Touadera, regarde à Moungoumba : comment les centrafricains musulmans sont discriminés pour la carte nationale d’identité

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Touadera, regarde à Moungoumba : comment les centrafricains musulmans sont discriminés pour la carte nationale d’identité

 

inscription mural Hôtel de Ville de Moungoumba, dans la préfecture de la Lobaye, dont le chef lieu est Mbaïki

 

À Moungoumba, les centrafricains de confession musulmane, pourtant en possession  de leurs actes de naissance originaux, se voient exiger un certificat de nationalité contrairement aux autres candidats non musulmans.

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

La discrimination religieuse en République centrafricaine prend une dimension spectaculaire et inquiétante sur le terrain. Après les cas signalés à Zawa, Bocaranga, Paoua et ailleurs, c’est à Moungoumba, dans la préfecture de la Lobaye, à 189 kilomètres au sud-ouest de Bangui et à la frontière avec le Congo, qu’une nouvelle affaire d’exclusion administrative, visant exclusivement les citoyens musulmans,  vient alimenter les tensions.

 

Il y’a quelques mois, le pragmatique député de la circonscription a négocié avec la société Almadina pour déployer ses agents dans cette localité enclavée. L’objectif était de faciliter l’accès à la carte nationale d’identité pour les habitants souvent harcelés aux postes de contrôle militaire lors de leurs déplacements vers les centres administratifs.

 

L’annonce de cette mission s’est faite de manière traditionnelle. Dès 4 heures du matin, les chefs de village et de quartier ont parcouru les rues en criant à tue-tête pour mobiliser la population : “Venez faire votre carte nationale d’identité ! Les agents de la société Almadina sont arrivés ! Il suffit d’avoir votre acte de naissance, c’est largement suffisant !”.

 

Le lendemain, une foule importante s’est massée devant le lieu d’enrôlement. Les candidats se présentaient avec leurs documents : certains brandissaient des actes de naissance originaux, d’autres de simples photocopies, parfois même des pièces visiblement falsifiées. Le processus semblait fluide. Les gens faisaient la queue, entraient pour les formalités, se faisaient photographier et ressortaient, créant un va-et-vient constant.

 

Parmi cette foule, il y’a un groupe de quatre jeunes musulmans qui a vécu une expérience radicalement différente. Arrivés avec leurs actes de naissance originaux,  pas des copies,  ils ont été immédiatement interpellés par les agents chargés de ramasser les dossiers.

 

“Non, pour vous, il faut aller à Mbaïki, chef-lieu de la préfecture, à plusieurs kilomètres d’ici. Vous devez d’abord obtenir un certificat de nationalité. Quand vous reviendrez avec ce document, nous pourrons vous confectionner la carte”.

 

Les quatre jeunes, interloqués, ont fait remarquer aux agents l’incohérence :

 

“Mais attention, quelle est cette histoire ? Nous ne sommes que quatre parmi toute cette foule. Il y a des gens qui présentent des photocopies d’actes de naissance, d’autres n’ont même pas de vrais documents, mais vous les servez. Nous, nous apportons nos originaux, mais vous nous bloquez uniquement parce que nous avons des noms musulmans“.

 

Devant cette contestation, les agents ont maintenu leur position :

 

“Ce n’est pas notre décision personnelle. C’est une directive qui vient de Bangui, de notre hiérarchie. Nous ne pouvons pas faire autrement“.

 

Troublés par cette situation, les quatre jeunes se sont rendus au commissariat de police de Moungoumba pour exposer leur cas au commissaire.

 

“Il y a une foule qui est venue déposer ses dossiers, mais nous quatre, parce que nous avons des noms musulmans, on nous refuse le service”, ont-ils expliqué au commissaire.

 

Le commissaire, estimant la situation anormale, a pris leurs documents et s’est rendu personnellement auprès des agents chargés de réceptionner les dossiers pour tenter une médiation. La réponse a été identique :

 

“C’est une décision qui vient de Bangui, de nos supérieurs. Nous ne pouvons pas déroger à cette instruction. Il leur faut absolument le certificat de nationalité“.

 

Malgré les efforts de négociation du commissaire, les agents sont restées inflexibles. De retour au commissariat, le policier a remis les documents aux jeunes en leur confirmant le refus des agents.

 

L’enquête menée sur place par l’équipe du CNC a permis de constater même des incohérences. Des ressortissants de la République démocratique du Congo, munis de documents manifestement fabriqués mais portant des noms à consonance chrétienne, ont pu obtenir leur enrôlement sans difficulté. Pendant ce temps, des Centrafricains nés sur le territoire national se voyaient compliquer l’accès à leurs droits civiques.

 

Pour renforcer leur dossier, les quatre jeunes avaient même apporté les cartes d’identité et actes de naissance de leurs pères, tous natifs du village. Ces pièces supplémentaires n’ont pas suffi à fléchir la position de ces agents  .

 

“Il faut que vous obteniez vous-mêmes le certificat de nationalité“, ont persisté les agents, créant une discrimination manifeste.

 

Cette affaire montre clairement comment certaines pratiques administratives alimentent les frustrations. Quand des citoyens subissent de telles injustices, ils développent naturellement de la colère et du ressentiment. Puis, lorsque certains basculent dans des comportements extrêmes, on les qualifie rapidement de rebelles, de voyous ou de criminels, sans analyser les causes profondes de leur radicalisation.

 

L’incident de Moungoumba s’inscrit dans une série de cas similaires qui minent la cohésion sociale centrafricaine. Ces discriminations administratives, loin d’être anecdotiques, révèlent un problème structurel qui dépasse les simples dysfonctionnements bureaucratiques. Elles nourrissent un sentiment d’exclusion qui peut pousser une partie de la jeunesse vers des voies dangereuses pour la stabilité du pays.

 

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