affrontements meurtriers entre Peuls et Arabes sur un site minier de Kouki, une dizaine de morts

Rédigé le 02 septembre 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
Le lundi 1er septembre 2025, une prière satanique prévue sur un chantier minier de Kouki a dégénéré en affrontements violents entre la communautés peule et arabe, faisant au moins dix-huit morts.
Dans la préfecture de l’Ouham, plus précisement à Kouki, l’exploitation artisanale de l’or et du diamant suit des règles précises. Ces sites miniers, disséminés entre Kouki, Nana-Bakassa et Markounda, emploient des centaines d’ouvriers qui creusent la terre à la recherche de pépites et de pierres précieuses. Mais cette activité obéit à des croyances bien ancrées.
Il est plus important de savoir qu’ici, dans ces différents sites miniers, lorsqu’un chantier ne produit plus assez de l’or et de diamants, les ouvriers considèrent qu’il est “fermé” par les sorciers. Dans ce contexte, les ouvriers font alors appel à des marabouts, ces guides spirituels respectés dans la communauté musulmane.
Ces marabouts viennent sur le site pour accomplir un rituel spécifique. Ils récitent des prières en arabe, brûlent de l’encens et sacrifient des animaux, généralement des moutons ou des bœufs. Le sang de ces bêtes est versé sur la terre, et leur viande est partagée entre les participants. Cette cérémonie, appelée souvent par les ouvriers “ouverture du chantier”, doit redonner vie au gisement et faire revenir l’abondance de l’or sous la terre.
Mais pour que ce rituel fonctionne, une condition absolue doit être respectée : le site minier doit être complètement vide de toute présence humaine. Aucun creuseur ne doit manier sa pioche, aucun commerçant ne doit tenir boutique, aucun passant ne doit traverser la zone. Le silence total est exigé pendant que les marabouts accomplissent leurs prières. Cette règle ne souffre aucune exception.
Pourtant, ce lundi 1er septembre 2025, sur le chantier minier de Kouki, situé à 30 kilomètres de ce village, ce rituel satanique devrait voir le jour pour faire revenir l’or sous la terre, car, depuis plusieurs semaines, trouver de l’or, devient alors un parcours de combattant. Les ouvriers avaient informé tout le monde : marabouts, creuseurs, porteurs, acheteurs d’or, vendeuses de nourriture, réparateurs d’outils, tous devaient quitter les lieux pour la journée. Le lendemain matin seulement, c’est-à-dire le mardi 2 septembre, l’activité pourrait reprendre avec l’espoir de meilleures récoltes.
Mais plusieurs commerçants ont refusé de fermer leurs boutiques. Ces commerçants , installés en bordure du site minier, vendent de la nourriture, des boissons, des cigarettes et des articles de première nécessité aux ouvriers. Ils considéraient que leur activité commerciale n’avait rien à voir avec l’extraction minière proprement dite. Pourquoi devraient-ils fermer leurs boutiques et perdre une journée de recettes pour une prière satanique à laquelle ça ne leur concerne même pas?
Cette position a immédiatement créé un problème. Certains ouvriers mineurs ont expliqué aux commerçants que le rituel ne pouvait pas se dérouler en leur présence. Les marabouts ont confirmé : tant qu’il y aurait du mouvement commercial sur le site, les prières n’auraient aucun effet. Le chantier resterait “fermé” et improductif.
Certains commerçants ont accepté de fermer leur boutique, d’autres non. La discussion s’est envenimée. Chaque camp a commencé à chercher des soutiens de son côté.
À Kouki, comme dans beaucoup d’autres localités comme Markounda ou ailleurs en République centrafricaine, plusieurs groupes armés coexistent et contrôlent différentes activités minières. Les ouvriers et commerçants Peuls entretiennent des liens étroits avec le groupe armé l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC) et le mouvement Retour, réclamation et réhabilitation (3R).
De leur côté, les commerçants et ouvriers arabes bénéficient du soutien du Mouvement patriotique pour la Centrafrique (MPC), un groupe armé qui compte de nombreux éléments d’origine arabe dans ses rangs. Le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC) et quelques éléments anti-balaka sont également présents dans la sous-préfecture, mais en nombre plus réduit.
Quand la dispute entre certains ouvriers et commerçants a éclaté, chaque communauté a naturellement fait appel à ses protecteurs armés. Les Peuls ont contacté leurs alliés de l’UPC. Les Arabes ont sollicité le soutien du MPC. Ce qui avait commencé comme un différend sur l’organisation d’un rituel religieux s’est rapidement transformé en confrontation communautaire.
Ainsi, ce lundi matin, vers 9 heures, la tension était devenue palpable sur le site minier de Kouki. Les premiers échanges ont été verbaux. Les représentants de chaque groupe armé sont venus sur le site pour défendre les positions de leur communauté respective.
Aucun des deux camps n’a voulu céder. Les voix se sont élevées, les gestes se sont faits plus brusques, les positions se sont durcies. L’atmosphère est devenue de plus en plus électrique. Vers 9h30, quelqu’un a dégainé une arme. D’autres ont suivi. Les premiers coups de feu ont retenti sur le chantier minier.
L’affrontement qui a suivi a opposé principalement les éléments peuls de l’UPC aux combattants arabes du MPC. Les armes automatiques ont crépité sur le chantier minier. Les balles ont sifflé entre les tas de terre et les trous d’extraction. Les combattants se sont abrités derrière les installations de fortune du site.
Pendant les échanges de tirs, quelques éléments du FPRC et des anti-balaka ont été aperçus sur les lieux, mais leur rôle dans les combats est resté marginal. L’affrontement s’est concentré sur l’opposition entre Peuls et Arabes, chacun défendant les intérêts de sa communauté avec l’appui de ses alliés armés.
Les combats se sont poursuivis pendant près de 3 heures. Les détonations ont résonné dans toute la zone. Les populations civiles des villages environnants se sont barricadées chez elles, attendant que l’orage passe. Les balles ont volé dans tous les sens, transformant le paisible chantier minier en champ de bataille.
Vers 12 heures, les armes se sont progressivement tues. Les appels des chefs de ces deux groupes armées ont contribué à l’accalmie. Les tirs sporadiques ont cessé, remplacés par un silence pesant. Les hommes armés ont commencé à se replier vers leurs positions respectives.
Le bilan était lourd : environ dix civils tués, et 8 combattants également. Le nombre exact de blessés reste indéterminé, certains combattants ayant été évacués par leurs compagnons pendant les combats. Les corps des victimes ont été récupérés par les familles pour être inhumés selon les rites de chaque communauté.
Après cette tragédie, les esprits ont commencé à se calmer. Les responsables communautaires et les chefs des groupes armés ont entamé des discussions pour éviter que la situation ne dégénère davantage. Les leaders peuls et arabes se sont rencontrés pour évaluer les dégâts et chercher une solution à ce conflit qui avait échappé à tout contrôle.
Le rituel que les marabouts devaient accomplir n’a jamais eu lieu. Le site minier est resté paralysé, souillé par le sang des combattants. Mais dans la soirée, les premiers signes de réconciliation sont apparus.
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