Notre invité est le nouveau Premier ministre centrafricain. Mahamat Kamoun a accordé à RFI sa toute première interview. Il évoque ses priorités et fait le constat de la difficile situation actuelle. Il répond aux questions de Laurent Correau.
RFI : Vous venez d’être nommé Premier ministre. Quelle est votre première réaction à cette nomination ?
Mahamat Kamoun : Ma première réaction, c’est d’abord de remercier madame la présidente de la République pour la confiance et surtout pour avoir porté son choix sur ma modeste personne, remercier également toutes les forces vives de la Nation avec lesquelles elle a eu des entretiens et des consultations approfondis et dont les conseils ont été déterminants pour ses choix. Le critère confessionnel a joué un rôle mineur dans la nomination, contrairement à ce que les uns et les autres peuvent penser. Je me pose comme un homme plein d’humilité, un homme compétent et ouvert, rassembleur. La réconciliation fait partie de l’action que le gouvernement de transition est appelé à mettre en œuvre. Donc avec tous les Centrafricains, le gouvernement, la communauté internationale, nous allons aller dans ce sens. Un premier cap a été franchi à Brazzaville. Ensuite avec le médiateur et les autres partenaires, nous allons attaquer la deuxième phase qui est le dialogue, les consultations populaires à la base au niveau des 16 préfectures de la République centrafricaine. Et ensuite, il y aura l’organisation d’un forum au niveau de Bangui, de réconciliation nationale.
Qu’est-ce que vous considérez aujourd’hui comme votre priorité en tant que nouveau Premier ministre ?
La priorité des priorités, c’est d’abord se pencher sur la formation du prochain gouvernement, lequel gouvernement doit être inclusif comprenant toutes les forces vives de la Nation. Nous allons mettre en place une équipe gouvernementale qui est composée de toutes les sensibilités politiques de ce pays et c’est ensemble que nous allons pousser l’action gouvernementale. Notre mission sera essentiellement de réussir cette transition.
Quel est votre message à la fois aux anti-Balaka et aux Seleka ?
Les anti-Balaka , les Seleka, les Centrafricains qui nous connaissent, ils savent de quoi nous sommes capables. Lors des accords qui ont été signés lors du forum de Brazzaville, ces deux entités ont démontré aux yeux du monde entier qu’ils étaient pour la paix et qu’ils étaient prêts à déposer les armes pour se consacrer à l’œuvre de reconstruction nationale. Donc nous avons confiance aux responsables de ces deux entités pour nous soutenir dans ce rôle difficile de reconstruction de notre pays.
L’application des accords de Brazzaville, c’est l’un de vos chantiers importants ?
C’est l’un des actes majeurs de notre action et de tous ceux qui nous accompagnent dans cette entreprise de transition. La situation est tributaire de la sécurité. Sans sécurité, comment voulez-vous que les gens puissent exercer leurs activités dans les champs ? Sans sécurité, comment voulez-vous que les gens puissent écouler leurs produits ? Et sans sécurité, comment voulez-vous que les gens puissent avoir du sel, du savon, qu’ils reviennent dans leurs domiciles respectifs ? Donc la sécurité est la priorité numéro un. Ensuite, il faut assister les gens et les inciter à revenir chez eux. C’est pour cela qu’avec les organismes humanitaires, nous allons continuer le travail pour permettre à chaque Centrafricain de revenir chez lui, et aussi à ceux qui sont à l’extérieur. Si nous voulons aller aux élections, il faut maintenant tout faire pour que les gens regagnent le pays.
Quel est le message que vous avez envie de délivrer aux Centrafricains aujourd’hui ? Qu’est-ce que vous avez envie de leur dire ?
Les Centrafricains me connaissent. Je leur demande du calme, c’est au pied du mur qu’on voit le maçon. Et surtout, ils font partie, ils sont au cœur de la politique du gouvernement que j’ai à nommer.
Quel est l’état dans lequel vous trouvez la Centrafrique en ce jour où vous êtes nommé Premier ministre ?
Si on fait une rétrospective de la situation du pays au moment où la présidente de la République, madame Catherine Samba-Panza, accédait à la magistrature suprême du pays, six mois après il y a eu des progrès importants : en termes de sécurité, sur le plan social, en termes de relance économique. Et tous ces résultats, il faut les mettre sur le dos du gouvernement sortant dirigé par André Nzapayèkè. La communauté internationale également avec la force Sangaris, la Misca, tout le monde a œuvré, tout le monde a mis du sien pour pouvoir arriver à cette situation. Nous sommes conscients que beaucoup reste à faire. Mais il ne faut pas non plus oublier les résultats qui ont été enregistrés à ce jour.
Par: Laurent Correau avec RFI