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Soldats FACA hors de contrôle : Un policier sauvagement agressé à Paoua

Soldats FACA hors de contrôle : Un policier sauvagement agressé à Paoua

 

des soldats FACA lors d'une patrouille
des soldats FACA lors d’une patrouille

 

Dans la préfecture de Lim -Pendé, à quelques kilomètres de Paoua, un incident choquant vient de mettre en lumière la dérive de certains éléments des Forces armées centrafricaines (FACA). Le 15 juin dernier, des soldats ont violemment agressé un policier qui leur rappelait l’interdiction d’opérer sur une barrière routière. Cet acte de brutalité soulève de graves questions sur le respect de l’autorité de l’État et la persistance des barrières illégales à travers le pays.

 

Bangui, 22 juillet 2024.

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique.

 

Le calvaire des barrières : un fléau ancien.

 

Depuis des années, les routes centrafricaines sont parsemées de barrières illégales. De Bangui à Béloko, de Bria à Obo, en passant par Birao, Ndélé, Bouar, Berberati ou encore Mbaïki, ces points de contrôle improvisés sont devenus le symbole de l’oppression quotidienne des citoyens.

 

À chaque barrage, c’est le même rituel : contrôle d’identité systématique, fouille des véhicules, et surtout, exigence de paiement d’une “formalité”. Cette taxe arbitraire peut varier de 500 à 10 000 FCFA, voire plus pour les poids lourds. Certains agents vont jusqu’à inventer une “taxe de désarmement” pour éviter aux camionneurs le déchargement complet de leur cargaison.

 

Pour les transporteurs, c’est un véritable cauchemar. Un chauffeur de Bangui témoigne : “Sur la route de Bouar, j’ai dû m’arrêter plus de dix fois. À chaque barrière, c’est la même rengaine : ‘Chef, il faut faire les formalités’. Si tu refuses, ils peuvent te bloquer pendant des heures”.

 

Les tentatives de régulation : entre espoir et désillusion.

 

Face à l’exaspération grandissante de la population, le président Faustin-Kongoboro a fini par réagir. En début d’année, il a signé un décret listant officiellement les barrières légales et illégales. Une décision saluée par de nombreux observateurs, qui y voyaient enfin un pas concret vers la fin de ce racket institutionnalisé.

 

Dans la foulée, le Premier ministre Félix Moloua a mis en place une brigade anti-corruption. Sa mission : parcourir le pays pour démanteler les barrières illégales. L’initiative a donné un certain espoir, notamment dans les villes de province où les habitants subissent quotidiennement ces contrôles abusifs.

 

Malheureusement, l’enthousiasme a été de courte durée. Malgré le passage de la brigade dans plusieurs régions, de nombreuses barrières ont rapidement réapparu. Pire encore, certains éléments des forces de l’ordre, en particulier des FACA, semblent ouvertement défier les directives gouvernementales.

 

Un policier sauvagement agressé à Paoua.

 

C’est dans ce contexte tendu qu’est survenu l’incident de Paoua. À trois kilomètres de la ville, sur l’axe menant à Bétoko, une barrière avait été officiellement autorisé par la brigade anti-corruption. Mais la décision est que les soldats FACA n’étaient plus censés y effectuer de contrôles.

 

Pourtant, le 15 juin, des militaires y étaient toujours postés, arrêtant les véhicules et exigeant des paiements. Lorsqu’un policier leur a rappelé l’interdiction d’opérer à cet endroit, la situation a dégénéré. Les soldats se sont jetés sur lui, le frappant violemment à coups de crosse. Grièvement blessé, l’agent a dû être transporté d’urgence à l’hôpital de Paoua.

 

Un témoin de la scène raconte : “C’était horrible à voir. Ils l’ont roué de coups comme s’il était un vulgaire criminel. Son uniforme était couvert de sang. Tout ça parce qu’il leur rappelait la loi”.

 

Un policier sauvagement agressé à Paoua, un système mafieux bien rodé.

 

Cette agression dévoile aux yeux du monde un problème plus profond : l’existence d’un véritable système mafieux au sein de certaines unités des FACA. Les sommes récoltées aux barrières ne disparaissent pas dans la nature. Une partie remonte jusqu’à Bangui, où elle sert à enrichir des officiers haut placés.

 

Un ancien soldat, sous couvert d’anonymat, explique : “C’est un secret de polichinelle. Chaque semaine, une partie de l’argent est envoyée aux chefs à Bangui. Avec ça, ils se construisent des villas, achètent des voitures de luxe. Pendant ce temps, nous, les simples soldats, on vit dans la misère”.

 

Ce système pervers crée une incitation perverse à maintenir les barrières illégales, malgré les ordres venus d’en haut. Pour beaucoup de soldats mal payés, c’est devenu un moyen de survie. Pour leurs supérieurs, c’est une véritable rente.

 

L’urgence d’une réponse forte.

 

Devant une telle situation alarmante, de nombreuses voix s’élèvent pour exiger une réaction ferme du gouvernement. Maître Symphorien Balemby, avocat spécialisé dans les droits humains, estime qu’il faut frapper fort : “Il ne suffit plus de démanteler les barrières. Il faut des sanctions exemplaires contre les soldats qui désobéissent, et surtout, il faut s’attaquer aux têtes du réseau à Bangui”.

 

Pour restaurer la confiance des citoyens, c’est tout le système qui doit être repensé. Cela passe par une refonte en profondeur de la chaîne de commandement, mais aussi par une amélioration des conditions de vie des soldats pour réduire la tentation de la corruption.

 

L’incident de Paoua doit servir d’électrochoc. Sans une action déterminée, c’est la crédibilité même de l’État centrafricain qui est en jeu. Les citoyens ne peuvent plus accepter d’être rançonnés et brutalisés par ceux-là mêmes qui sont censés les protéger. L’avenir du pays en dépend.

 

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