CENTRAFRIQUE : LES REBELLES ET LE DDRR, UN OUTIL DE PAIX ET DE RÉCONCILIATION MALMENÉ
Bangui, le 7 septembre 2017.
Par : Joseph Akouissonne, CNC.
DOUBLE JEU
Depuis l’institution de cet outil de paix(SIRIRI) et de réconciliation nationale mis en place par le président Touadera, les rebelles n’ont cessé de biaiser, de tenir un double langage, de fanfaronner en affichant leur mépris. Ils se sont livrés à des manœuvres grossières pour s’absoudre de tous leurs crimes, montrant ainsi que la paix n’est pas leur première préoccupation.
Mais, face aux violences perpétrées sur les populations centrafricaines, comment pourrait-on enterrer, sans aucune autre forme de procès, les crimes contre l’humanité dont ils sont responsables ? Les familles des milliers de morts centrafricains suppliciés par les rebelles et les mercenaires venus de l’étranger attendent que justice se fasse. La conscience centrafricaine ne sera jamais apaisée par l’oubli des massacres et des corps mutilés. C’est un territoire ruiné que la folie meurtrière de ces criminels va laisser en héritage aux générations futures.
Peut-on décemment, au nom de la légitime recherche de la paix, oublier les victimes et leurs familles ?
DDRR ET CRIMES IMPUNIS
Les efforts déployés par les autorités centrafricaines, pour inviter les rebelles dans le cadre du DDRR à la table des négociations, n’ont eu, jusqu’à ce jour, que très peu de résultats. Le positionnement des bandes armées consistant à exiger leur impunité ne sera jamais accepté par les Centrafricains. Une paix bâtie sur de tels fondements ne pourrait pas tenir.
Et que faire des mercenaires étrangers dont le pays d’origine n’accepterait pas le retour ? Jusqu’à maintenant, la MINUSCA semble tenir un double langage en Centrafrique, comme si elle offrait aux ex-Sélékas, une promesse secrète d’impunité.
Récemment, l’ambassadeur des États-Unis en Centrafrique a demandé à la MINUSCA d’arrêter Ali Darass, replié avec ses hommes à Bangassou, après les violences et les razzias qu’ils ont menées dans la région. Parfait Onanga Anyanga, chef de la MINUSCA en Centrafrique, a refusé de le faire, prétextant que les autorités centrafricaines ne l’avaient pas expressément sollicité.
A cause de ces barbares d’un autre temps, la petite ville paisible de Bangassou est devenue une ruine. Le mercenaire nigérien Darass y a fait commettre des crimes : égorgements de femmes et d’enfants, exécutions de vieillards, incendies de villages, profanations de lieux de cultes catholiques… Ce bandit de grand chemin est en train de saccager la région. Prépare-t-il la création de sa « République du Logone » dans le Mbomou et le Haut-Mbomou ?
Face à ce qui ressemble à un parjure de la part de la MINUSCA et des autorités centrafricaines, on peut donc légitimement se poser la question: « qui fait quoi à Bangui ? »
LE LEADERSHIP DU GOUVERNEMENT CENTRAFRICAIN MALMENÉ PAR LE CHEF DE LA MINUSCA
C’est écrit noir sur blanc dans leur mission : les Casques Bleus de l’ONU sont sous les ordres des pays où ils interviennent. Autrement dit, le président du pays hôte est leur chef d’État- Major. Si les massacres continuent, si les chefs rebelles ne sont pas appréhendés, c’est parce que le chef de la MINUSCA joue un double jeu avec les rebelles.
Autrement, pourquoi ne mettrait-il pas aux arrêts le violent mercenaire nigérien Darass, comme le demande l’ambassadeur des USA en Centrafrique ? De son côté, à plusieurs reprises selon des sources proches de la Présidence, Touadera n’a-t-il pas demandé aux Casques Bleus de procéder à l’arrestation des chefs rebelles ? Leur responsable à Bangui a répondu par une fin de non-recevoir. Si le DDRR piétine, la faute en incombe en partie aux refus de la MINUSCA d’obéir aux commandements du président centrafricain, alors que certains chefs des ex-Sélékas sont déjà interdits de voyages et sous mandat d’arrêt de l’ONU.
Si la désobéissance du chef de la MINUSCA à Bangui persiste, il appartient aux autorités centrafricaines de demander au Secrétaire Général de l’ONU son remplacement. Si les rebelles semblent persister dans leur refus de dialogue c’est bien qu’ils sont sûrs de leur impunité, puisque l’ONU donne l’impression de les protéger.
DDRR ET POPULATION CENTRAFRICAINE
Le DDRR, outil de dialogue et de réconciliation, a fait espérer une sortie de crise aux Centrafricains. Mais le manque de cohérence et de fermeté face aux rebelles, de la part des autorités centrafricaines et de la MINUSCA, ont donné des ailes à des chefs rebelles déterminé dans leur refus du dialogue.
Il faut donc leur signifier qu’après tant de crimes, il est hors de question que leurs chefs bénéficient d’aucune impunité. Ce serait une insulte à la mémoire des milliers de victimes et à ceux qui ont survécu à leur barbarie.
Le DDRR n’est peut-être pas parfait, mais c’est le seul outil de dialogue à ce jour. Les efforts de tous les Centrafricains doivent concourir à sauvegarder cet ultime outil de paix (SIRIRI) et de réconciliation nationale.
JOSEPH AKOUISSONNE ( 5 SEPTEMBRE 2017)