Le procès de Ndélé 1 à la CPS : entre contestations et plaidoiries pour l’acquittement
Par la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique.
La Cour pénale spéciale (CPS) de Bangui a consacré quatre jours d’audience, du 11 au 14 novembre 2024, à l’examen des plaidoiries de la défense et aux répliques dans l’affaire opposant le Procureur spécial à Azor Kalite et trois co-accusés. Ces derniers sont poursuivis pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, présumément commis lors de l’attaque du marché de Ndélé en avril 2020.
Des charges contestées par la défense devant la CPS
Le premier jour d’audience a été marqué par la plaidoirie de Me Blaise Fleury Hotto, avocat de Charfadine Moussa. S’appuyant sur l’article 153 du Code pénal centrafricain, il a vigoureusement contesté la qualification des faits en crimes contre l’humanité. L’avocat a notamment souligné l’absence de preuves matérielles et de témoignages directs impliquant son client. Il a particulièrement insisté sur les conditions d’obtention de certaines preuves, évoquant des procès-verbaux établis sans interprète ni avocat.
Le lendemain, Me Guy Antoine Dangavo, représentant Azor Kalite, pour lequel le Parquet a requis 30 ans de réclusion criminelle, a développé une stratégie de défense axée sur trois points principaux. Il a d’abord mis en avant la cohérence des déclarations de son client, qui a toujours nié sa présence à Ndélé lors des faits. L’avocat a également dressé un portrait favorable de l’accusé, ancien membre des services de sécurité présidentielle au casier judiciaire vierge, et contesté la fiabilité des preuves présentées par l’accusation.
Un débat sur la compétence de la CPS
Une question juridique majeure a émergé des débats : celle de la compétence même de la Cour pénale spéciale. Les avocats de la défense ont argumenté que les affrontements relevaient davantage de conflits ethniques entre factions Goulas et Roungas que de crimes internationaux. Cette remise en cause de la compétence de la CPS a suscité une vive réaction du Parquet spécial, notamment par la voix du Substitut Alexandre Tindano, qui a fermement défendu la légitimité de la juridiction.
Une suspension inattendue
L’audience du 13 novembre a connu un rebondissement avec une demande de suspension émanant du Barreau centrafricain. Cette requête, présentée par le Bâtonnier Me Jean-Louis Opalagna, visait à permettre aux avocats de participer à une assemblée générale. Si le Parquet a qualifié cette demande tardive “d’inélégante”, le Président Aimé Pascal Delimo a néanmoins accordé ce report.
Des répliques animées
La dernière journée d’audience a été particulièrement intense, avec les répliques successives de toutes les parties. Me Albert Panda, avocat de la partie civile, a vigoureusement défendu la compétence de la CPS et la qualification des faits en crimes contre l’humanité, soulignant que les attaques visaient des zones non militarisées. Le Parquet spécial, par la voix du Substitut Alain Tolmo, a réaffirmé la solidité des preuves établissant la présence des accusés à Ndélé.
Dernières paroles des accusés
Conformément à l’article 125 du Règlement de Procédure et de Preuve, les accusés ont eu la parole en dernier. Leurs déclarations ont été marquées par des appels à la clémence et des affirmations d’innocence. Oscar Wodjonodrogba a notamment déclaré être venu à Ndélé “pour récupérer [ses] enfants” et non “pour faire la guerre”, tandis qu’Azor Kalite a évoqué la souffrance de sa famille.
La Cour pénale spéciale, juridiction hybride créée en 2015 par la loi organique n°15.003, rendra son verdict le 13 décembre 2024. Cette affaire représente un test crucial pour cette institution judiciaire novatrice, chargée de poursuivre les crimes de droit international commis en République Centrafricaine depuis 2003. Elle illustre également les défis auxquels fait face la justice pénale internationale en Afrique centrale, entre nécessité de juger les crimes graves et respect des droits de la défense.
Le verdict attendu dans cette affaire pourrait faire jurisprudence pour d’autres procès à venir devant la CPS, notamment concernant la qualification des violences ethniques en crimes contre l’humanité. Il devra également répondre aux questions soulevées par la défense sur la recevabilité des preuves et la compétence de la Cour, dans un contexte où la justice transitionnelle joue un rôle crucial pour la reconstruction du pays.
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