans le quartier Hadji, les habitants ont cessé de compter. Quinze femmes en six mois, peut-être plus. Elles s’évaporent sans bruit, avalées par une ville qui garde ses secrets. “Ma voisine Judith a disparu en allant au marché”, raconte Mariam, la voix tremblante. “Son panier a été retrouvé près du pont. Rien d’autre. Comme si la terre l’avait engloutie.”

 

Le commissariat de Bambari garde un registre macabre. “Disparue le 12 mars”, “Disparue le 27 avril”, “Disparue le 3 mai”… Des dates, des noms, des vies suspendues. “Nous enquêtons”, assure le commissaire. Mais dans son regard, une impuissance qui en dit long. Les dossiers s’empilent, les familles attendent, l’espoir s’effrite.

 

Angélique dirigeait un petit salon de coiffure. Un soir de juillet, elle a fermé sa boutique comme d’habitude. Le lendemain, son local était vide, sa porte grande ouverte. Sur sa table, un café froid à moitié bu. “Même son téléphone était encore là”, sanglote sa mère. “Ma fille ne serait jamais partie sans son téléphone. Jamais.”

 

Les rumeurs courent dans les ruelles. On parle de réseaux de traite, de rituels obscurs, de vengeances. Certains murmurent que des femmes ont été vues dans des véhicules aux vitres teintées. D’autres évoquent des cris entendus la nuit près de la rivière. Mais les preuves restent aussi insaisissables que les disparues.

 

“Le plus terrible, c’est de ne pas savoir”, confie Alice, dont la fille de 19 ans s’est évaporée il y a trois mois. “Est-elle vivante ? Souffre-t-elle ? Chaque nuit, je me réveille en pensant l’avoir entendue m’appeler. Chaque matin, son lit est vide.”

 

Un groupe de femmes a créé une association, “Les Mères en Quête”. Elles collectent les photos, notent les témoignages, arpentent les rues avec des portraits de leurs disparues. “On ne peut pas les laisser tomber dans l’oubli”, déclare Solange, leur porte-parole. “Tant qu’on parlera d’elles, elles existeront encore un peu.”

 

Dans sa petite maison, Florence garde toujours une assiette pour Prisca à l’heure du repas. “Les gens me disent que je suis folle, qu’il faut que j’accepte”, murmure-t-elle. “Mais comment accepter quand on ne sait rien ? Ma sœur n’est pas un fantôme. Elle était là, elle respirait, elle riait. Quelqu’un sait ce qui lui est arrivé. Quelqu’un doit savoir.”

 

À Bambari, la nuit tombe comme un voile de plomb. Dans chaque quartier, des mères, des sœurs, des filles guettent un retour improbable. Et le matin, quand les femmes sortent pour leurs courses, elles se demandent toujours : “Sera-ce mon tour aujourd’hui ?”​​​​​​​​​​​​​​​​

 

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