Ngoutéré : quand l’armée devient le cauchemar des civils

 

des soldats FACA lors d'une patrouille
des soldats FACA lors d’une patrouille

 

Bangui, CNC. À Ngoutéré, petit village situé à 45 km de Bocaranga, dans la préfecture de l’Ouham-Pendé, la population vit un enfer quotidien. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce ne sont pas les groupes rebelles qui terrorisent les habitants, mais bien les Forces armées centrafricaines (FACA) et leurs alliés russes, censés les protéger. Une enquête menée par la rédaction du CNC sur place révèle une situation catastrophique où les exactions commises par les forces gouvernementales ont détruit complètement la confiance des habitants.

 

Des attaques rebelles à répétition : un symptôme d’un problème plus profond.

 

Au cours de cette année 2024, Ngoutéré subit plusieurs attaques fréquentes menées par des groupes armés de la coalition des patriote pour le changement (CPC) contre les positions des FACA. Ces assauts répétés posent sérieusement de question : pourquoi les rebelles s’acharnent-ils sur ce village en particulier ? La réponse, aussi choquante qu’inattendue, se trouve dans le comportement des soldats FACA et des mercenaires russes envers la population civile.

 

Un habitant de Ngoutéré, sous couvert d’anonymat, explique : “Les rebelles attaquent ici parce qu’ils savent que la population ne soutiendra pas les FACA et leurs alliés russes du groupe Wagner. Avec tout ce que l’armée nous a fait subir, beaucoup préfèrent voir les rebelles que nos propres soldats“.

 

Kidnappings et meurtres : le quotidien macabre de Ngoutéré.

 

L’un des exemples les plus révoltants des exactions commises par les forces gouvernementales s’est déroulé entre le 15 et le 18 juillet dernier. Les mercenaires russes et les soldats FACA ont enlevé six jeunes civils du village, sans aucun lien avec les groupes armés.

 

“Parmi les kidnappés, il y avait un homme que tout le monde connaît ici. Il n’a jamais rien fait de mal, mais les FACA lui avaient déjà coupé une oreille en 2022”, raconte un témoin du village. “Cette fois, les russes avec les FACA l’ont arrêté avec cinq autres personnes. À peine un kilomètre après la sortie du village, ils l’ont abattu froidement devant les autres otages”.

 

Le sort des cinq autres détenus n’a guère été plus enviable. Ils n’ont été libérés qu’après plusieurs semaines dans la prison des russes à Bouar, et que leurs parents aillent verser un paiement d’une rançon d’un million de francs CFA par tête. “Les familles ont dû emprunter à droite et à gauche pour réunir la somme. C’est un véritable racket organisé par ceux qui devraient nous protéger”, dénonce un parent d’otage.

 

La vengeance aveugle des FACA : un village entier pris pour cible.

 

La situation ne cesse d’empirer à Ngoutéré. Lors d’une récente attaque rebelle de la CPC le 11 septembre dernier, les soldats FACA, mis en déroute, 5 d’entre eux se sont cachés chez une famille dans le village même sans que les rebelles ne sachent. Mais contre toute attente, la nuit du 11 au 12 septembre, ils sont sortis de leur cachette et vont se venger sur des civils totalement innocents.

 

Un rescapé témoigne, la voix tremblante : “Après l’attaque, certains soldats FACA avaient fui dans la forêt, d’autres s’étaient cachés chez des villageois comme des rats peureux dans un trou. Ils attendaient la nuit pour aller se venger sur un vieux papa musulman, très respecté dans notre communauté. Ils ont défoncé sa porte. Ils l’ont tué, ainsi que sa femme et ses enfants. Toute la famille a été massacrée avant que les soldats ne s’enfuient vers Bocaranga sur des motos “.

 

Ce massacre n’est malheureusement pas un cas isolé. Des exactions similaires sont signalées dans d’autres localités comme Paoua, Bozoum, Sam-Ouandja, Bria  ou Bocaranga. L’intégration dans l’armée d’anciens rebelles, mal formés et non rééduqués, explique en partie ce comportement violent qui persiste.

 

La population de Ngoutéré prise au piège.

 

Face à cette situation invivable, les habitants de Ngoutéré et des villages environnants se retrouvent coincés entre le marteau et l’enclume. Censés être protégés par leur armée nationale, ils en sont devenus les principales victimes.

 

“On ne sait plus vers qui se tourner“, confie une mère de famille. “Si on collabore avec les FACA, on risque d’être ciblé par les rebelles. Si on ne le fait pas, ce sont les soldats qui nous punissent. On vit dans la peur constante”.

 

Cette perte totale de confiance envers les FACA crée un vide sécuritaire que les groupes rebelles s’empressent d’exploiter. Certains habitants vont jusqu’à affirmer que la présence rebelle est parfois préférable à celle de l’armée nationale.

 

Un échec cuisant pour le gouvernement.

 

L’incapacité du gouvernement à contrôler ses propres forces et à garantir la sécurité des civils remet en question la légitimité même de l’État dans ces régions reculées. À Ngoutéré, comme dans de nombreux autres villages, l’autorité de Bangui n’existe plus que sur le papier.

 

Un chef communautaire à Bocaranga, désabusé, conclut : “On nous parle de paix, de réconciliation, mais comment faire confiance à un État qui laisse ses propres soldats nous terroriser ? Si rien ne change, Ngoutéré et tous les villages comme le nôtre seront bientôt des zones de non-droit total”.

 

Urgence d’agir pour Ngoutéré et au-delà.

 

La situation à Ngoutéré est symptomatique d’un problème bien plus large qui gangrène l’ensemble du pays. Sans une réforme en profondeur des FACA, incluant une meilleure formation, un contrôle strict des comportements et des sanctions exemplaires pour les auteurs d’exactions, la spirale de violence risque de s’amplifier.

 

Pour les habitants de Ngoutéré, l’urgence est immédiate. Des mesures de protection doivent être mises en place rapidement pour éviter de nouveaux drames. La communauté internationale, déjà impliquée dans le processus de paix en Centrafrique, doit prendre conscience de ces dérives et faire pression sur le gouvernement pour qu’il agisse.

 

Le cas de Ngoutéré n’est que la partie visible d’un iceberg de souffrances qui menace de faire sombrer tout espoir de paix durable en République centrafricaine. Il est temps que les autorités prennent leurs responsabilités avant qu’il ne soit trop tard.

 

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