CENTRAFRIQUE : UN SYSTÈME DE TRAÇABILITÉ DES DIAMANTS MINÉ PAR SES CONTRADICTIONS
Par la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique.
La République centrafricaine présente un dispositif complexe de contrôle de ses diamants, mais l’analyse du rapport 2022 du Processus de Kimberley révèle un système aux failles béantes, particulièrement exploitées par le groupe Wagner.
Une bureaucratie inefficace face au groupe Wagner
Le système de traçabilité centrafricain repose sur une cascade de documents : registres de production pour les artisans, bordereaux d’achat pour les collecteurs, fiches de transfert pour les déplacements de colis. “Un système qui produit plus de paperasse que de contrôle effectif”, commente un observateur centrafricain du secteur minier.
Selon le rapport officiel, chaque transfert de diamants doit se faire dans des sachets inviolables accompagnés d’une fiche détaillée. Le Bureau d’Évaluation et de Contrôle du Diamant et de l’Or (BECDOR) expertise ensuite les lots avant leur exportation. Sur le papier, la traçabilité semble parfaite.
Des zones des diamants conformes très limitées
Le rapport indique que seules huit zones sont déclarées “conformes” au Processus de Kimberley en 2022. Une limitation géographique qui laisse de vastes territoires hors contrôle, notamment dans l’est, l’ouest et centre du pays où, selon le document lui-même, “toute la production quitte le pays par la fraude et la contrebande”.
Les chiffres officiels sont révélateurs : seulement 252 collecteurs agréés et 930 artisans miniers enregistrés dans les zones conformes. Des nombres dérisoires au regard de l’activité minière réelle du pays, particulièrement depuis l’implantation du groupe Wagner qui contrôle de nombreux sites d’extraction.
Un contrôle à géométrie variable des diamants centrafricains
La délivrance des certificats du Processus de Kimberley illustre ces contradictions. Si le rapport détaille une procédure rigoureuse nécessitant trois signatures (BECDOR, Douanes et Secrétariat Permanent), il reste silencieux sur les moyens de contrôle effectifs sur le terrain.
L’ombre de Wagner
Si le rapport officiel reste discret sur la question, l’influence croissante du groupe Wagner dans le secteur minier compromet l’efficacité du système de traçabilité. De nombreux sites miniers sont devenus inaccessibles aux services de contrôle de l’État, même avec le ministre lui même.
Le rapport reconnaît d’ailleurs que “la situation de la fraude et de la contrebande reste un défi pour les zones de productions”. Une litote qui masque mal l’ampleur du problème, particulièrement dans les zones sous influence russe.
Des réformes en trompe-l’œil
La création en avril 2022 d’un Groupe de Travail Sectoriel contre la fraude n’a produit aucun résultat tangible. Les ateliers de consultation organisés dans les régions minières semblent avoir eu peu d’impact sur le terrain.
Les chiffres officiels 2022 :
- 115.522,38 carats exportés légalement
- 31 certificats Kimberley délivrés
- 8 zones conformes seulement
- 252 collecteurs agréés
- 930 artisans miniers enregistrés
La République centrafricaine se trouve ainsi dans une situation paradoxale : un système de traçabilité théoriquement rigoureux mais pratiquement inefficace, particulièrement face aux acteurs qui opèrent hors du cadre légal, comme le groupe Wagner et les rwandais. Sans une refonte profonde du dispositif et un réel contrôle sur l’ensemble du territoire, la traçabilité des diamants centrafricains restera largement fictive.
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