Centrafrique : Valse d’appels à mobilisation pour l’accueil de Antonio Guterres
Bangui, le 24 octobre 2017.
Par : Fred Krock, CNC.
L’on assiste ces derniers temps à une valse d’appels à mobilisation de tous les centrafricains, les Banguissois en particulier pour accueillir le patron de l’Onu, Antonio Guterres, qui arrive ce mardi 24 octobre 2017, dans la capitale centrafricaine. Partis politiques, Présidence de la République, Organisations gouvernementales et non-gouvernementales souhaitent bien accueillir Guterres en Centrafrique dans la traditionnelle hospitalité légendaire reconnue aux Centrafricains. Ces appels à mobilisation se justifieraient sans nul doute par la préoccupation toujours profonde et pressante quant à l’insécurité qui tend à devenir chronique dans plusieurs localités de Centrafrique.
D’ailleurs Guterres lui-même, dans un dernier message à l’intention du peuple centrafricain lancé avant son arrivée à Bangui, a reconnu qu’« il est tragique que la détérioration de la situation sécuritaire au cours des derniers mois, notamment dans le sud-est, mette le pays à nouveau dans un cycle de violences en dépit des efforts multiples pour éviter une aggravation du conflit », souligne le patron de l’Onu qui fait savoir que face à cette situation, « je recommande une augmentation de 900 personnels militaires à la Minusca », qui compte aujourd’hui un peu plus de 10.000 Casques bleus.
Il est vrai dans un premier temps, la Société civile, à travers le Groupe de travail de la société civile (GTSC) a lancé un mot d’ordre au peuple centrafricain d’observation de trois jours de deuil national, en la mémoire des victimes de la crise en RCA, notamment du 24 au 27 octobre – date de séjour de Guterres en Centrafrique. « Par rapport à l’opération menée par la Minusca pour libérer la ville Bocaranga assiégée par la rébellion des 3R, nous comprenons qu’elle a les moyens et la capacité de mettre de l’ordre dans ce pays […] Malheureusement, elle (Minusca) ne le fait pas. Nous demandons à la Minusca d’en faire autant pour toutes les villes du pays », indique Cressent Béninga, Porte-parole du GTSC qui annonce en même temps : « Pour cela, du 24 au 27 octobre prochain, nous demandons à tous les Centrafricains d’observer trois jours de deuil national à la mémoire des Centrafricains massacrés et qui continuent d’être massacrés ».
Le Conseil national de la jeunesse (CNJ) qui rame dans le même sens que le GTSC n’a pas demandé de journées de deuil, mais a exprimé des exigences très fermes vis-à-vis des Nations unies, en particulier de la Minusca et le gouvernement. Dans une déclaration faite ce samedi 21 octobre, Francis Mongombet, Président du CNJ a fait savoir que les jeunes « exigent à la Minusca d’appliquer strictement les résolutions, 2127/2149 en prenant toutes les mesures possibles pour protéger la population et ramener à la raison les groupes armés ; exigent au gouvernement de garantir la sécurité des populations et d’accélérer le redéploiement sans condition des FACA ; exigent aux groupes armés le respect des différents accords de cessation des hostilités et le respect du processus du DDRR ».
Les appels à mobilisation
Le parti politique ‘’Mouvement de libération du peuple centrafricain (Mlpc)’’ de Martin Ziguélé a été le premier à ouvrir le bal, le 17 octobre dernier à travers une déclaration signée de son Porte-parole Christophe Ndouba. « Le Bureau politique du Mlpc appelle tous les militants du parti, ainsi que tous nos compatriotes épris de paix et de l’unité nationale à se mobiliser massivement pour réserver un accueil digne de la tradition hospitalière centrafricaine au nouveau Secrétaire général des Nations unies, qui honore notre pays en lui réservant sa première visite, à la suite de son prédécesseurs Ban Ki Moon et Sa Sainteté le Pape François », peut-on lire dans la déclaration du Mlpc dont Anadolu a eu copie.
La Coordination des comités de soutien au Président de la République, Pr Faustin Archange Touadera n’a pas tardé à emboiter les pas. Mais, elle a commencé par mettre en garde tous ceux qui tenteraient de boycotter la visite du Secrétaire général, notamment le GTCS qui entend organiser les journées de deuil ponctuées par des concerts de casseroles à partir de 18 heures. « La Coordination des comités de soutien au Pr Faustin Touadera s’étonne de la prise de position du GTSC qui vise à fragiliser davantage le faible équilibre sociopolitique et économique que le pays connait, et s’insurge avec la dernière énergie contre de telles agitations », ainsi a affirmé M. Blaise Didacien Kossimatchi Porte-parole de la Coordination des comités de soutien du chef de l’Etat, ce samedi 22 octobre dans une déclaration faite à la presse. « Nous en appelons une fois de plus à la vigilance de chaque centrafricaine et chaque centrafricain pour barrer la route à ces apprentis sorciers en mal du pouvoir », prévient Didacien Kossimatchi qui met en garde ceux qu’il appelle les « instigateurs de ces agissements » qui devront de toute manière endosser toute la responsabilité des dérapages et autres dommages que leurs actions pourront occasionner.
Kossimatchi appelle également la jeunesse, les femmes et ceux qu’il appelle « la vraie société civile » de ne pas laisser « ces tontons macoutes », mais de « sortir massivement aux abords des Avenues des Martyrs, Conjugo et Boganda pour accueillir leur hôte de marque Antonio –Guterres, Secrétaire général des Nations unies », a-t-il conclu.
Le malheureux candidat à la présidentielle de 2016, Désiré Nzanga Kolingba Bilal, et président du Parti ‘’Rassemblement démocratique centrafricain (Rdc)’’ vient juste de faire sa déclaration relative à cette visite de Guterres. Lui-aussi appelle à une mobilisation pour accueillir Guterres, mais et surtout pour lui poser des questions visant « l’action de certains contingents de la Minusca qui pose le problème de leur impartialité ; leur réaction inadaptée au terrain qui pose le problème de leur efficacité ; l’absence de réaction appropriée des forces spéciales de la Minusca l’égard des tueries de masse perpétrées depuis six mois dans le Centre-est e le Sud-est du territoire national, notamment à Ippy, Bria, Alindao, Zangba, Mobaye, Bangassou, Gambo, Zémio, Kembé, Pombolo…, ayant entrainé la disparition des villes et villages par suite d’exode des populations ».
C’est le même son de cloche du côté des Organisations de défense des droits de l’homme. Me Mathias Barthelemy Morouba, Porte-parole de cinq Organisations de défense des droits de l’homme a fait une déclaration sur cette visite de Guterres ce lundi 23 octobre à Bangui. « Comme tout Africain, nous appelons les Centrafricains à accorder un accueil hospitalier au Secrétaire général des Nations unies dans notre pays. C’est l’ultime occasion pour nous de lui poser nos problèmes réels, mais aussi c’est une possibilité pour attirer l’attention du monde entier sur les problèmes en Centrafrique ».
Cependant, le centrafricain lambda garde un scepticisme quant à la visite du patron de l’Onu. Bienvenu Paya est étudiant en Journalisme : « Nous avons reçu beaucoup de visites de hautes personnalités, à savoir Ban Ki Moon, le Pape François, etc. mais on est toujours dans la crise. Ce ne serait pas Antonio Guterres qui nous sortira de cette situation ».