Bangui, Républiqe centrafricaine, samedi, 10 avril 2021 ( Corbeaunews-Centrafrique). Dans le cadre de la poursuite judiciaire engagée contre l’ancien président de la république François Bozize mué en chef rebelle pour tentative de coup d’état et tentative de déstabilisation des institutions de la république, le ministre intérimaire de la justice a adressé une correspondance sans motif au président de l’assemblée nationale pour la levée de l’immunité de quatre (4) parlementaires en vue de leurs auditions. Cette démarche gouvernementale s’inscrit dans les prescriptions des dispositions de l’article 67 de la constitution confirmée par les dispositions de l’article 118 de la loi organique N*17.011 du 14 mars 2017 portant règlement intérieur de l’assemblée nationale.
A la lecture de ces dispositions légales, l’immunité parlementaire consiste à protéger les parlementaires des pressions extérieures en leur garantissant l’irresponsabilité et l’inviolabilité. Au delà de l’exploitation spéculative et hâtive, il apparaît important de rappeler que la demande de levée de l’immunité parlementaire n’a pas pour effet de retirer leurs qualités de députés mais dans le respect de la notion angulaire de la présomption d’innocence signifie que le juge d’instruction a des indices graves, concordants ainsi que des preuves pouvant conduire à leurs culpabilités.
Nous remarquons à l’occasion le flou ou le silence à desseins du document administratif qui ne précise pas si le juge d’instruction envisage de les entendre en tant que « simples témoins » ou « témoins assistés » car les deux statuts ne jouissent pas des mêmes droits. Le témoin étant celui qui a vu et entendu quelques choses tandis que le témoin assisté est un statut intermédiaire entre un simple témoin et un mis en examen. A la réception de la demande et conformément aux dispositions légales, le président de l’assemblée nationale met en place une commission ad hoc composé d’un représentant du bureau de l’assemblée nationale, d’un représentant de chaque groupe parlementaire, d’un représentant des députés non inscrits. Ces derniers éliront en leur sein un président et un rapporteur.
Après l’audition des parlementaires concernés, la commission ad hoc en dresse un rapport fidèle qui sera transmis à la conférence des présidents pour avis avant d’être inscrit à l’ordre du jour de la prochaine séance. Lors de la plénière, les élus de la nation voteront à bulletin secret à la majorité absolue des membres qui compose la chambre. Il faut également noter que la demande de levée de l’immunité parlementaire peut être accordée ou rejetée. En cas de levée, le juge d’instruction peut utiliser toutes les prévisions légales en vue de la manifestation de la vérité.
Devant des innombrables spéculations politiques et de campagnes médiatiques orientées selon les idéologies, le citoyen lambda s’interroge :
La demande de levée de l’immunité parlementaire relève t-il d’un simple acte judiciaire ou d’une manœuvre politique ?
Cet acte traditionnel de procédure est-il la conséquence logique des propos belliqueux et anti-diplomatiques de l’ambassadeur russe ?
Cette démarche judiciaire est-elle compatible ou propice au dialogue républicain proposé par le président de la république ?
Cette demande des autorités judiciaires a t-elle pour essence la fragilisation et l’anéantissement de l’opposition démocratique ?
S’inscrivant dans la suite logique d’idée, peut-on affirmer que la justice est aux ordres ?
Au delà d’un acte judiciaire, cette opération vise t-elle à purger la prochaine législature de l’assemblée nationale des caciques en vue d’une éventuelle modification de la constitution ?
Peut-on évoquer l’éventualité d’un coup d’état parlementaire ou d’une chasse aux sorcières ?
Si ce n’est pas le cas, pourquoi seulement inquiéter les ténors de l’opposition démocratique ?
Loin d’évoquer une habitude, les billets de banque vont-ils encore s’inviter dans l’hémicycle en vue d’orienter les votes ?
Surmené par ces différentes interrogations et loin d’être illégitime, la demande de levée de l’immunité des parlementaires est légale car étant législateurs, nul n’est au dessus de la loi mais nous n’accepterons pas non plus que ces derniers soient « en dessous » de la loi à travers des manœuvres politiques.
Pour finir, nous invitons les autorités nantis du pouvoir souverain de ne pas occulter le fait que la paix et le tissu social sont encore fragiles malgré la présence des forces alliées.
Animé par le souci de garantir les droits fondamentaux des parlementaires et la clairvoyance des procédures, nous proposons aux autorités que les débats lors de la plénière à l’assemblée nationale soient retransmis en direct à la radio et à la télévision.
Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.
Paris le 9 avril 2021.
Bernard SELEMBY DOUDOU.
Juriste, Administrateur des élections.
Tel : 0666830062.