Quand le ministre Abazène déforme la décision de la CPI pour flatter le régime Touadéra

Rédigé le 20 octobre 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
Le gouvernement centrafricain à travers le ministre de la justice salue avec triomphalisme une décision de la Cour pénale internationale (CPI) qu’il interprète à sa convenance. Mais derrière les applaudissements officiels, la réalité juridique contredit le récit vanté par le ministre de la Justice, Arnaud Djoubaye Abazène, ancien chef rebelle devenu Garde des Sceaux.
Le 23 septembre 2025, le ministère de la Justice a publié un communiqué se félicitant que la CPI ait « reconnu la capacité de la Cour pénale spéciale (CPS) à juger Edmond Beïna ». Présentée comme une victoire nationale et un signe de « confiance » dans la justice centrafricaine, cette lecture relève davantage de la propagande que du droit.
La CPI n’a pas « salué » la justice centrafricaine. Elle a simplement rappelé le principe de complémentarité prévu par le Statut de Rome : si une juridiction nationale, ou hybride, comme la CPS, a déjà engagé des procédures crédibles, la CPI se dessaisit. Dans le cas Beïna, ce dernier est détenu depuis plusieurs années à la prison du camp de Roux par décision de la CPS, et les juges de La Haye n’ont fait qu’appliquer la procédure habituelle.
Ceci est vraiment une manipulation politique. Le communiqué officiel du ministère de la justice transforme cette règle technique en une validation politique du régime Touadéra. « La justice centrafricaine a atteint un niveau de satisfaction remarquable », ose écrire le ministère, allant jusqu’à présenter la décision comme une « marque de confiance » de la communauté internationale.
En réalité, la justice centrafricaine est une juridiction sous tutelle russe, totalement soumise au groupe Wagner. Ce sont les mercenaires russes qui décident des peines, qui interviennent dans les prisons, qui libèrent ou enferment selon les ordres du pouvoir.
Le cas du ministre Hassan Bouba, ex-chef rebelle de l’UPC et aujourd’hui ministre, démontre cette dérive. Arrêté par la CPS sur décision judiciaire, il avait été incarcéré à la prison du camp de Roux avant d’être libéré de force par Wagner une semaine plus tard, sous le regard complice du Président Touadera. Malgré cette affaire scandaleuse, Hassan Bouba a retrouvé son poste au gouvernement deux jours après sa libération, preuve éclatante que la justice centrafricaine n’a aucune autorité réelle face aux instructions russes.
En plus, le ministre de la Justice est aussi sans légitimité morale. La mise en scène organisée par Arnaud Djoubaye Abazène illustre cette dérive. L’ancien chef rebelle de la Séléka, recyclé au gouvernement, instrumentalise chaque occasion pour se présenter en gardien de l’État de droit. Pourtant, les prisons centrafricaines regorgent de détenus politiques et d’opposants arrêtés sans procès équitable. L’enlèvement de l’ancien ministre Armel Sayo le 7 juillet 2025 durant 30 jours, puis depuis le 15 septembre 2025 reste, à ce jour, sans explication crédible.
À l’inverse, des figures proches du régime bénéficient d’une impunité totale, malgré des accusations graves de crimes de guerre ou de corruption. Cette réalité contraste avec les déclarations officielles d’un « combat contre l’impunité ».
Ce que la CPI a fait dans l’affaire Beïna n’est pas un hommage à Bangui, mais une délégation de procédure à une juridiction hybride déjà saisie du dossier. Le présenter comme une consécration revient à tromper délibérément l’opinion publique.
Derrière l’autocongratulation du communiqué ministériel se cache une vérité embarrassante : la justice centrafricaine, loin d’être souveraine, fonctionne sous influence étrangère et au rythme des rapports de force politiques. Que vaut une telle « reconnaissance » quand la CPS se fait humiliée par Wagner au point de voir ses prisonniers libérés de force et ses juges réduits au silence ?
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