Rédigé par Adama Bria
Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le jeudi 5 mai 2022
Bangui (CNC) – Chaque année, le 3 mai est reconnu comme la journée internationale de la liberté de la presse. A cette occasion, on attend avec intérêt la publication par l’organisation non gouvernementale (ONG) Reporters sans frontière du classement mondial de la liberté de la presse, avec une même question dans tous les esprits des salles de rédaction du pays : où en est la Centrafrique ?
Un petit retour en arrière s’impose. Sur un total de cent quatre-vingts (180) Etats, la Centrafrique se classait cent-douzième en 2018, avant de dégringoler à la 145ème place en 2019 ! Quel maléfice s’était donc abattu en si peu de temps sur la terre de Boganda ? On se souvient que c’est, précisément, cette année-là que s’étaient progressivement répandus les mercenaires russes de Wagner. Leur présence soudaine dans le pays avait même piqué la curiosité de journalistes russes, qui étaient alors venus enquêter sur leurs compatriotes, avant d’être assassinés froidement, en août 2018, dans la région de Sibut. Qui étaient les mystérieux meurtriers ? Quels furent les mobiles du crime ? Malheureusement, l’enquête semble aujourd’hui belle et bien enterrée, le gouvernement se contentant d’évoquer un « crime crapuleux », alors qu’une investigation indépendante, qui repose sur l’étude du procès-verbal de la gendarmerie, a montré que les journalistes ont bien été la cible de tueurs professionnels. Saura-t-on un jour la vérité ? Quel rôle a joué la société de mercenaires Wagner dans cette affaire ?
Il reste que, depuis, les journalistes centrafricains travaillent sous l’ombre d’une menace permanente. La situation s’est-elle améliorée ? La RCA était remontée à la 132ème place en 2020, puis à la 126ème place en 2021. Mais force est de constater que les bâtons dans les roues des journalistes restent bien présents, pour entraver la course de leur mission d’information au service des compatriotes.
Rappelons-nous la suspension de notre site, ainsi que nos confrères du Tsunami, en février 2021, sur décision arbitraire du ministre des postes et des télécommunications. Ou encore la tentative du Haut Conseil à la Communication (HCC), il y a quelques semaines, de faire interdire le journal Média +. Est-ce comme cela qu’un gouvernement républicain digne de ce nom fait respecter la liberté de la presse ?
Mais le plus difficile, pour un journaliste intègre, est de louvoyer entre les « infox », les mensonges et les fausses nouvelles, de dévoiler la vérité noyée dans le brouillard de la propagande. Quel est le prix d’un journaliste, sur la place de Bangui, pour accepter de répandre les fake news ? On parle de cent-cinquante mille (150 000) francs CFA pour un article pro-russe. Les mercenaires de Wagner n’hésitent pas à payer pour faire oublier leurs turpitudes. Leur soupe est bonne, mais la vérité est amère.
Notre confrère Jean Sinclair Maka Gbossokotto était un journaliste libre et courageux. Fondateur d’Anti-infox RCA, il a lutté jusqu’au bout contre les mensonges de la propagande, pour faire triompher la vérité, dans la tradition des grands journalistes d’investigation. Il est décédé, de cause inconnue, le 23 février dernier. Nul doute que sa disparition précoce arrangera beaucoup de gens au service d’intérêts occultes, mais fera encore reculer la Centrafrique au classement international de la liberté de la presse.
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