Conakry (Guinée) – 2 avr. 2020 20:49
“Les violences ont diminué, on ne voit pas vraiment de violences apparentes. Toujours est-il que les gens sont méfiants”, ajoute Hélène Zogbélémou, militante des droits de l’Homme dans cette ville de la Guinée forestière.
Cette relative accalmie survient au lendemain de l’annonce de la victoire aux législatives au profit du parti au pouvoir.
Selon les résultats annoncés mercredi (01.04.20), le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG Arc-en-ciel) engrange 79 sièges sur les 114 en jeu.
Les Guinéens avaient aussi adopté la nouvelle constitution lors du double scrutin législatif et référendaire de mars dernier émaillé par des violences.
Violences répétées à N’Zérékoré
Les violences dans cette ville située à un millier de kilomètres de Conakry auraient fait une soixantaine de morts. Mais d’autres sources évoquent un chiffre inférieur. “Il y a des ONG locales qui ont noté qu’il y a eu plus de 20 morts dans des affrontements qui semblent essentiellement avoir été des affrontements intercommunautaires dont les détails restent pour le moment flous”, fait savoir Fabien Offner, chercheur au bureau régional d’Amnesty International à Dakar.
Plusieurs victimes auraient été enterrées dans une fosse commune.
Des églises, mosquées et des maisons auraient été saccagées ou incendiées. Il n’existe pourtant pas de chiffre officiel concernant les victimes.
Contacté jeudi (04.03.20), le ministre de la Sécurité et de la protection civile Damatang Albert Camara, a refusé de se prononcer sur ce sujet.
Pourtant Hélène Zogbélémou croit que la ville pourrait faire face à d’autres violences :
“Il y a un côté qui n’est pas satisfait et qui promet se venger un jour. Deux communautés se regardent toujours en chien de faïence.”
Cellou Dalein Diallo, leader de l’opposition guinéenne, dénonce les violences
Une enquête indépendante et impartiale
A la veille de l’élection présidentielle en 2015, la ville de N’Zérékoré avait fait déjà enregistré des morts et des blessés.
Dans un communiqué publié mercredi (25.03.20), le réseau ouest-africain pour l’édification de la paix (WANEP Guinée) rappelle que les “affrontements communautaires sont fréquents” à N’Zérékoré.
Au lendemain du double scrutin législatif et référendaire de mars dernier, le chef de l’opposition Cellou Dalein Diallo dénonçait des “conflits ethniques et religieux”à N’Zérékoré.
Le président Alpha Condé “continue de malmener l’unité nationale”, dénonce dit le chef de l’UFDG à un média local mercredi (01.04.20).
Lundi (30.03.20), l’ambassade des Etats-Unis en Guinée a réclamé une “enquête transparente et rapide sur tous les cas de morts liés aux manifestations” dans le pays et à la tenue d’un procès.
Des forces de police et de sécurité trop violentes autour du scrutin en Guinée?
Amnesty International a documenté aussi, dans un communiqué publié jeudi (02.04.20) des violences et des morts pendant et après le double scrutin de mars dernier à Conakry et à l’intérieur du pays.
L’ONG souhaite aussi émet cependant des “doutes sur la volonté réelle des autorités d’enquêter sur les violences”. Fabien Offner indique avoir observé “des forces de défense et de sécurité lourdement armées faire face à des manifestants parfois violents”.
Arrestations au sein du FNDC
Les arrestations des membres du Front national de défense de la constitution (FNDC) se sont poursuivies ces dernières semaines, ajoute M. Offner. Il ajoute que certaines personnes se seraient enfuies.
Deux leaders du FNDC de la région de N’Zérékoré ont été convoqués mercredi (01.04.20). Un autre est en prison depuis une semaine. Le Front avait appelé à boycotter le scrutin du 22 mars dernier.
Le FNDC appelle vendredi (03.04.20) et le weekend à des journées nationales de deuil et de recueillement dans tout le pays « pour le repos des âmes de toutes les victimes de la répression du régime » du président Alpha Condé.
Ces journées se tiendront en plein état d’urgence sur toute l’étendue du territoire en raison de la pandémie de Covid-19.
Avec DW français