Enquête exclusive : dans  les coulisses de la mafia du carburant russe en Centrafrique

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Enquête exclusive : dans  les coulisses de la mafia du carburant russe en Centrafrique

 

Enquête exclusive : dans les coulisses de la mafia du carburant russe en Centrafrique
Poutine et Touadera à Moscou, le 15 janvier 2025

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 Une simple affaire de carburant russe révèle aux yeux du monde un système complexe d’importation de pétrole russe en République centrafricaine, dissimulé derrière une société-écran camerounaise. L’annonce récente d’un “don” de 30 000 tonnes de carburant, environ 35 millions de litres,  par Vladimir Poutine au président Touadera dévoile un mécanisme établi depuis plus d’un an.

Enquête exclusive : dans les coulisses de la mafia du carburant russe en Centrafrique
station essence Total 4e arrondissement de bangui

 

En 2023, le gouvernement centrafricain a quasiment doublé le prix du carburant à la pompe, le faisant grimper de 80 à 90%. Cette hausse, appliquée sans consultation préalable de la société civile, a déclenché une vague d’inflation dans tout le pays. Les transporteurs ont dû répercuter ces coûts sur leurs tarifs, entraînant une augmentation générale des prix des produits de première nécessité.

 

C’est dans ce contexte que Neptune Oil, une modeste entreprise camerounaise, s’est vue octroyer un monopole total sur l’importation et la distribution de carburant en République centrafricaine. Par un discret arrêté ministériel, tous les autres distributeurs locaux ont perdu leur licence d’exploitation. “Notre entreprise fonctionnait depuis vingt ans”, témoigne un ancien distributeur qui souhaite garder l’anonymat. “Un matin, on nous a signifié que nos autorisations étaient annulées. Personne n’a compris cette décision, malgré que nous avons été autorisé par un décret présidentiel “.

 

Le FMI, lors de son audit du ministère des Finances centrafricain, a noté une anomalie majeure : malgré des prix à la pompe records, les recettes de l’État diminuent. L’institution financière a demandé des explications au gouvernement. Si la Centrafrique, pays enclavé, peut légitimement appliquer des prix plus élevés que ses voisins en raison des coûts de transport, le doublement des tarifs paraît excessif. Le FMI recommande une baisse significative pour maintenir des prix raisonnables, légèrement supérieurs à ceux des pays limitrophes.

 

La résistance du gouvernement centrafricain à cette demande a pris une nouvelle dimension après le récent voyage du président Touadera à Moscou. Accompagné de ses ministres des Mines et de la Défense, le chef de l’État s’est vu promettre par Vladimir Poutine un “don” de 30 000 tonnes de carburant. Cette annonce intervient alors qu’une importante cargaison de carburant russe est bloquée depuis plusieurs semaines au port de Douala, au Cameroun.

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Les-presidents-Paul-Biya-du-Cameroun-et-Faustin-Archange-Touadera-de-Centrafrique – Après de multiples crédits bancaires, Touadera pense à produire de faux billets de banque pour pouvoir payer les fonctionnaires

 

Les autorités camerounaises, qui ont décelé des irrégularités dans cette importation, retiennent la livraison pour “concurrence déloyale”. L’annonce du “don” apparaît comme une tentative de débloquer cette situation. Un juriste centrafricain, expert en droit commercial, explique : “Cette tactique ressemble à celle utilisée précédemment avec une prétendue donation de céréales russes que les centrafricains n’ont jamais vu les couleurs.”

 

D’après une enquête de la société civile centrafricaine, Neptune Oil servirait de société-écran pour l’importation massive de pétrole russe en Centrafrique. La hausse spectaculaire des prix aurait été décidée pour permettre la vente de ce carburant à des tarifs très avantageux, au profit d’intérêts russes. Cette explication éclaire le refus persistant du gouvernement centrafricain de suivre les recommandations du FMI sur les prix.

 

La mécanique est bien connue : une entreprise camerounaise sert de façade, un monopole lui est accordé par un arrêté fictif, les prix sont artificiellement gonflés, et le pétrole russe entre massivement dans le pays. Les bénéfices générés par ces opérations échappent aux caisses de l’État centrafricain, ce qui explique la baisse des recettes constatée par le FMI.

 

Arthur, un économiste centrafricain, explique les faits : « Ce que vous ne le savez pas, c’est que le carburant russe est bloqué depuis des semaines au port de Douala. Pour tenter de le faire circuler, Moscou a joué sa carte : une invitation du président Touadera en Russie, puis l’annonce d’un don de 30 000 tonnes de carburant. Une La stratégie est simple, faire parler massivement les médias autour d’un don de carburant russe à la Centrafrique. Eh oui, ça marche. Une semaine après, la presse russe parle d’un blocage de cette ‘aide’ par le Cameroun. Comment ça ? Le carburant russe est arrivé comment si rapidement à Douala ?Mais un simple calcul prouve la supercherie : le trajet maritime Russie-Cameroun prend plusieurs semaines. C’était bien le même carburant, déjà bloqué depuis plusieurs semaines à Douala. Finalement, le plan de Poutine – Touadera a réussi : le Cameroun a fini par céder sous la pression médiatique, ne pouvant plus retenir ce qui passait désormais pour une ‘aide humanitaire’.

 

En effet, cette opération s’inscrit dans une logique plus large. Sous sanctions occidentales, la Russie cherche de nouveaux débouchés pour son pétrole. La Centrafrique, avec ses prix gonflés artificiellement, offre une opportunité en or. Via Neptune Oil, Moscou vend son carburant deux fois plus cher qu’ailleurs, empochant des milliards de francs CFA. Un commerce juteux qui contourne les sanctions tout en assurant des profits considérables. Pour la Russie, c’est un double gain : politique avec son influence grandissante en Afrique centrale, et économique avec des marges exceptionnelles sur son pétrole.

 

Cette mainmise sur le secteur pétrolier représente une nouvelle étape dans l’implantation russe en Centrafrique. Après le déploiement des forces Wagner et les accords miniers, le contrôle du carburant renforce l’emprise de Moscou sur l’économie du pays.

 

Le bras de fer avec le FMI prend ainsi une nouvelle dimension. La Centrafrique, l’un des pays les plus pauvres du monde, risque la suspension de l’aide internationale pour protéger un système qui profite principalement à des intérêts étrangers. Un ancien haut fonctionnaire du ministère des Finances observe : “Notre pays s’enfonce dans une dépendance économique dont il aura du mal à se défaire“.

 

L’histoire du “don” de carburant russe montre comment des opérations commerciales peuvent se dissimuler derrière des annonces d’aide humanitaire. Elle révèle aussi la complexité des relations entre la Russie et la Centrafrique, où les questions économiques et stratégiques s’entremêlent étroitement.

 

La population centrafricaine, elle, continue de payer le prix fort. Les transporteurs, commerçants et consommateurs subissent une inflation qui érode leur pouvoir d’achat. Pendant ce temps, le gouvernement maintient sa position, refusant d’entendre les appels à la modération des prix du FMI et ignorant les difficultés croissantes de ses citoyens.

 

L’opération autour du carburant russe en Centrafrique démontre une fois de plus une réalité inquiétante : les ressources et l’économie du pays semblent de plus en plus échapper au contrôle de l’État et de ses institutions. Cette situation pose question sur l’avenir économique d’un pays déjà fragilisé par des années de conflit.​​​​​​​​​​​​​​​​

 

Par Alain Nzilo

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