CENTRAFRIQUE : LA MÉFIANCE ET LA RUMEUR PUBLIQUE, FACTEURS DE RALENTISSEMENT DE L’ACTION GOUVERNEMENTALE.
Bangui le 12 Septembre . 19: 30′.
Par Bernard SELEMBY DOUDOU.
Après son élection à la magistrature suprême, le premier President de la sixième République avait envisagé de mettre en place un gouvernement de rupture où la compétence et l’intégrité sont les critères dominants. Ce gouvernement avait pour mission de répondre dans un bref délai aux urgences définies par le President de la République. La majorité des centrafricains avait adhérer, avait espoir et tolérait les errements et les dérapages successifs des animateurs de la vie gouvernementale. Très vite, certains membres du gouvernement qui se sont retrouvés fortuitement ou par sérendipité dans cette équipe pour service rendu se sont distingués par leur amateurisme et la méconnaissance des missions qui leur sont attribuées. Cet amateurisme relève t-il de l’incompétence ? Sont-ils victimes de la méfiance de leur collaborateur ? Ou alors sont-ils victimes de la rumeur publique déstabilisante qui est un sport de prédilection des centrafricains ? A titre de rappel, la méfiance est un état d’esprit de quelqu’un qui se tient sur ses gardes face à quelqu’un d’autre ou parfois de quelques choses. C’est un comportement formel de non-confiance basé sur de soupçons. Tandis que la rumeur est la diffusion par tout moyen d’une information dont la véracité est douteuse, erronée ou incertaine. A titre d’illustration, les anciens membres de cabinet du gouvernement de transition ont formé et aidé la nouvelle équipe à élaborer le programme du gouvernement qui a reçu brillamment l’approbation des parlementaires. Ces derniers ont été remerciés comme des malpropres à travers des révocations et parfois sans proposition de postes. Il est vrai qu’une maxime politique dit “qui gagne les élections gouverne” et une autre annonce “qu’on ne gouverne qu’avec les siens” mais ce genre de pratiques est génératrice de haine, de méfiance épidémique qui peut s’étendre aux différents départements ministériels. En attendant la grande réforme de la fonction publique centrafricaine qui doit supprimer ou créer des postes dans l’organigramme gouvernemental, les grands mouvements du personnel des départements ministériels tardent à venir. Ainsi, les fonctionnaires sont méfiants des nouvelles autorités et surtout sur le sort qui leur sera réservé. D’autres, animés de mauvaise foi font de rétention d’informations et/ou de dossiers pour se rendre utiles. Alors comment peut-on attendre la cohérence, la solidarité, la rapidité, l’efficacité et la compétitivité à un tel gouvernement ? Bousculé par l’urgence sécuritaire, le gouvernement se souci même peu de son efficacité et mélange les pinceaux pour restaurer la paix et l’autorité de l’Etat. On s’interroge même si tous les départements ministériels ont mis en place un plan d’action car c’est trop facile d’accuser le premier ministre qui responsable de la politique gouvernementale devant le parlement. Comme la nature a horreur du vide, le manque de plan d’action et l’absence de réaction décisionnelle laisse une ouverture à la Minusca de faire irruption dans la vie politique centrafricaine en lieu et place des autorités élues. Face à ce monologue gouvernemental, cette cacophonie et le manque de cohérence de l’action gouvernementale, la population commence à douter sérieusement de la réelle capacité du gouvernement à rattraper le retard dans la réalisation des objectifs. Pour ce faire, nous invitons solidairement le gouvernement à créer un climat de confiance et de lutter contre les rumeurs qui fragilisent l’efficacité et la compétitivité de l’action gouvernementale. Dès lors que le gouvernement ne parvient pas ou plus à relever le défi sécuritaire, condition sine qua non de toutes actions politiques, les députés qui représentent la souveraineté nationale et les défenseurs des intérêts des électeurs de sa circonscription doivent prendre leur responsabilité. L’assemblée nationale dispose d’un arsenal juridique consistant pour évaluer et contrôler l’action gouvernementale de façon permanente. Cette évaluation à mi-parcours permettra à l’équipe gouvernementale d’ajuster et d’adapter sa politique. Ce contrôle se matérialise soit par la procédure de questions orales, des questions écrites, soit par la commission d’enquête parlementaire, par les auditions et enfin par le vote de défiance autrement appelé la motion de censure. Mais attention, ne le dites à personne, si on vous demande ne dites pas que c’est moi.
Paris le 10 septembre 2016.
Bernard SELEMBY DOUDOU
Juriste, Administrateur des Elections.