Rédigé par Bernard SELEMBY DOUDOU
Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le lundi 21 mars 2022
Bangui (CNC) – Le 15 mars 2022, le président de la république a rendu effective la tenue du dialogue politique dit républicain. En effet, il s’agit du décret N*22.059 portant convocation du dialogue politique qui se tiendra dans l’hémicycle de l’assemblée nationale du lundi 21 mars au dimanche 27 mars 2022 soit une semaine de discussion en vue d’esquisser des solutions durables à la crise centrafricaine.
La commission préparatoire des travaux du dialogue politique a sélectionné environ quatre cent cinquante (450) participants sélectionnés sur des critères très opaques. À ce stade, il apparaît urgent de rappeler d’emblée que les groupes armés partenaires d’hier et auteurs principaux de l’insécurité, d’entraves aux droits fondamentaux ne sont pas conviés à cette assise qui s’apparente à un conseil de cabinet.
En prélude à ce qui précède, nous tenons à rappeler qu’on dialogue toujours avec un adversaire, un ennemi, une personne avec qui on est fâché…mais jamais avec les siens au risque de l’ériger en une réunion de famille. Fort de ce constat, la configuration sur la forme, le fond et la précipitation liée à l’organisation du dialogue politique laisse le citoyen lambda dubitatif qui malgré tout s’interroge : Sur le plan de la forme, toutes les couches constitutives de la société centrafricaine y compris la diaspora sont-elles représentées ?
Une semaine de débats serait-elle suffisante pour résoudre efficacement la crise ?
Au risque de multiples suspensions sans une réelle avancée, les termes de référence du dialogue politique ou les thématiques retenues ainsi que les règles de discussion ont-ils été consensuels ?
Dans l’affirmative, les thématiques retenues sont-elles en adéquation avec les attentes de la population ?
Sur le fond et de manière succincte, quels sont les objectifs recherchés ou du moins attendus du dialogue politique républicain ?
Sachant que les attentes prioritaires de la population demeurent la « sécurité », comment peut-on atteindre ces objectifs si les groupes armés ne sont pas associés à la discussion ?
En d’autres termes, comment peut-on restaurer la sécurité sans les véritables auteurs de l’insécurité ?
Par ailleurs, ce dialogue politique apparemment flou entretient-il en substance un agenda caché ?
Dans le même ordre d’idées, ce dialogue politique taillé sur mesure est-il destiné à répondre aux exigences des partenaires au développement en vue d’un déblocage massif de financements ?
Par voie de conséquence, ce dialogue politique est-il un tremplin pour modifier la constitution afin d’esquisser un troisième mandat ?
Pour finir, les conclusions de ce dialogue politique remettront-elles en cause l’accord de Khartoum ?
En tout état de cause et faisant abstraction du politiquement correct, la formule du dialogue politique proposée par le pouvoir tant sur la forme que sur le fond ne permettra nullement d’atteindre de façon rationnelle les résultats escomptés.
Le cadre de suivi pour veiller à la bonne application des résolutions qui fait souvent défaut sera aussi un sujet de réflexion à approfondir. En outre, nous invitons les participants à ce dialogue de répertorier les sujets non négociables liés à la pérennité et la sérénité de notre démocratie tels que la tentative de projeter un troisième mandat présidentiel synonyme de la création d’une nouvelle république, le renforcement de l’indépendance de la justice etc…
Enfin, le verrou constitutionnel de l’article 35 doit être renforcé, plus précisément l’alinéa 3 qui dispose que : « en aucun cas le président de la république ne peut exercer plus de deux (2) mandats consécutifs ou le proroger pour quelque motif que ce soit »…
Au delà de tout, un peuple doit toujours se parler pour la rationalité de la vie en société…mais attention, ne le dites à personne.
Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.
Paris le 19 mars 2022
Bernard SELEMBY DOUDOU
Juriste, Administrateur des élections.
Tel : 0666830062.