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Sénégal: le Président Macky Sall entre la fidélité à ses alliances diplomatiques et sa foi de musulman

Corbeau News Centrafrique: 20-01-2015.

Président Macky Sall du Sénégal
Président Macky Sall du Sénégal

Le Président entre la fidélité à ses alliances diplomatiques et sa foi de musulman

Convenons-en : la position du président de la République ne doit pas être confortable actuellement. Partagé par sa fidélité à son alliance, en tant que président de la République du Sénégal, avec la France, et sa foi de musulman que les caricatures de « Charlie Hebdo » heurtent forcément, il marche sur des braises et est contraint à un subtil jeu d’équilibre. Et ce pour ne pas être accusé de lâchage par une puissance dont, quoi que l’on dise, l’amitié avec le Sénégal n’a jamais été prise à défaut, mais aussi pour ne pas être taxé d’ « hérétique », à tout le moins, par nos compatriotes qui sont à 95 % musulmans. Dans son livre autobiographique, le président Abdou Diouf raconte d’ailleurs qu’en 30 ans de présence au plus haut sommet de l’Etat, en tant que Premier ministre puis président de la République, il n’avait souvenance que d’une seule fois où il a semblé y avoir un malentendu entre Marianne et le Sénégal, deux pays dont l’amitié se perd dans la nuit des temps et date de l’époque où le premier a colonisé ce qui allait être le second. Par conséquent, évidemment, aucun président du Sénégal ne saurait rester sourd à l’appel de la France, surtout si ce pays est frappé au cœur par un terrorisme hideux. Pendant les deux grandes guerres, l’alors colonie avait envoyé ses tirailleurs combattre aux côtés des forces de la Métropole. Engagé actuellement aux côtés de la France au Mali pour combattre un terrorisme djihadiste à travers un contingent de 1000 hommes, partie prenante de tous les combats contre le même terrorisme dans la zone du Sahel — à preuve par sa récente participation au sommet des pays sahélo-sahariens sur le terrorisme tenu à Nouakchott —, le président Macky Sall ne pouvait pas manquer à l’appel du devoir de solidarité avec la France. Et, donc, battre le pavé parisien aux côtés — ou derrière ! — son homologue français François Hollande. Lequel avait tenu à réserver au Sénégal sa première visite sur le continent africain en tant que président de la République nouvellement élu. Et avait pesé de tout son poids dans la balance pour que le Sénégal accueille, en lieu et place du Vietnam qui s’y voyait déjà, le XVème sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie. Sans compter que, lorsqu’il a trouvé les caisses vides à son arrivée au pouvoir en avril 2012, c’est vers la même France que le président Sall s’était tourné et avait obtenu un prêt de 80 milliards de francs cfa environ. De quoi voir venir.

Alors, lorsque cette France a été touchée par des attentats, le même président Sall, n’écoutant que l’élan de son cœur, y a couru tête baissée pour soutenir ce pays ami du Sénégal. En y allant pour défendre la liberté d’expression contre le terrorisme, il ne savait sans doute pas qu’on le ferait défiler derrière une banderole proclamant « Je suis Charlie ». Ce qui est fâcheux, si l’on sait que le « Charlie » en question est un journal connu pour ses insultes envers l’Islam et son Prophète. Du coup, en tant que chef d’Etat d’un pays dont la population est musulmane à 95 %, le président Macky Sall courait le risque d’être accusé de pactiser avec les mécréant et les kafirs. Ce qui n’a pas tardé du reste. Et c’est vrai qu’il a été pour le moins maladroit en allant participer à cette marche officiellement républicaine mais dont les véritables soubassements et le message subliminal, c’était de soutenir les ennemis de l’Islam, ceux-là mêmes qui ont choisi de tourner cette religion en dérision et son Prophète, en bourrique.

Disons-le, les oreilles du président de la République ont sifflé ces jours-ci et il a senti passer de près le vent du boulet. A travers les réseaux sociaux, les ondes des radios et les fameux « wakh sa khalat », il en a entendues des vertes et des pas mûres car le fait de s’afficher ostensiblement aux côtés de la France au moment où celle-ci demande aux dessinateurs de « Charlie Hebdo » de remettre ça dans les insultes au Prophète, est assurément plus qu’une erreur, une faute de jugement !

Ce même si, par la suite, il a posé des actes très forts qui le rachètent aux yeux des Sénégalais. Le premier, c’est de s’être rendu à Aïn-Mahdi, dans la wilaya de Laghouat, en Algérie, berceau de la Tidjanya car lieu de naissance de Cheikh Ahmed At-Tidjani, le fondateur de cette plus importante confrérie musulmane sénégalaise. De s’être recueilli à l’endroit même où est né ce saint homme et d’y avoir prié pour le Sénégal, montrent s’il en était besoin que les descendants algériens de ce saint homme n’ont pas vu malice dans le déplacement français du président de la République. Mieux, cette visite à Aïn Mahdi n’a pu que mettre du baume au cœur de tous les Tidianes du Sénégal.

Enfin, en décrétant l’interdiction formelle de la diffusion des journaux français « Libération » et « Charlie Hebdo » contenant les caricatures blasphématoires, il montre qu’il ne plaisante pas avec le respect de la religion musulmane et qu’il ne tolère pas qu’il soit porté atteinte à sa foi en tant que musulman. Délicat jeu d’équilibre dans lequel on espère — on souhaite même — qu’il ne laissera pas beaucoup de plumes !

 

MAMADOU OUMAR NDIAYE

Article paru dans « Le Témoin » quotidien sénégalais ( Janvier 2015)

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