Détournement de pièces à conviction : les promesses creuses du Procureur général Jean Vidal Damas

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Détournement de pièces à conviction : les promesses creuses de Jean Vidal Damas

 

Jean Vidal Damas, procureur général près la Cour d’appel de Bangui. Photo : RNL/Christ-Roi Jordan Bandengbe, octobre 2025.
Jean Vidal Damas, procureur général près la Cour d’appel de Bangui. Photo : RNL/Christ-Roi Jordan Bandengbe, octobre 2025.

 

Rédigé le 18 octobre 2025 .

Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC). 

Le Procureur général de la Cour d’appel de Bangui, Jean Vidal Damas, a déclaré vouloir lutter contre le détournement des pièces à conviction qui mine les procédures judiciaires. Mais ses propos rassurants ne peuvent cacher une réalité : la justice centrafricaine est gangrenée par la corruption et l’impunité, et les pièces à conviction disparaissent régulièrement sans que personne ne soit sanctionné.

 

 

Dans une interview accordée à la radio Ndèkè-Luka, Jean Vidal Damas a reconnu l’ampleur du problème : “Nous n’avons pas de baguette magique pour régler ce genre de problème mais nous pensons que c’est une entorse grave à la loi. Lorsque des pièces à conviction sont déposées ou sont consignées dans une procédure, logiquement ces pièces à conviction doivent accompagner l’ensemble du dossier jusqu’au jugement de cette affaire”.

 

Le magistrat Jean Vidal Damas  a admis que ce dysfonctionnement est fréquent : “C’est des manquements graves qu’on a observé et souvent au cours des audiences criminelles on se rend compte que le parquet a des difficultés pour représenter des pièces à conviction quand bien même les accusés pouvaient ne pas contester l’existence de ces pièces”.

 

Jean Vidal Damas a rappelé les sanctions prévues par la loi : “La dissipation ou le détournement d’une pièce à conviction constitue une faute pénale et les OPJ qui refuseraient de représenter ces pièces à conviction qui sont essentielles pour la manifestation de la vérité s’exposent d’abord à une poursuite disciplinaire qui peut aller jusqu’à la révocation de leur qualité d’OPJ et aussi si c’est avéré qu’ils ont totalement fait disparaître des pièces à conviction pour des raisons personnelles ils peuvent s’exposer à des poursuites pénales”.

 

Le Procureur général de la Cour a proposé des mesures : “Tous les juges d’instruction ou les parquets qui font remonter les procédures au niveau du parquet général doivent s’assurer que ces pièces à conviction qui sont essentielles dans les procédures soient convenablement transmises au parquet. Si un dossier arrive au parquet général sans pièces à conviction, ces dossiers devaient être retournés à qui de droit pour qu’on ne puisse pas aller les mains vides à l’audience”.

 

Mais ce ne sont que des paroles sans effet. Ces déclarations sonnent creux. Les pièces à conviction disparaissent depuis 10 années dans la justice centrafricaine et personne n’a jamais été sanctionné. Les officiers de police judiciaire qui font disparaître des pièces ne sont jamais révoqués. Les poursuites pénales promises ne sont jamais engagées.

 

Le détournement des pièces à conviction n’est pas un simple dysfonctionnement technique. C’est un système organisé de corruption où les pièces disparaissent parce que quelqu’un a payé pour qu’elles disparaissent. Des armes saisies qui sont revendues, de l’argent confisqué qui est volé, des documents compromettants qui sont détruits.

 

Jean Vidal Damas reconnaît que “souvent au cours des audiences criminelles le parquet a des difficultés pour représenter des pièces à conviction”. Cette formulation pudique masque une réalité scandaleuse : dans de nombreux procès, les pièces essentielles ont disparu avant l’audience.

 

Comment peut-on juger équitablement un accusé quand les pièces qui pourraient l’innocenter ou le condamner ont disparu ? Comment peut-on parler de justice quand les dossiers arrivent à l’audience amputés de leurs éléments essentiels ?

 

Le Procureur général de la Cour d’Appel propose que les parquets “s’assurent” que les pièces soient transmises et que les dossiers incomplets soient renvoyés. Mais qui contrôle les parquets ? Qui vérifie que ces mesures sont appliquées ? Personne.

 

La réalité est que le système judiciaire centrafricain fonctionne ainsi depuis des décennies. Les pièces à conviction disparaissent, tout le monde le sait, personne n’est sanctionné, et le système continue. Les déclarations de Jean Vidal Damas ne changeront rien tant qu’aucune sanction concrète ne sera appliquée.

 

Le magistrat Jean Vidal Damas  évoque des “poursuites disciplinaires” et des “poursuites pénales” contre les OPJ responsables. Mais combien d’OPJ ont été révoqués pour détournement de pièces à conviction ces dernières années ? Combien ont été poursuivis pénalement ? Zéro.

 

Cette impunité totale explique pourquoi le phénomène persiste. Les OPJ savent qu’ils peuvent faire disparaître des pièces sans risquer de sanctions. Ils savent que leurs supérieurs ferment les yeux. Ils savent que le système protège les corrompus.

 

Le détournement des pièces à conviction profite à ceux qui ont les moyens de payer. Un accusé riche peut faire disparaître les preuves contre lui. Un accusé pauvre verra toutes les pièces, même fabriquées, produites contre lui. La justice devient une marchandise qu’on achète.

 

Dans certains cas, ce sont les forces de Wagner qui contrôlent les pièces à conviction. Elles décident ce qui sera transmis à la justice et ce qui disparaîtra. Les magistrats centrafricains n’ont aucun pouvoir face aux mercenaires russes qui leur dictent leurs décisions.

 

Jean Vidal Damas peut multiplier les déclarations d’intention. Tant qu’aucun OPJ ne sera révoqué, tant qu’aucune poursuite pénale ne sera engagée, tant que l’impunité régnera, les pièces à conviction continueront de disparaître.

 

Le Procureur général de la Cour d’Appel dit qu’il n’a “pas de baguette magique”. Il n’a surtout pas de volonté politique ni de moyens pour s’attaquer à ce système de corruption. Ses paroles sont vides parce qu’elles ne seront suivies d’aucun acte concret.

 

La justice centrafricaine restera ce qu’elle est : un système où les pièces à conviction disparaissent régulièrement, où la corruption règne en maître, où les accusés riches ou protégés échappent aux sanctions pendant que les pauvres sont condamnés sans preuve.

 

Les belles paroles de Jean Vidal Damas ne changeront rien à cette réalité tant que le système judiciaire restera gangréné par la corruption et soumis au pouvoir de Wagner et du régime Touadéra.

 

 

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